Il faut flinguer Ramirez, Valhalla Hotel… depuis quelques temps, les Éditions Glénat nous proposent des divertissements burnés, qui en ont sous le capot, reposant sur les talents de scénaristes et dessinateurs qui ne se refusent rien, surtout pas le plaisir de raconter des histoires qui défoncent. Dans Á prix d’or, place aux gonzesses qui entendent bien mettre à genou un monde de brutes masculines et dégénérées, encore plus lorsque la chasse au trésor est lancée.
Résumé de Glénat pour À prix d’or : Outback australien, de nos jours. Une mine d’or à ciel ouvert, un truand en col blanc, des brutes épaisses, quelques bons gars, un magot et deux jeunes femmes que tout oppose. Birdy la délurée, qui rêve de se tailler loin de ce trou paumé et Ellie Faye la sérieuse, qui bosse dur pour se faire une place dans ce milieu rude, terre d’attache de ses ancêtres, se rencontrent un soir au bord d’une route poussiéreuse. Deux mois plus tard, alors qu’un scandale de corruption éclabousse le propriétaire de la mine d’or, Ellie Faye et Birdy se retrouvent piégées, leur vie menacée par une bande de crapules armées prêtes à tout pour s’emparer d’un juteux magot, que Birdy considère comme son héritage. La journée s’annonce explosive…
Une rencontre impromptue le long de la routine, ça peut déboucher sur une sacrée aventure. Surtout quand les deux âmes en peine, Birdy et Ellie, sont faites pour s’entendre. Pour braquer une vie qui est loin d’être gagnée. Le hasard fait bien les choses, ou peut-être est-ce la providence, un malin dessein. Toujours est-il que l’une et l’autre vont se trouver alliées de circonstance pour mettre la main au magot, et prouver à ceux qui leur mettraient bien la main aux fesses qu’elles font jeu égal avec les hommes, avec détermination, provocation et innovation. Avec, peut-être, cette force en plus qu’elles arrivent là où on ne s’y attend pas.
En ne disant pas tout tout de suite mais en faisant jouer l’actu sociale bouillante du moment (une grève, un site d’extraction à l’arrêt, et le terrain de jeu est ouvert) et en laissant la tempête se passer, Nathalie Sergeef et Bernard Khattou réussissent un casse en plein désert complètement fou et allumé. Dans ce monde de muscles, où pourtant Ellie s’est fait sa place avec brio au volant de mastodontes, les deux héroïnes vont incarner plusieurs combats au-delà de leur quête de liberté, aidée par la fortune qu’elles pourraient bien trouver dans un coffre-fort au fond d’un trou: la lutte contre le machisme, contre l’évasion présumée de capitaux reçus en pots de vin, contre l’érosion des sols à force d’augmentation du périmètre d’activité, contre le port d’arme détenu par des fous furieux…
C’est sans compter quelques castards complètement en vrille, à commencer par la « famille » d’Ellie, Cendrillon moderne, férocement bêtes et méchants, surarmés. Car si une partie de l’épopée se déroule sans accroc ni crevaison, c’est une fois au fond de ce trou aux trésors que tout se complique: il faut en sortir! Et les pirates de l’Outback sont sur les dents, sur la gâchette.
À Prix d’or, c’est un one-shot en deux tomes parus simultanément. Un drôle de choix éditorial qui permet, cela dit, d’offrir aux deux protagonistes leur minute de gloire, sur deux couvertures (avec l’aide de Gom) qui font impression et ont du répondant, mais agit aussi sur le rythme de cette histoire. Le résumé ci-dessus décrit finalement, dans les grandes lignes, ce qu’il se passe dans le premier acte. Et, inévitablement, la lecture, qu’elle se fasse dans la foulée ou après une pause (histoire de garder du plaisir sous la pédale), se retrouve impactée par le passage d’un album à l’autre, avec un ventre mou dans ce spectacle pourtant ébouriffant. Mais ça reste du lourd, du divertissement de papier qui vaut bien des cinémas noir, même si les couleurs sont ici bien assurées par Céline Labriet.
À lire chez Glénat.