Mutafukaz fait son intégrale définitive et biblique, de quoi prouver que Run est bien Père, Fils et Saint-Esprit et tous les évangélistes réunis!

Parmi les séries qui ont dynamité et ouvert un peu plus les champs de la bande dessinée à la française, il y a LastMan mais aussi Mutafukaz (ne me demandez pas comment ça se prononce). Ce n’est sans doute pas pour rien que l’écran a charmé ces deux séries livresques: le petit pour LastMan, le grand pour Mutafukaz qui était aux prémices un court-métrage (une pépite qui a explosé la toile mais qui reste inédite chez nous, en Belgique, malheureusement). L’occasion d’en sortir une belle et solide intégrale à placer sur toutes les tables de chevets es hôtels à la ronde. Et oui, Mutafukaz est une Bible dans laquelle son Créateur, Run fait office de Père, Fils et Saint-Esprit mais aussi de tous les évangélistes réunis et de scénariste, dessinateur et coloriste. Pour une aventure en odeur de sa…leté.

© Run chez Ankama

Résumé de l’éditeur : Angelino squatte une chambre d’hôtel miteuse dans le quartier latino de Rios Rosas avec son pote Vinz et enchaîne les petits boulots. Ses journées se traînent en de monotones zappings télé (heureusement il y a ces matchs de catch mexicain dont il est fan), de jobs foireux en discussions métaphysiques sous les étoiles avec son pote. Jusqu’à cet accident qui le plonge dans un tourbillon impliquant hommes en noir surarmés, gangs de toutes sortes, catcheurs justiciers mexicains et même des entités cosmiques vicieuses aux buts mystérieux !

© Run chez Ankama
© Run

Mutafukaz, c’est comme on dit dans notre plat pays, un melting-pot ! Un putain de melting-pot, un cocktail speedé et détonnant que les meilleurs barmen ne se seraient pas risqués à préparer. Tous sauf un petit bonhomme irréductible du nom de Run, rodé par des boulots précurseurs dans le monde de la com’ et nourri tous azimuts par une culture tentaculaire. De quoi faire regorger Mutafukaz d’idées plus folles les unes que les autres.

© Run chez Ankama
© Run chez Ankama

Pour ce qui reste un monument mais aussi un premier essai diablement converti, Run a ainsi mis de tout, comme les fromages belges, pour consolider l’univers de sa série et flinguer de tous les côtés : un style biblique et des références détournées, un indéniable sens de la culture street, hip-hop (et metal aussi) et gangsta, les secrets des zones interdites américaines, la menace extra-terrestre, le monde des tatous et de l’iconographie (y compris ceux qui rendent invulnérables !) sans oublier le sang chaud de l’univers latino et de ses lutteurs bodybuildés mais néanmoins masqués. Le tout coincé entre deux camps, entre lutte des classes et des mafias.

© Run chez Ankama
© Run chez Ankama

Vous comprendrez du coup que ce récit d’anthologie tienne sur près de 600 pages dont aucune n’est en de trop. Mutafukaz en intégrale, c’est comme un gigantesque Art-book, une ode au talent tout-terrain de son auteur, Run qui ne pourrait mieux porter son nom tant on a l’impression que son dessin, le rythme de ses cases et de ses planches semble être une question d’urgence, de vie ou de mort, de déflagration inhumaine… Et que du coup, il ne faut pas perdre de temps, il faut presser le pas, cavaler. Dépasser de loin Fortest sans forcément regarder où on met les pieds.

© Run chez Ankama

C’est ainsi que Run change de genre et de format au fil des pages, un coup s-f, six-coups western, un peu polar, un peu thriller politique, toujours en état de guerre. Puis, souvent comics, parfois manga, complètement remodelé par la puissance de frappe graphique de son instigateur. Run, ce sont des pages de 16 cases et d’autres composées uniquement d’une case immersive (on se demande pourquoi le cinéma fait de la 3D quand, en images fixes, cet auteur y arrive formidablement), et même une tonitruante séquence « roulé-boulé » qui, entraînés que vous serez par un âpre combat, vous forcera à retourner votre album. Run, c’est une magnifique digestion des arts et des lettres pour en faire un style explosif et unique, surdoué.

© Run chez Ankama

Le tout embarqué dans une histoire complètement folle dingue et imprévisible et pourtant tellement bien construite. Avec une multitude de personnages (y’a même Danny « Machete » Trejo, le regretté Johnny et McDo qui prend cher sans oublier Angelino qui a plus des airs de Venom que de Hulk quand il est fâché tout noir), certes, mais tellement bien campés qu’il n’y a pas besoin d’arbre généalogique pour les resituer. Et, sur une histoire de près de 600 pages, ça force l’exploit. Un de plus. Bref, que dire de plus. On pourrait vous résumer l’histoire sauf qu’elle est irrésumable et que vous nous prendriez pour des fous. « Ça ne marchera jamais », vous nous diriez. Sauf que si, et pas qu’un peu, du tonnerre! Mutafukaz, c’est le Gangsta’s paradise mais pas que, celui des autres aussi, pour peu qu’ils apprécient un tant soit peu le grand spectacle et la BD burnée, iconoclaste, démente.

© Run chez Ankama

Et le film, donc, qui a reçu d’excellentes critiques : 

Série : Mutafukaz

Intégrale définitive

Scénario, dessin et couleurs : Run (Chick/Semper Fi pour les rêves)

Genre: Humour, Fantastique, Super-héros, Polar, Thriller politique (et plein d’autres)

Éditeur: Ankama

Label : 619

Nbre de pages: 592

Prix: 34,90€

Date de sortie: le 04/05/2018

Extraits : 

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