Des films, des romans, des chansons, des essais… si tous les secteurs culturels ont été mis à l’arrêt forcé par la pandémie de Covid-19, quand il a fallu redémarrer, tous ont pris à bras-le-corps le sujet pour le traiter sous toutes les coutures, de masque… et pas que. À l’instar des chanteurs et trublions, les dessinateurs de BD ont pris cette drôle de balle à picots – comme on le représente – au bond pour ne pas perdre espoir et amuser la galerie. Parce que les journaux presse mais aussi les journaux intimes (mais lisibles par tous) que sont les réseaux sociaux, entre les rumeurs et le stress ambiant, en avaient bien besoin. Avant même toute récupération ou opportunisme.

En quarantaine

Résumé de l’éditeur : Entre la fabrication du pain et la préparation stratégique des sorties en supermarché, nul doute que vous vous reconnaîtrez dans ces capsules quotidiennes de la vie en quarantaine. Un pourcentage des ventes de cet ouvrage est reversé par les auteurs et l’éditeur à des associations soutenant les soignants.

Au jour le jour, post par post, c’est ce que proposaient Lapuss’ et Tartuff sur leur page Facebook: suivre l’évolution du virus mais aussi des comportements et ambiances qu’il créait. Dans la plus stricte intimité (avec un putain de chat dans les pattes) ou en prenant le pouls de la société, les deux larrons en foire (ou au bal masqué) ont diverti les réseaux et proposent désormais leurs 56 jours en quarantaine dans un petit bouquin.

Autodiagnostic sur Internet, enfants à occuper ou encore les coulisses des grandes décisions politiques et sanitaires, le duo passe tout au crible et au crayon, noir et jaune comme la morve d’un nez coronavicié. Se laissant porter par la réalité de leur quotidien entre quatre murs (et quand on en sort pour aller faire les courses, c’est toute une aventure) ou emporter par la fiction (comparaison à l’appui entre films et réalité), Lapuss et Tartuff ont toujours ce ton bien à eux pour faire tressauter les zygomatiques à coups de blagues bien faites et utiles à relativiser.

Peut-on rire de toux

Résumé de l’éditeur : Peut-on rire de tout ? Voilà bien une question qui fait souvent débat. En ces temps anxiogènes de pandémie, Vincent Rif, illustrateur de profession (et humoriste de tempérament), répond par l’affirmative. Confiné comme tout le monde, sa devise pourrait être : quand la marmite est sur le point d’exploser, il faut soulever le couvercle !

En mode penseur de Rodin sur un socle de papier-toilette et le masque sur le nez, le Carolo-Bruxellois Vincent Rif se dévoile en couverture de cet autre recueil lui aussi paru chez Kennes. D’emblée, les clichés ne sont pas évités, il y aura là quelques kilomètres de papier-cul mais aussi des masques, des envies de coiffeur, de la distanciation sociale, de la parano et une bonne dose de rire à découvert.

Cette fois, pas de saynètes, c’est en tant que dessinateur de presse, focalisé sur une seule image par page, que Vincent se révèle. Jouant quelques fois le jeu des avant-après, le Belge a lui aussi des références pop et aime à imaginer le Covid au temps de la peste et du choléra, au Moyen-Âge; ou du Pac Man. Anachronismes bien pensés, combines pour aller dehors ou piquer une tête jusqu’à la plage. Sous les pavés de l’amer, des restrictions liberticides, Vincent agite un ton et un sens du mot cette fois encore bien sentis et assez originaux que pour faire sortir cet auteur du lot.

Une deuxième bonne pioche sur Kennes qui fait bien mieux que surfer sur la thématique et apporte un vent de fraîcheur et de chaleur humaine dans la froideur de l’époque. Ben oui, rire, ça fait du bien.

On en parle ?

Résumé de l’éditeur : L’épidémie de coronavirus a commencé à faire parler d’elle dès janvier 2020. Le 18 mars, les autorités ont annoncé aux Belges leur confinement forcé. Jamais Pierre Kroll n’avait autant dessiné sur un même thème… et en aussi peu de temps ! La somme est considérable.

Habitué au format Bd classique, Pierre Kroll a mis la bébête au petit format, comme l’étaient les deux compilations présentées ci-dessus. De quoi réunir 200 dessins sur une drôle de période parus dans le Soir ou Ciné-Télé-Revue ou diffusé sur l’antenne de la RTBF. De l’aveu de l’auteur, jamais il n’avait autant dessiné, en si peu de temps qui plus est, sur une thématique. Pourtant, les marathons de formation de gouvernement belge semblaient inégalables… Comme quoi, il ne faut jamais dire jamais.

Et, après un texte prophétique (2003) et alarmant du regretté Marc Moulin, c’est tout un festival (pas annulé celui-ci) que propose le dessinateur de presse… et de presque liberté. Au fil des pages, Pierre Kroll raconte le confinement et les saynètes auxquelles il a donné lieu. On les a vues et revues, dans les JTs et les indignations facebookiennes, dans l’humour faut de mieux qu’on essayait de garder, et pourtant le ton Kroll fait toujours autant de ravages, corrosifs et cathartiques.

Parce que lire ça, repasser ces premiers mois de nouvelle ère masquée, ça fait du bien, ça libère. Et la capacité de synthèse mais aussi de créativité farfelue de Kroll est toujours aussi bien rodée. Ne fût-ce que pour les variations autour de Pâques et ses cloches et de Sophie Wilmès en Supergirl aux côtés d’un Élio Di Rupo en Spiderman, on craque. Irrésistible et super-contaminateur.

Titre : En quarantaine
Recueil de gags
Scénario : Lapuss’, Tartuff
Dessin et couleurs : Lapuss’
Genre : Chronique sociale, Humour
Éditeur : Kennes
Nbre de pages : 64
Prix : 10€
Date de sortie : le 19/08/2020
Extraits :
Titre : Peut-on rire de toux
Recueil de gags
Auteur : Vincent Rif
Genre : Chronique sociale, Humour
Éditeur : Kennes
Nbre de pages : 64
Prix : 8€
Date de sortie : le 19/08/2020
Extraits :
Titre : On en parle ?
Recueil de dessins de presse
Auteur : Pierre Kroll
Genre : Chronique sociale, Dessin de presse, Humour
Éditeur : Les Arènes
Nbre de pages : 120
Prix : 12€
Date de sortie : le 24/06/2020
Extraits :