Les femmes guerrières du Petit Théâtre des opérations: dans l’invraisemblable et véridique « Toujours prêtes », Monsieur le Chien cède sa place à la féline et badass Virginie Augustin

© Hervieux/Augustin chez Fluide Glacial

L’odieux connard donne voix aux femmes, oui oui. Il n’est peut-être pas si odieux et si connard. Oh, il ne s’est d’ailleurs jamais empêché de mettre en avant des destins de combattantes, de résistantes durant les guerres, dans les épisodes du Petit théâtre des opérations aux côtés du dessinateur Monsieur le chien, Julien Hervieux dégoupille cette fois un spin-off: Toujours prêtes! Un album dessiné par l’irrésistible et imparable Virginie Augustin entièrement dédié aux faits d’armes ou de paix de femmes face à la connerie des maîtres de guerre.

Résumé de Toujours prêtes ! par Fluide Glacial : Saviez-vous que les Allemands avaient affronté un régiment de sorcières durant la Seconde Guerre mondiale ? Ou que l’armée serbe en 1914 comptait dans ses rangs « Milun », la Mulan locale, qui faisait régner la terreur à coups de grenades ? Et quid de Marie Marvingt, qui a été tour à tour soldat, infirmière, et qui pilotait encore un hélicoptère à réaction à 86 ans ? Ça ne vous dit rien, ou si peu ?

© Hervieux/Augustin chez Fluide Glacial

« Je n’attends que de pouvoir étirer la période pour parler de femmes méconnues dans des conflits qui le sont parfois tout autant! Les oubliettes regorgent de femmes qui, pour le dire en peu de mots, ont sacrément botté des culs.« , explique Julien « L’odieux connard » Hervieux dans le dossier de presse accompagnant Toujours prêtes. Ce premier tome, qui en appelle d’autres, si le succès est au rendez-vous (vous connaissez le refrain), met en scène huit histoires de la première et la deuxième guerre mondiale. Huit destins qui ont été oubliés par les affres du temps. « Nombre d’entre elles ont été honorées pendant ou après leurs guerres. Mais peu à peu, le temps passe et fait son office. On oublie de plus en plus de noms, pour ne retenir que les plus importants: les généraux, les chefs d’État; bref les « grands ». Qui n’ont été que grâce à tous ces « petits », qui n’ont pas dirigé la guerre, mais qui l’ont faite. On retrouve cela aussi chez les héros masculins (…). On se souvient des généraux, moins des soldats ayant fait des étincelles, quand bien même ils auraient changé le cours de batailles. Être une femme était, finalement, une « circonstance aggravante » dans cette grande injustice.« 

© Hervieux/Augustin chez Fluide Glacial

Raison de plus pour y revenir et contrecarrer les plans de l’Histoire à la mémoire sélective. Ainsi, parmi les huit personnalités sélectionnées, on retrouve toute l’ampleur de ces conflits internationaux : on retrouve une Serbe, une Japonaise, une Belge, deux Françaises, une Australienne, une Franco-polonaise et un escadron de sorcières russes. Une star… de la physique et de la chimie (et bien plus encore), Marie Curie, et même une méchante (Yoshiko Kawashima, en manga dans le style). Toutes sont badass dans leur genre, qu’elles soient militaires ou civiles, sur le front, derrière les lignes ou en campagne de levée de fonds aux États-Unis.

© Hervieux/Augustin chez Fluide Glacial

Le casting est donc celui-là: Marie Marvingt; Nancy « La souris blanche » Wake; Milunka « la Mulan serbe » Savic; Octavie Delacour; Yoshiko Kawashima; Marie Curie; Marina Raskova, Sofiya Ozerkova et le 588e régiment de bombardiers russe et Marie Depage. Avec des personnages hauts en couleur mais de chair et d’os (car « oui, tout est vrai » selon le gimmick de l’auteur), la formule testée et approuvée dans Le petit théâtre de l’histoire garde le même cocktail : des histoires aussi véridiques qu’invraisemblables; une forme qui aime partir en live grâce au comique de situation ou de répétition, des personnages bien campés et plein de caractères des références et des anachronismes et une page de dossier (un intercalaire) pour aller plus loin. Même si on pourrait faire, et je pense l’avoir dit dans une précédente chronique de la série mère, un album sur chaque vie présentée ici à son climax. La concision, ça paie.

© Hervieux/Augustin chez Fluide Glacial

D’une vieille dame qui stoppera un convoi allemand passé au nez et à la barbe de centaines de couillons de français à une championne toutes catégories que l’ennui va motiver à inventer l’évacuation à skis, l’ambulance aérienne ou un type de suture révolutionnaire; tout ça fonctionne à nouveau du tonnerre, savamment dosé. La maquette de l’album ne ment pas: on laisse Monsieur le Chien faire sa popote avec le succès qu’on sait mais Virginie Augustin a voulu trouver son style, original et éclatant. Après avoir dessiné notamment un Conan et un Valérian et Laureline, l’autrice revient dans une veine que j’ai trouvée dans la lignée des regrettés Chaland et Cleet Boris. Ça fuse, c’est cinglant et ça ne s’encombre pas d’une ligne de conduite (comme la plupart de ces héroïnes, véritables têtes brûlées, et considérées comme telles à plus d’un égard, qui prennent leurs responsabilités pour que leur bravoure ne soit pas vaine) puisque Virginie Augustin joue avec les couleurs, les décors et même les genres de BD, avec une incursion japonaise monstrueusement délirante. Sans storyboard, l’autrice a carte libre. C’est enlevé, on se marre et qu’est-ce qu’on en apprend de façon remarquable, dans le fond comme la forme.

© Hervieux/Augustin chez Fluide Glacial

À lire chez Fluide Glacial.

© Hervieux/Augustin chez Fluide Glacial

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