
Apothéoz. Apothéoz, est-ce qu’on peut avoir une gueule d’Apothéoz? En tout cas, Théo, il s’appelle comme ça. Et s’il a une gueule passe-partout, c’est bien une guigne d’Apothéoz qui lui colle à la peau et à la lignée.


Résumé des Éditions Glénat pour Monsieur Apothéoz : Dans la famille Apothéoz, l’ambition conduit toujours à une mort d’exception. Convaincu que son nom porte-malheur, Théo a décidé de ne jamais rien entreprendre. À 30 ans, il vit de petits boulots et habite chez son père. Il aime Camille depuis l’enfance, mais elle n’en sait rien. Quand Théo rencontre Antoine Pépin, un écrivain en panne d’inspiration, c’est le début d’une étonnante amitié. Ce dernier ne croit pas à la malédiction des Apothéoz et insiste pour l’aider à conquérir Camille…

Des histoires de gens qui se cherchent, dans le monde qui nous entoure, il y en a des tas à raconter. Mais celle que nous racontent Julien Frey et Dawid est très singulière, basculant de bons sentiments en sainte horreur, sans que personne ne s’y attende. Tout d’abord, il y a donc Théo Apothéoz, un loser on ne peut même pas dire magnifique. Miné par la certitude qu’il ne lui arrivera jamais rien de bien dans la vie. Il faut dire que la destinée de ses aïeux parle pour lui. Une malédiction pèse sur les Apothéoz, depuis que l’arrière-grand-père a eu la mauvaise idée de quitter leur berceau, leur île d’Agormos, dans les Cyclades. Pour échapper à cette boucle mortifère, Théo a bien tenté de changer de nom.

Comble de malchance, les instances n’ont pas voulu entendre ses arguments et l’ont incité à aller de l’avant. Au casse-pipe, oui, comme les autres, conspués, forcés à l’exil ou tout simplement morts à la suite d’un faux pas. Alors, à 30 ans, Théo habite toujours chez son père, loin de son amour de jeunesse et incapable de trouver une stabilité autre que celle d’un éternel ado, soumis aux désillusions alcoolisées de son paternel, qui vivote d’un viager. Sur la couverture, très jolie, la scène bucolique laisse dégouliner le sang.




Pile ou face? Dans ce récit, la vie intense rencontre la mort (qui sait tout autant l’être), car l’un ne va pas sans l’autre. Et peut-être faut-il encore quelques cadavres pour conjurer le sort et rattraper le temps perdu. C’est ainsi que la rencontre avec un auteur de manuels de développement personnel va être déterminante pour Théo et l’emmener sur des pistes qu’i n’aurait jamais osé prendre.


Pour leur première collaboration – mais, outre Nadar (pour des histoires du 7e Art, ici ou là), Julien Frey a l’habitude d’explorer de nouveaux horizons graphiques -, les deux auteurs signent une histoire irrésistible et généreuse, jouant avec les bons sentiments mais aussi, un peu, le trash, avec des claques qui se perdent, ainsi que de purs moments de poésie, et des personnages dysfonctionnels (mais peut-être est-ce la société qui les entoure qui l’est?) qui révèlent une douce (ou dure) humanité qui illumine cette BD attachante et surprenante.


Dawid est vraiment à son aise, entre lumières et obscurité, avec ces personnages bien campés dans leurs doutes et leurs élans, leur expressivité jusque dans la manière d’être découpés et mis en case.


À lire chez Glénat.