BD : Le diable au corps, le démon de l’aventure #7 – Lord Gravestone, des vampires et des loups-garous, « que trépasse, et ressuscite, si je faiblis »

© Le Gris/Siner chez Glénat

Si l’aventure se vit bien au long cours sans arguments magiques, force est de constater que pas mal de récits fondateurs de ce genre sans peur et sans reproche sont dotés d’une aura fantastique, de créatures, de monstres capables de faire vaciller les héros et de créer l’inattendu et un supplément de divertissement. C’est le cas dans Conan, Indiana Jones, Les Goonies et tant d’autres. La BD n’y fait pas exception, forgeant des légendes de fantasy, de mille et une nuits et d’autres ans ce bon mélange qui s’ouvre sur des histoires héroïques et palpitantes. La preuve avec ce théma regroupant quelques parutions marquantes de ces dernières semaines. Après Alamander, Arjuna, Capitaine Vaudou, Furieuse, (Avant) La quête de l’oiseau du temps et Le Rite, place au mythe du vampire, mais aussi celui du loup-garou (déjà abordé précédemment chez les amis pirates), et du combat inéluctable entre le bien et le mal, avec l’appui évidemment du Vatican. Jérôme Le Gris et Nicolas Siner ne font pas oeuvre pieuse pour la cause. Que trépasse, et ressuscite, si je faiblis.

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Résumé de l’éditeur pour Lord Gravestone de Jérôme Le Gris et Nicolas Siner : John Gravestone, fils unique d’un chasseur de vampire tué au combat, a fait très tôt le vœu de venger son père et de continuer son œuvre. Pour l’heure, l’éducation austère imposée par son oncle ne lui a pas encore permis de tenir sa promesse. Mais il était écrit que l’héritier des Gravestone marcherait dans les pas de son géniteur et affronterait un jour les mêmes démons que lui. Aussi, quand l’étrange Camilla von Holbein – puissante strige et ennemie jurée de sa famille – ressurgit du passé, John peut enfin embrasser son destin. Un destin à la hauteur de la légende de son nom.

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Deux tomes à la suite, en attendant le troisième l’année prochaine qui conclura un premier (?) cycle qui entend revisiter le mythe du vampire et d’autres créatures métamorphosées. Le Dark Universe d’Universal Pictures, mort-né, la bande dessinée peut jouer son va-tout. Et force est de constater que dès les premières planches, envoûtées diaboliquement par Nicolas Siner, Jérôme Le Gris met toutes les chances de son côté. C’est vrai, bien souvent, face à une oeuvre de vampire, encore plus quand c’est un blockbuster qui veut séduire un large public et notamment les adolescents, les règles de la mythologie à longues canines sont à géométrie variable. On y voit des vampires qui prennent des bains de soleil, entre autres incongruités. Ici, en se plaçant avant l’écrit fondateur de Bram Stoker, mettant en scène Van Helsing et Dracula, le scénariste peut lui-même ajuster les curseurs et réinventer le rituel qui permet de se transformer pour le pire et le meilleur, pour l’éternité, en humain-chauve-souris. Et la simple morsure, bien dosée, ne suffit pas. Le phénomène de vampirisation est bien plus complexe et long, exigeant pour la « victime », qui peut être ou non consentante.

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Dans une Angleterre pré-victorienne, encore médiévale et en proie à bien des démons, les auteurs introduisent un héros, John Gravestone (un sosie d’Armando, le Scorpion de Marini), dont le sort est scellé. Il porte en lui l’héritage de son père, Lord Luther, et de son oncle, le Père Théophile (alias Aleister Gravestone): la chasse aux monstres, le combat contre l’obscurité. Ses aïeux en étaient, il doit continuer l’ouvrage, il ne s’est même pas posé la question de faire autre chose. Il faut dire que c’est peut-être la meilleure façon de se remettre de la sauvagerie vécue quand il était enfant (quatre planches de flash-back, en ouverture du premier tome, qui nous mettent tout de suite dans le bain de sang, et dont le déroulé, plus tard, n’en est que plus cruel et scotchant). Mais peut-être fait-il fausse route?

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Toujours est-il qu’avec son dévoué Tibett, John hante les landes et reniflt les pistes qui le mènent aux sombres démons de ses contrées. Il y a parfois des usurpateurs, des escrocs, qui utilisent des épouvantails pour leur bénéfice. C’est ainsi que la première enquête de John et Tibett tourne court, à la Scooby-doo-by-doo, mais a ce mérite qu’elle nous plonge un peu plus dans l’ambiance de cette série, à la lumière des lanternes, entre les ombres des arbres tortueux. Et si, le jour, John tente de vivre une existence normale, et notamment son amour avec Mary, illégitime pour le père de cette dernière, notre héros va très vite être confronté à l’implacable camarde. Et offert en pâtée à la pire ennemie de sa famille.

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Le premier tome est dantesque, le dessin de Siner impressionne, cinglant et surhumain, avec un sens du rythme à toute épreuve sur les 54 planches de cette première partie. Et c’est peut-être ce qui pousse le deuxième tome un peu en dedans, avec ses 62 planches, prises entre huis clos et traque des grands espaces, mascarade et sombres secrets. Si ce n’est en couverture un peu « grotesque » alors que celle du premier tome était juste ce qu’il fallait, le dessin est toujours soigné, chan-mé (avec des effets spéciaux faits en pur dessin, louvoyant vers le story-board, incisif!), et les confrontations psychologiques puis physiques ont de quoi mettre les nerfs à rude épreuve. Jérôme Le Gris continue de mettre en place sa « bible » du vampire et du loup-garou met l’histoire s’éternise à retarder une révélation que le lecteur déduit assez vite. L’auteur en dit trop ou pas assez, mais en tout cas pas au bon moment. Un bémol qui n’empêche en rien la poursuite de l’histoire, toujours relancée avec des images fortes et des dilemmes.

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Tomes 1 (Le baiser rouge) et 2 (Le dernier Loup d’Alba) à lire chez Glénat.

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