
Le monde perdu (pas celui de Crichton et Spielberg) n’en finit plus d’être retrouvé dans les mains d’André Taymans. Se servant du monde bâti par Sir Arthur Conan Doyle, non par pour Sherlock Holmes mais pour le Professeur Challenger et son équipe, le père de Caroline Baldwin s’amuse comme un fou et en toute liberté pour faire son film de BD, mariant les arguments de série B pour surprendre, tenir en haleine et divertir. Son Eden est complètement à l’ouest.
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Résumé des Éditions du Tiroir pour le tome 2 d’Eden : Sur place, le rêve éveillé tourne vite au cauchemar. L’endroit est peuplé de créatures préhistoriques contre lesquelles nos héros paraissent bien désarmés ! Même si Kathy en a la certitude, ils ne sont pas les seuls humains dans ce Monde perdu hostile !

Nous étions partis hippies, et puis… Au fur et à mesure que l’aventure inattendue se déroule, il y a de plus en plus de monde, incasable et insortable, dans cette BD. Jugez un peu: des dinosaures, un fugitif, un avion écrasé, des Indiens, des jumeaux chasseurs de primes, des Russes pas sympathiques et une méchante aussi sexy que machiavélique, carrément badass et rutilante, un relent de nazisme, une colonie de crânes, des vastes étendues et des grottes qui fichent le cafard. Et forcément quelques morts, en dommages collatéraux des diverses quêtes qui s’opposent ou s’allient ici. Flower power contre racisme exacerbé, par exemple. Peace contre war. Sacré cocktail, hein!


Tout ça peut évoquer un nanar, dont les effets spéciaux laisseraient à désirer et la musique serait tapageuse, dont les comédiens surjoueraient mal. Et pourtant, nous ne sommes pas ici face à une oeuvre du Septième Art mais du Neuvième, et ça change beaucoup de choses. André Taymans se laisse aller à un grand bain d’action, foutraque, mais joue juste (si ce n’est peut-être une scène de sexe un peu superflue, et tombant vraiment dans la parodie mais qui rince l’oeil des amateurs et amtrices) et donne matière généreuse au lecteur pour se laisser embarquer.


Parce qu’il n’y a pas de son, que tout passe par le dessin et sa ligne claire (meurtrière parfois), les couleurs et un découpage qui peut diminuer le nombre de vignettes par page ou justement les augmenter, ralentir et accélérer, amener la tension. Et quand ça part dans tous les sens, qu’on suit les personnages (il y en a pour tous les goûts, des muscles, de la fragilité, de la folie…) et leurs péripéties plus ou moins dramatiques, leurs découvertes, ça marche du tonnerre. L’exercice de style est réussi et la dernière planche laisse entendre qu’il pourrait y avoir une suite, peut-être dans un autre univers? Ça m’a laissé très curieux.


En bonus, comme Les Éditions du Tiroir ne sont pas en manque d’idées pour que le lecteur mette la main à la pâte, il y a une plaquette sur laquelle le mini-van de nos héros hippies est dessiné sous tous les angles. À charge du bédéphile-bricoleur de le découper pour en faire un modèle 3D. Et voguer, vers L’Aventure. Éh oui, c’est le nom de la revue périodique de ces éditions. Nous n’en avons d’ailleurs pas fini avec André Taymans puisque nous vous parlerons incessamment sous peu du préquel de Caroline Baldwin, sorti il y a peu.

À lire aux Éditions du Tiroir