Dans les vestiaires, quelques minutes par semaine au coeur des guerres pubères

Avec feu Manolosanctis, La boîte à Bulles est de ceux qui, très vite, ont bien compris tout le talent et la vision du jeune Timothé Le Boucher, quelques années avant son explosion chez Glénat, coup sur coup avec Ces jours qui disparaissent et Le Patient. Ainsi, dès 2014, Timothé nous emmenait visiter, semaine après semaine, un vestiaire lambda d’un collège lambda. Un microcosme de sueurs et de pulsions salvatrices ou dévastatrices qui reparaît aujourd’hui.

© Timothé Le Boucher chez La Boîte à Bulles

Résumé de l’éditeur : Le nouveau vestiaire des collégiens ouvre ses portes. Vitres floutées et toilettes roses, les garçons découvrent les locaux rénovés avec un mélange de gêne et de moquerie. D’autant plus que les douches sont désormais collectives ! Ainsi deviennent-elles un centre d’intérêt particulier, dans cet espace clos où le principe fondamental de l’autorité adulte disparaît et où peuvent s’exprimer les instincts primaires à l’état le plus brut : agressivité, sexualité ado, moqueries, harcèlement de la tête de turc…

Première version du projet © Timothé Le Boucher
© Timothé Le Boucher chez La Boîte à Bulles

Hugo, Marien, Corentin, Gauthier… Une bande quoi, une classe à l’heure de l’éducation physique. Des amis ? Pas sûr. À cet âge-là, on se scrute, on se lance dans des alliances ou des guerres de gangs, on cherche à tirer son épingle du jeu quitte à piquer autrui. Braves gamins, sales gosses, l’écart est ténu, les rôles réversibles, dans le grand maelström d’une société adolescente, piégée dans le vestiaire le temps de se changer, quelques minutes. Pouvant être fatales.

© Timothé Le Boucher chez La Boîte à Bulles
© Timothé Le Boucher chez La Boîte à Bulles

La clé tourne dans la serrure, la porte s’ouvre et un flot d’élèves surexcité déboule dans la salle qui sent encore le neuf, et depuis trop longtemps confinée. Leur nouveau vestiaire, ces jeunes qui se voient déjà grands et durs, l’épient dans tous les coins et recoins, jugeant les couleurs, et refoulant le dégoût de découvrir que les douches sont communes. Il va falloir mettre son corps en jeu, le livrer aux regards admiratifs ou assassins des condisciples. Mère Nature ne gâte pas pareil ses enfants. C’est sûr, certains préféreront puer l’effort plutôt que de se laver et de livrer leur physique en pâture à l’effet de groupe. Rien de neuf sous le soleil, mais quand même.

© Timothé Le Boucher chez La Boîte à Bulles

Huis clos à l’abri du monde, flouté par les vitres qui pourraient offrir une fuite à ces vestiaires, Timothé envisage les relations de sa classe le temps de onze jeudis. Ou plutôt, de quelques minutes de ces jeudis sportifs. Le temps de se changer ou d’une douche, d’un aller-retour, patronné par la respectée Madame, la prof de ce groupe qui se cherche un leader. Dehors, le temps s’écoulera, les intrigues s’épaissiront ou se dilateront, Timothé Le Boucher n’en ramènera que les bribes que les gosses veulent bien évoquer dans ce lieu intime et vulnérable. Et le lecteur, lui, est piégé, il ne peut pas agir, juste constater ce qu’il se trame.

© Timothé Le Boucher chez La Boîte à Bulles

Le temps de 123 planches, l’auteur tisse son piège, emmêlé dans les expériences humaines les plus crasses auxquelles peut donner lieu un petit groupe d’ados. Il y aura des coups, de l’acharnement, des « pas cap »… mais aussi de la complicité quand il s’agit de trouver un passage secret vers le monde des filles en tenue d’Ève… Des réconciliations, aussi. Dans l’antichambre de l’éducation physique, Le Boucher dispense, par le mal, des cours d’éducation psychologique. Parce qu’il faut savoir se muscler la tête pour vaincre la peur de ne pas plaire, la crainte d’être la cible, fondamentale ou collatérale.

© Timothé Le Boucher chez La Boîte à Bulles

Jetant les bases du questionnement de l’identité qui jalonne son oeuvre, Timothé Le Boucher faisait ses dents avec ses armes déjà fortement affûtées et éloquentes sur un thème qui n’a cessé d’être brûlant d’actualité. Débarrassé de la peur de choquer, mais en le faisant intelligemment, intuitivement, Timothé Le Boucher va jusqu’au bout de son histoire, retournant les armes des uns contre les autres pour livrer une vision engagée et salvatrice. Cet auteur en a des choses à dire par la BD et en BD, avec brio !

Couverture de la première édition

Titre : Dans les vestiaires

Récit complet

Scénario, dessin et couleurs : Timothé Le Boucher

Genre : Drame

Éditeur : La boîte à Bulles

Collection : Hors champ

Nbre de pages : 128

Prix : 20€

Date de sortie : le 24/06/2020 (Réédition)

Extraits: 

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