Saga qui a su prendre son temps pour devenir véritablement tentaculaire, le Transperceneige est comme un monstre du Loch Ness qui aime à resurgir, faisant la nique au temps qui passe, pour déployer toute la force d’un univers visionnaire, encore aujourd’hui. Après le film de Bong Joon-ho, Le Transperceneige atteindra une nouvelle station, en mai, à la télévision, dans une série (par Graeme Manson, d’Orphan Black, et Josh Friedman, l’un des scénaristes des prochains Avatar et des Chroniques de Sarah Connor, ainsi que Scott Derrickson parmi les réalisateurs) produite par la chaîne TNT. Côté BD, avec Matz, Jean-Marc Rochette continue d’alimenter la machine dans un prequel pourtant éclairé à lumière des temps tristement modernes. Et un artbook éclaire cet immense artiste-alpiniste.
Résumé de l’éditeur : Sur la terre exsangue, surpeuplée, un groupe d’écolo-terroristes radicalisés décide d’accélérer le processus d’extinction et de déclencher une apocalypse climatique. Un milliardaire visionnaire chinois (inspiré de la figure d’Elon Musk) décide de les contrer. Obsédé par le survivalisme, depuis des années, il s’est préparé au pire scénario catastrophe : il a inventé un moteur autonome qu’il a intégré à une arche de Noé 2.0, Le Transperceneige. Quand la folie des Apocalypsters triomphe, le train est prêt. Au cœur de l’hiver atomique, le compte à rebours de l’ère glaciaire débute et la mission de sauvetage ultime est lancée.

Offrir un prequel à une oeuvre visionnaire, il faut oser, tant le risque est grand de perdre le pouvoir de fascination et de conviction. Comment garder la force de propos quand celui de l’original semblait d’une puissance inégalable. Comment aller voir plus loin en allant voir en arrière ?

Avec sa troisième saison (si on considère que Terminus en était une à part entière), la dernière pour un monde qui a fini par les mélanger, Matz et Rochette n’ont, pour leur postulat de base, pas eu besoin d’aller bien loin. Regarder une chaîne d’info une heure donne déjà de bonnes indications. Nous vivons, à quelques variations près, dans le monde que les pionniers du Transperceneige fuyaient déjà au milieu des années 70 (quand Alexis s’était penché sur le sujet avant de décéder inopinément) et encore plus dans les années 80 quand Jean-Marc Rochette a fait aboutir le scénario de Jacques Lob avec toute la noirceur, la froideur mais aussi le supplément d’âme qu’on lui connaît.


Avec Matz, dans Extinctions (admirez ce qui pourrait être le début de la fin et n’est finalement qu’une fin du commencement), Jean-Marc Rochette livre 80 premières pages burinées, surpeuplées, mal barrées, à l’ombre du Krakatoa ou des centrales nucléaires. Les auteurs créent le match entre les puissants (dont le meilleur est sans doute celui qui promet l’espoir et la survie) et des éco-terroristes radicalisés. Passant par le dialogue plus que par l’action, ce premier acte propose une plongée dantesque dans un jumeau à peine plus maléfique de notre monde.

Vulcain s’acharne, dans la colère du feu, le Transperceneige se prépare à démarrer. Mais il y a une odeur de mort plutôt que de vie. Le placement de cette origin story du plus grand train que la BD ait connue est parfait et en initiant ces trois volets, les auteurs réussissent autant un prequel qu’une suite, tous les deux implacables.

Deuxième acte en avril.
Vertiges, l’art et la manière d’aborder la montagne Rochette
Face aux sinistres événements qui nous attendent, à la position inconfortable dans laquelle nous met cette machine de guerre et pourtant luxueuse, il convient de prendre un peu d’altitude. L’occasion était trop belle, et alors que Jean-Marc Rochette vient de s’illustrer dans un magnifique diptyque montagnard (Ailefroide Altitude 3954 et Le Loup), avec de grandes bouffées d’air pur; les Éditions Maghen proposent un magnifique artbook, grand format, consacré à l’auteur et au titre on-ne-peut-mieux choisi: Vertiges. Un terme évocateur et aux multiples facettes.

Digne successeur de L’hiver en été, artbook du même gabarit consacré à Gibrat, Vertiges parcourt les beaux sommets de Jean-Marc Rochette, avec comme cordée un autre fabuleux entretien mené par Rebecca Manzoni.


Divisé en trois parties, l’album se consacre à la montagne, à des études de nu et, enfin, de manière monumentale avec de fortes encres, au travail de l’auteur sur le Transperceneige, soit près de quarante ans.

Le format facilite l’imprégnation, la projection dans cet univers graphique intense et bouleversant.

Série : Transperceneige – Extinction
Tome : Acte 1
Scénario : Matz et Jean-Marc Rochette
Dessin : Jean-Marc Rochette
Couleurs : José Villarubia (Isabelle Merlet pour la couverture)
Genre : Prequel, Science-Fiction, Thriller
Éditeur : Casterman
Nbre de pages : 84
Prix : 18€
Date de sortie : le15/05/2019
Extraits :
Artbook / Livre d’entretien
Auteur : Jean-Marc Rochette
Propos recueillis par Rebecca Manzoni
Éditeur : Daniel Maghen
Nbre de pages : 180
Prix : 39€
Date de sortie : le 21/11/2019