Des pirates aux cosaques, rien ne résiste à la bande à Brugeas et Toulhoat, et si le sang coule, la liberté vit dans leurs veines

© Brugeas/Toulhoat chez Dargaud

La république du Crâne, Cosaques, Le Roy des Ribauds 4. Trois nouveautés en trois mois (enfin Le Roy des Ribauds était prévu pour mai mais il est reporté en septembre, la faute à la pénurie de papier), et pas des 48 pages. Pas de la piquette non plus. Bien sûr, la conception de ces passionnants pavés a été échelonnée dans le temps mais force est de constater que le duo inséparable (le scénariste pouvant quand même se permettre d’aller mettre son grain de sel ailleurs, dans Nottingham par exemple) formé par Vincent Brugeas et Ronan Toulhoat a une puissance de frappe assez folle et qualitative. Avec du souffle et de l’âme, à l’aise dans les zones bien éclairées ou plus sombres de l’Histoire, dans le corps-à-corps avec la véracité des faits ou leur extrapolation dans des futurs plus ou moins proches voire des uchronies, le tandem nous raconte deux histoires de combattants avides de liberté, dans deux univers très différents et pourtant séparés de seulement 80 années. Rien et beaucoup à l’échelle du Monde.

© Brugeas/Toulhoat/Guillo chez Le Lombard

De hussard à cosaque, ce destin n’était de toute façon pas le sien

Résumé de l’éditeur : 1634. Écoeuré après une bataille sanglante, un jeune hussard polonais décide de déserter. Il est accueilli par une étrange peuplade de guerriers ivres de libertés : les Cosaques. Mais la guerre semble le suivre où qu’il aille. Le nouveau Cosaque devra bientôt reprendre les armes pour défendre ses amis.

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Ayant changé de destin au dernier moment sur la volonté de son père, Karlis n’a pas forcément gagné au change sur les champs de bataille. Vaillant guerrier, pieds et poings liés, comme son capitaine, son protecteur jusque-là, à la volonté de sa majesté le roi de Pologne. Assoiffé de sang et de contrôle des peuples qu’il est. Alors Karlis s’est échappé, non sans provoquer la fureur de Sigismond qui, s’il doit exécuter (c’est le mot) sa mission avec des pieds de plomb, compte bien ne pas faire de quartier et ne laisser aucune chance à celui qui l’a trahi et de hussard devient un vrai cosaque.

© Brugeas/Toulhoat/Guillo chez Le Lombard
© Brugeas/Toulhoat/Guillo chez Le Lombard

Si ces castes militaires vous sont familières, Vincent Brugeas, Ronan Toulhoat et Yoann Guillo (appelé en renfort au co-dessin et aux couleurs) nous rafraîchissent volontiers la mémoire mais font trêve d’explications trop fouillées. Place à l’action, au passage d’un camp à l’autre qui permet d’appréhender les conventions, les convictions, les habits, la géopolitique, etc. en un coup d’oeil.

© Brugeas/Toulhoat/Guillo chez Le Lombard
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Dans cette conquête de l’est impitoyable (la majeure partie se déroule en… Ukraine), pris en tenaille jusqu’aux frontières moldaves où sévissent les hordes du sultan ottoman, le trio d’auteurs nous fait nous passionner pour ces vies d’hommes et de femme (une seule, et une sacrée, est dans le bastion de nos cosaques, toutes les autres sont persona non grata mais pas Zahra) rudoyées par les conflits, pris entre flèches, épées et armes à feu mais sachant se divertir au contact des chevaux, des moutons et des parties de cartes endiablées. Et cette considération, si faire la guerre donne des cauchemars, elle est plus facile que des métiers bien plus nobles et utiles, eux. « Mes bras et mon dos regrettent l’entraînement de hussard. Pratiquer le duel est moins fatigant que de remonter des filets de pêche. »

© Brugeas/Toulhoat/Guillo chez Le Lombard
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Avec 64 planches pour mener à bien cette introduction spectaculaire et maligne, faite de stratégie et de sentiment, les trois auteurs asseyent cet univers complexe qu’ils amènent à nous petit à petit, au fil des situations et des conflits. Avec des personnages forts et plusieurs voix pour raconter l’histoire. Souvent vu à la concrétisation des couleurs (Largo Winch, Frnck, Obscurcia, Marlysa ou encore le Goldorak phénomène d’il y a quelques mois) beaucoup plus rarement au dessin, Yoann Guillo a ainsi été amené à travailler à quatre mains avec Ronan Toulhoat.

© Guillo
© Guillo
© Brugeas/Toulhoat/Guillo chez Le Lombard

Ce qui a permis aux deux dessinateurs de tester de nouvelles choses, d’aller plus loin qu’en solitaire. Et si Yoann a eu son oeil et son crayon numérique attirés par les décors et les paysages, sans exclusive, il a aussi pu intervenir sur le dessin de Ronan. On ne sait pas toujours qui a fait quoi, et c’est tant mieux, les deux se sont fondus dans l’histoire brillante fournie par Vincent Brugeas. Du vert au feu, des brumes au sang, les ambiances sont à tomber et permettent un vrai voyage en ces terres reculées et hostiles. C’est cinglant, fort en effets spéciaux et en instinct. Avec cette considération, dans le spectacle cosmopolite, la mort et la baston ne sont pas gratuites.

© Brugeas/Toulhoat/Guillo chez Le Lombard
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Le tome 2 est en route:

© Brugeas/Toulhoat/Guillo

La république du crâne, à la vie, à la mort, à la liberté par dessus tout

© Toulhoat
© Toulhoat

Résumé de l’éditeur : Les Bahamas, 1718. De haute lutte, le capitaine pirate Sylla, secondé par son quartier-maître Olivier de Vannes et ses hommes, prend possession d’un vaisseau anglais. Contre toute attente, au lieu de massacrer les membres de l’équipage, les pirates leur proposent de se joindre à eux. Et ce, au nom des principes qui sont les leurs : liberté, démocratie et fraternité. Olivier de Vannes, devenu capitaine du nouveau bateau capturé, croise une frégate battant pavillon portugais. Il s’en empare. Le navire semble abandonné, et pourtant, des esclaves noirs qui se sont mutinés se trouvent à bord. À leur tête, la reine Maryam.

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Oh, encore un album sur les pirates, vous êtes sûrs? Parce qu’il y en a eu, ces derniers temps. C’est un thème fort de la BD depuis Hubinon ou Cuvelier. Et Vincent Brugeas et Ronan Toulhoat ont eu la bonne idée de faire à leur mode pour nous immerger, nous engager comme mousse, petite souris au milieu des vivres qui peuvent se raréfier, sur le pont des épris de liberté.

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C’est en compagnie d’Olivier de Vannes, celui qui porte malheur mais se révèle être un sacré navigateur, que le duo nous fait vivre cette histoire à la vie à la mort, avec moult rebondissements mais un océan qui devient trop petit que pour ne pas obliger les pirates à affronter leur destin et leurs assaillants toujours mieux équipés et plus nombreux, les bras armés du pouvoir impérial, celui qui brime et ne rend pas heureux.

© Brugeas/Toulhoat chez Dargaud
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Ce qui explique à quel point le mouvement lancé par ces « flibustiers » peut paraître salutaire et constructif d’un monde meilleur, même s’il doit passer par la violence et la diète, le courage et le dévouement. Mais, au fur et à mesure, des hommes et femmes tous azimuts ralliant le groupe de Sylla, cela ne risque-t-il pas de susciter jalousie et méfiance, complot et mutinerie? Car pirate ou officier, l’humain reste humain, avec ses sentiments et ses aspirations, son vécu qui le pousse à réaliser vengeance ou résilience. Avec les points de convergence et de divergence. Quand la peau est ébène, le blanc ne risque-t-il pas de rester un blanc, une cible? Et la liberté d’aller et venir dans le havre de paix ne prête-t-elle pas le flanc à de possibles frondes? Rien n’est simple.

© Brugeas/Toulhoat chez Dargaud
© Brugeas/Toulhoat

Dans des décors idylliques, Vincent Brugeas et Ronan Toulhoat scrutent la fin d’une épopée sur un flot calme ou démonté, à travers les visages et les bâtiments petits ou impressionnants. En quelque 200 planches, oscillant entre vie quotidienne, discussions et prises de décisions et de directions, et combats hallucinants, les deux déjà vieux loups de mer réussissent une fresque épistolaire et vivante, une étude sociologique jamais barb(ot)ante, exaltante sur ces pirates du XVIIe siècle. Il y a de l’attention et de la tension dans ce livre qui n’est jamais de tout repos, nous fait sentir le vent et le sel, la coque chahutée au gré des vagues. Ronan Toulhoat est en pleine possession de ces moyens graphiques, de la magie que peut faire passer le Neuvième Art, en poussant le détail ou en laissant la symbolique faire son oeuvre par petites touches. Oui, l’auteur exécute ses oeuvres à une vitesse folle, mais quel soin et quelle qualité il y met. La dernière partie, le clou du spectacle et du cercueil de nos amoureux de la liberté, en témoigne, âpre et libérateur. Fameux album, peut-être le plus puissant de ces deux enfants terribles qui passent outre le sans foi ni loi et l’amoral, pour raisonner les idées reçues.

L’atelier de Ronan Toulhoat

Et donc, le livre IV du Roy des Ribauds arrivera donc en septembre, en voilà quelques extraits :

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Série : Cosaques

Tome : 1 – Le hussard ailé

Scénario : Vincent Brugeas

Dessin : Ronan Toulhoat et Yoann Guillo

Couleurs : Yoann Guillo

Genre : Aventure, Guerre

Éditeur : Le Lombard

Nbre de pages : 64

Prix : 14,75€

Date de sortie : le 25/03/2022

Extraits : 

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Titre : La république du Crâne

Récit complet

Scénario : Vincent Brugeas

Dessin et couleurs : Ronan Toulhoat

Genre : Aventure, Guerre, Histoire

Éditeur : Dargaud

Nbre de pages : 224 (dont 12 de dossier)

Prix : 25€

Date de sortie : le 25/02/2022

Extraits : 

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