C’est au nom du père et non plus de la guerre que Gibrat rend sa liberté à Mattéo et aux siens

© Gibrat chez Futuropolis

Voilà, c’est fini! Quatorze ans après les débuts de son épopée à travers les guerres, mais en dénonçant leur hypocrisie et leur cannibalisme, alors qu’il y a bien mieux à faire, et ce même si elles lui ont permis des rencontres durables, Jean-Pierre Gibrat met un terme à sa superbe saga Mattéo. L’occasion de dire au revoir à de nombreux personnages marquants de cette série et de faire échec au conflit, qui se fera désormais sans lui.

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Résumé du tome 6 des éditions Futuropolis : Après plusieurs mois de « drôle de guerre », l’armée allemande envahit la France à partir du 10 mai 1940. C’est la débâcle. Pour Mattéo et Louis, son fils, c’est le temps d’une traversée épique et mouvementée, qui les mèneront de Sedan aux plages de Dunkerque, sous les bombardements et dans la plus totale confusion…

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Sur la couverture, il y a déjà la fin qui s’initie. Trois personnages, trois attitudes sur ce radeau qui n’est peut-être pas celui des médusés, et porte l’Union Jack comme espoir. Mais nous n’en sommes pas encore là.

Au début de cette sixième époque, Mattéo est en prison, à ruminer à propos des alliances sur l’échiquier géopolitique qui ne présagent pas du meilleur, que du contraire. Mais le voilà déjà évadé, grâce à deux pandores alliés, contre toute attente. Et c’est dans une ambiance préfaçant la fin d’un monde (encore une) que Mattéo retrouve Paulin, qui ne peut plus le voir mais reconnaît sa voix entre milles. Au calme et avec quelques bons vins, le duo, un fugitif et un handicapé de guerre, attend que les choses se décantent.

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L’occasion pour notre réfugié espagnol, et citoyen d’un monde voulu de paix et de fraternité, d’amitié, de faire le bilan et d’apprendre qu’il a un fils, bientôt engagé sur le front du nouveau conflit mondial. Et le fils d’ignorer qui est son père. Ça va bien à Juliette de le taire. Et il est hors de question que la guerre prive Mattéo, en passe de perdre sa propre mère, de ce bout d’homme qui a tant à apprendre. La vérité?

© Gibrat chez Futuropolis
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Juin 40, c’est pas la fin d’une guerre, c’est le début. Et c’est là que Jean-Pierre Gibrat achève son épopée avec la maestria qu’on lui connaît, la douceur aussi et une espièglerie qui fait bon ton dans un univers de désillusions mortifères. Cet ultime album prend des allures de courses de fond, avec beaucoup d’éléments qui finissent de faire basculer le héros principal et de le convaincre que son but est le bon. Préserver sa progéniture et l’éduquer avec ses valeurs, son dévouement. Mais extraire Louis de sa prison, le matin de son transfert vers l’enfer, ça a tout d’une mission impossible. Mattéo compte donc sur ce qui a fait son succès et sa richesse, son bagout, cette manière de faire les choses comme personne ne le ferait et les bons liens avec des inconnus qu’il se met vite dans la poche, à force de sincérité. Jusqu’à Dunkerque. Qui sait, peut-être voit-on d’ailleurs Mattéo et ses amis, sa famille, figurer dans le film de Christopher Nolan.

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Dans un tout autre genre que le faiseur de blockbusters intelligents, Gibrat livre un final à l’image de sa série, à tête reposée mais dans le feu de l’action quand même, une fin inédite, ouverte, où brille l’osmose poétique (malgré les circonstances) entre les dessins à se damner que l’auteur propose et sa prose tellement enlevée, puant la vérité de l’instant menacé par le chaos. Mattéo, c’est fini, mais ça se relira à l’infini.

© Gibrat chez Futuropolis
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A lire chez Futuropolis.

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