Tueur d’étoiles de Daeninckx, Mako et Osuch : à l’ombre d’un Hollywood en lettres de sang, la trajectoire brutale d’un gang qui rêvait de faire bang

Depuis près de 25 ans, le doublement-Goncourisé Didier Daeninckx et Mako (à ne pas confondre avec Marko ou Makyo) font un sacré gang. Avec eux, au fil des éditeurs, le polar et le roman (graphique) noir sont toujours à la mode quitte à remonter le temps. Preuve en est, dans leur dernier né, Tueur d’étoiles, un bolide – pourquoi pas celui de James Dean ? – nous entraîne près de septante ans en arrière, et plus encore, dans des décors de cinéma et une folle course-poursuite qui, bientôt, comptera les morts.

© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès

Résumé de Tueur d’étoiles par les Éditions Félès : Juin 1956 : un casse tourne mal dans une agence de la Wells Fargo. Ce braquage sème la panique dans certains milieux politiques et mafieux. En cause, la disparition d’un dossier sensible enfermé dans l’un des coffres. Les trois jeunes voleurs ne s’imaginent pas dans quel guêpier ils se sont engouffrés. Liens du sang et liens d’armes vont s’unir pour tenter de les sauver quand le père de l’un d’eux appelle à l’aide un vétéran de la dernière Guerre…

© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès
© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès

Un plan sans accroc, si ce n’est un dommage collatéral. Connie, Mike et Nahële sont sortis de la banque plus riche qu’avant. Des sacs sur la tête, armes aux poings, ils ont réussi leur braquage haut la main. Hold-up. Et embarqué quelque 60 000 dollars à se partager. De quoi commencer une nouvelle vie.

© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès
© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès

Sauf qu’ils auraient dû se contenter d’être vénaux et ne pas emporter ce dossier certes intrigant… mais maudit… qui va pousser un tueur à gage sans pitié et qui fait mouche à tous les coups à les rechercher. Et s’ils ont réussi leur casse, un peu grâce à la chance du débutant sans doute, dans l’euphorie d’un nouveau départ, nos méchants (qui deviennent des héros en tombant sur plus méchants qu’eux) vont vite faire des fautes et être rattrapés. On ne donnera alors pas cher de leur peau, sauf en cas de miracle… qui n’arrive qu’au cinéma.

Cinéma, le mot est lâché, cet album en débord, sous perfusion des meilleurs films d’Hollywood tournés pendant la première partie du siècle dernier. Avec de sacrés acteurs dont les fantômes reviennent hanter ces pages qui se tiennent en une histoire mais aussi en un hommage choral, puzzle. En effet, sous une couverture qui fait déjà appel à l’esthétique et à la puissance d’évocation des vieilles affiches, Tueur d’Étoiles se présente comme une succession de courts chapitres, nerveux, rythmés par des affiches de grands films noirs, donnant le ton, de l’inspiration et peut-être même une atmosphère sonore, un supplément d’âme à cette histoire sans retour.

© Mako
© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès

On revient à l’essence, à l’os de ce que doit provoquer une affiche de film et que l’industrie cinématographique n’a pu qu’oublier sous des cahiers des charges et en fournissant des visuels qui se ressemblent souvent tous. S’il y avait déjà ce mimétisme en oeuvre sur les affiches de l’époque, force est de constater qu’il y avait un autre charme, de la gueule et du charisme, invitant déjà le potentiel spectateur à se faire son propre récit avant d’acheter son billet et de s’installer dans la salle obscure. Il y a de cet esprit-là, qui forcément quand on est trop sûr de ce qu’on se raconte ne peut qu’amener à être surpris, dans le jeu de chat et de souris que propose le duo qui se connaît par coeur. Ça se sent et ça fonctionne du tonnerre dans une mise en images classique mais redoutable, incisive et vénéneuse. Mako est dans le coup, habitant pleinement cette époque passée avec ses maisons, ses voitures, ses personnages qui se croient encore un peu dans un western. Avec des couleurs très expressives d’Osuch, délicieusement vintage.

© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès
© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès

Daeninckx relie des affaires suspectes survenues dans l’industrie du cinéma dans un récit où mouillent les officiels comme les officieux, les bons et les méchants, mafieux et services secrets. Ça peut paraître gros, mais le duo d’auteurs y croit dans un divertissement sec et crédibilisant leur raisonnement entre fiction et réalité. Avec forcément quelques références au 7e Art qui mettent dans le mille. Bien joué, coupez! Il y a ici beaucoup d’amour et de morts.

© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès

À lire chez Félès.

© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès
© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès
© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès
© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès
© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès
© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès
© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès
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© Daeninckx/Mako/Osuch chez Félès
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