Olivier Boiscommun et la magie de l’encre: « Tout ce que tu mets dans un album, le lecteur le ressent »

C’est fou ce que peut faire l’encre. Celle qui donne littéralement comme littérairement vie à des univers entiers. En mots mais aussi en dessin. Ce constat était idéal pour fonder les nouvelles éditions Drakoo avec un premier album, qui a depuis été suivi par d’autres, négocié par Christophe Arleston, Olivier Boiscommun et Claude Guth. Interview avec le dessinateur de Danthrakon lors de la dernière fête de la BD de Bruxelles.

© Boiscommun

Bonjour Olivier, avec Danthrakon, vous ouvrez le bal des Éditions Darkoo, en compagnie de son penseur, Christophe Arleston. Pas trop le trac ?

Non, pas trop. En plus, l’album fait un bon démarrage C’est un chouette projet que porte Christophe en tant qu’éditeur. Il a ouvert une boîte à projets fantastiques, tout peut y être proposé. Et si la fantasy guide les premiers titres, ça s’élargira, vous verrez. Alors, oui, ça peut foutre les chocottes une nouvelle série, un nouvel album, mais la vraie pression est sur les épaules d’Olivier Sulpice et Christophe Arleston.

© Arleston/Boiscommun/Guth chez Drakoo

Comment est née cette nouvelle collaboration, la première avec Christophe ?

Ça fait très longtemps que nous avons envie de travailler ensemble. Cela fait vingt que nous nous connaissons, nous avions eu le temps d’évoquer un possible travail ensemble. C’est le lancement de cette nouvelle structure qui a permis à ce projet de naître. Plus par plaisir je me suis initié et j’ai découvert le fonctionnement de Drakoo avant, assez rapidement, de me mettre au service de son chef d’orchestre.

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Ce fut facile ?

Au début, j’ai senti dans le scénario de Christophe une matière tout public, ce à quoi je n’étais pas forcément habitué. Mais, après 25 ans, je suis capable de modifier mon dessin en fonction de mon public. Dans un premier temps, j’ai donc dû me cadrer, pour rester du registre. J’ai du sentir le cadre et trouver ma place. Mais, j’ai eu un allié de choc, Claude Gut qui m’a appris le fonctionner avec lui. Sur le deuxième tome en préparation, je suis rodé.

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Ce nouvel album, ce fut un mix de savoir-faire et d’une expérience de laboratoire. Nous avons pu tout discuter, retravailler, réécrire des dialogues. Claude a repris les couleurs et m’a mis des repères. Ce fut un chantier pour pouvoir mêler l’encre à la couleur et faire sens dans cet album. Puis, il fallait trouver un juste milieu dans la bestialité. Notre héros, par ce qui lui arrive, est très évolutif. Sans même se transformer, dans son état normal, il évolue beaucoup. Il est envoûté.

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© Arleston/Boiscommun/Guth chez Drakoo

Cet album, même avec des formules magiques indescriptibles pour le commun des mortels, c’est le retour de la puissance des mots.

L’ADN de ce projet, c’est l’encre, elle doit s’exprimer au maximum, jaillir de partout. C’est le travail de Claude qui a beaucoup participé à la mise en oeuvre de cet album qui a permis ça. Je me suis autorisé des choses que je n’aurais jamais faites auparavant. Des images très chargée.

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D’ailleurs entre la première version qui a été donnée à voir aux journalistes et la version finale, il y a encore eu des petits changements.

Un coloriste sait où l’oeil doit aller. Alors, oui, comme j’avais fait les couleurs de tous mes albums, sauf un, j’ai été très frustré au début. On n’est jamais à l’abri d’incohérences. Sauf qu’ici, Claude était à l’origine du projet, des gammes colorées, de la charte. Et comme il est excellent, je n’ai plus eu aucune réticence.

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Cela dit, ce ne fut pas facile parce qu’on s’est aperçu que le premier traitement de couleurs envisagé n’était pas aussi parlant qu’en couleurs directes. C’était un travail exigeant pour Claude, ça lui a coûté du temps. Aujourd’hui, il réfléchit à une autre méthode, à teinter l’encrage plutôt, à l’atténuer. Ce qui lui prendra moins de temps. Il faut savoir s’embêter pour viser un résultat.

Étienne Willem (interviewé précédemment) se mêle à la conversation : Justement, là où tu as des attentes, penses-tu que le lecteur s’en aperçoive ?

Peut-être ce travail est-il à peine perceptible pour le lecteur.Je ne pense pas qu’il le décèle mais il le ressent. Ça participe à l’ambiance. De toute façon, je crois que tout ce que tu mets dans un album, le lecteur le ressent même s’il n’est pas capable d’imaginer la manière dont l’auteur a procédé mais il sait si ça fonctionne pour lui, dans son for intérieur. Tout ce que tu y mets participe à ça.

© Arleston/Boiscommun/Guth chez Drakoo

Cet univers est peuplé de personnages, mi homme mi humain, anthropomorphe.

Opérer des fusions, c’est un plaisir mais c’est compliqué. Quand je me suis lancé dans la création des personnages à tête de crocodile, je me suis demandé comme j’allais m’en sortir lors des dédicaces. Parce qu’ils sont embêtants, ces personnages. Les dragons, les lézards, c’est compliqué de les dessiner de face. Le cadrage est un défi. Mais ce n’est pas la première fois que je dessine des anthropomorphes, j’ai l’habitude, ça aide.

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Qu’est-ce qui vous a plu dans cet album ?

Les trois premiers tomes qu’on m’a proposé renvoient à plein de choses auxquelles j’avais déjà touchées. Ça un côté rassurant, je ne partais pas de rien. Puis, il y avait ce livre magique que nous devions incarner dans la forme. Ce pouvoir du héros qui fait jaillir l’encre. C’était une base graphique novatrice pour moi. Je devais procéder par volutes. Un domaine connu avec des pistes nouvelles.

Voyez-vous plus loin que cette trilogie ?

On verra bien comment ça se passe. Christophe a plein d’idée, en tout cas, je ne me tracasse pas pour lui.

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Y’a-t-il d’autres projets ?

Je travaille depuis un bon moment sur une histoire complète, que j’ai scénarisée. Elle est bouclée, d’une bonne centaine de pages. Un conte fantastique médiéval, pas historique du tout, qui se passe pendant les guerres d’indépendance de la Bretagne. L’histoire d’un jeune fermier qui se retrouve enrôlé au fort de la Roche-Goyon comme soldat. Je storyboarde ça quand j’ai un peu le temps, ce qui m’arrive rarement.

Merci beaucoup Olivier et longue vie à l’encre ! 

Série : Danthrakon

Tome : 1 – Le Grimoire glouton

Scénario : Christophe Arleston

Dessin : Olivier Boiscommun

Couleurs : Claude Guth

Genre : Heroïc-Fantasy

Éditeur : Drakoo

Nbre de pages : 52 (Dont un cahier graphique de 6 pages pour la 1re édition)

Prix : 14,50€

Date de sortie : le 04/09/2019

Extraits :

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