Alors qu’il peut déjà se targuer d’une oeuvre fournie pour son jeune âge, Timothé Le Boucher s’est révélé un peu plus et a explosé (au sens noble du terme) dans la collection 1000 feuilles de Glénat avec Ces jours qui disparaissent (qui devrait arriver sur nos écrans bientôt, réalisé par Jonathan Barré). En attendant, et après un teasing d’enfer (prouvant à quel point son dessin hybride manga-franco-belge est fait pour fonctionner, même dans les cases séparées), le dessinateur poursuit son travail de fond et de tréfonds dans la psychologie humaine.

Résumé de l’éditeur : À quoi bon se souvenir qu’on a vécu l’enfer ? La police arrête une jeune fille errant dans la rue, couverte de sang, un couteau à la main. En se rendant chez elle, les agents découvrent avec effroi une scène de massacre : toute sa famille a été assassinée… 6 ans plus tard, Pierre Grimaud, l’unique survivant du « massacre de la rue des Corneilles », se réveille d’un profond coma. L’adolescent de 15 ans qu’il était au moment des faits est aujourd’hui un jeune homme de 21 ans. Désorienté, encore paralysé et souffrant d’amnésie partielle, il est pris en charge par le docteur Anna Kieffer, psychologue spécialisée sur les questions de criminologie et de victimologie. Pendant leurs séances, Anna tente de l’amener à se souvenir des circonstances du drame, malgré ses pertes de mémoire. Pierre lui évoque la présence mystérieuse d’un « homme en noir » qui hante ses rêves, probable réponse inconsciente à son traumatisme. Après plusieurs rendez-vous, Anna découvre en Pierre un être sensible et très intelligent. Touchée par son histoire, elle se met même à le prendre en affection. Petit à petit, une véritable complicité s’installe entre eux. Anna n’imagine pas à quel point ce patient va changer sa vie…


Encore une fois, son héros, Le Patient, à l’instar de Lubin Maréchal dans l’album précédent, a vu le temps filer et lui être dérobé. Pas parce qu’un inconnu lui vole son corps. Pas cette fois. Mais parce que, grièvement blessé à la suite d’un drame qui lui a décimé toute sa petite famille, il est tombé dans le coma. Et la clé de cette tuerie, avec.



Mais, six ans après, Pierre se réveille enfin. Va-t-il permettre d’expliquer cette sordide affaire ou au contraire la rendre plus inextricable encore.

Entre les psys, l’homme noir qui arp-hante l’hôpital (avec un peu le look du Diablo de X-Men), les autres pensionnaires de cette clinique (on aurait pu apercevoir Les bracelets rouges, les héros de la série de TF1) et d’autres personnages gravitant autour de lui, dans le passé ou le présent, Pierre se révèle. Et Timothé déploie une nouvelle fois ses ambiances, son esthétisme et ses mystères. Vénéneux.

Certains lecteurs ont juré avoir compris l’histoire à la moitié de ce pavé. Nous, après avoir relu la fin, on n’est toujours pas convaincu d’avoir compris. Comme si cet album était condamné à ne pas faire l’unanimité (et c’est peut-être mieux). Les interprétations varieront sans doute en fonction des attentes et des personnalités des lecteurs. De leur manière de se projeter aussi. Et il y a de quoi dans ces cases dont le découpage et la multiplication sont d’une maîtrise impeccable et implacable.

Moi, j’ai en tout cas adoré cette mélancolie, cette ambiguïté, ce magnétisme et surtout ce talent à raconter des histoires à plusieurs niveaux, à explorer et exploser la nature humaine, de la lumière à l’ombre, et vice-versa.
Et, au vu de ce qu’il publie mystérieusement sur son compte Instagram (suivez-le, ça vaut la peine), Timothé semble avoir encore de bonnes idées dans des univers prometteurs:
Récit complet
Scénario, dessin et couleurs : Timothé Le Boucher
Genre : Drame, Thriller psychologique
Éditeur : Glénat
Collection : 1000 Feuilles
Nbre de pages : 296
Prix : 25€
Date de sortie : le 10/04/2019
Extraits:
J’avais adoré Ces jours qui disparaissent, et je pense que j’aimerais tout autant Le patient, qui a l’air tout aussi intriguant et psychologique, sombre et émotionnel en même temps. Mais rien que le personnage en noir me met mal à l’aise : on dirait ces fichus spectres lorsqu’on fait une paralysie du sommeil, à dessein je suppose ! Quant à la complexité de l’histoire, j’ai hâte de la découvrir. Ces jours qui disparaissent avait aussi une fin très énigmatique.