
Après avoir adapté et adopté le style Tesson pour y coller des images qu’il donne l’impression d’avoir vécues en direct, dans les forêts de Sibérie, Virgile Dureuil se laisse à nouveau porter par le style et les observations de l’écrivain-aventurier, en se rapprochant de la ville, de l’humanité (au sens de la vie et des tourments des Hommes) et de son Histoire. Militaire mais possédant des ramifications la liant à bien d’autres thématiques.

Résumé de l’éditeur : Deux siècles après la retraite de Russie, Sylvain Tesson refait la route de l’armée napoléonienne déchue… en side-car et en plein hiver.
Ils sont cinq : trois Français et deux Russes. Unis par l’amitié et par un grand défi, ils décident de commémorer à leur façon le bicentenaire de la retraite de Russie : en suivant le chemin emprunté par les troupes françaises en pleine débâcle. Partis de Moscou, Sylvain Tesson et ses amis traversent l’immense Russie, la Biélorussie, la Pologne et l’Allemagne, faisant route vers Paris au guidon de leurs Oural, ces side-cars russes réputés indestructibles. En chemin, ils franchissent le fleuve Berezina, devenu au fil du temps un nom commun pour désigner les échecs les plus cuisants…
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200 ans après, sur les mots de Tesson qui, à -10°c si la météo est bonne, tiennent chaud par leur humanité et leur profondeur, Dureuil fait le parallèle entre aujourd’hui et l’épopée faite de victoires au goût de défaites de Napoléon en Russie. Faisant moins oeuvre d’historien que de sociologue et de philosophe, interrogeant les époques, Sylvain Tesson et quelques-uns de ses amis avaient ainsi pris la route, en side-car, dans l’hiver vigoureux pour retracer ce qui reste comme une des dernières épopées napoléoniennes, avec face aux conditions rudes, des dizaines de milliers d’hommes qui n’en font qu’un seul, prêt à crever pour l’empire.

Tel phénomène d’unité et de sacrifice serait-il encore possible dans nos régions de nos jours ? C’est l’une des questions posées par Sylvain Tesson dans cet essai vécu dans le vent et la neige, où les distances sont tout de même réduites en temps par les moteurs et l’essence. Un peu plus luxueux qu’il y a deux siècles c’est sûr. Dans les oppositions et les ressemblances d’un épisode à l’autre, l’auteur-voyageur prend le temps des réflexions et des sensations, pour dresser le portrait de ce qu’est une société moderne. Avec plus de voitures et d’hydrocarbures que de chevaux. Plus d’individualisme, aussi.

Pour ce deuxième acte, après Dans les forêts de Sibérie, Virgile Dureuil est impérial pour rapprocher encore plus que ce que peut faire un texte deux époques (pas si) lointaines. Il y a toujours des ouvrages dont on pourra se demander l’intérêt de les adapter d’une manière ou d’une autre, ici tout est balayé dès les premiers instants de cette reconstitution en deux temps, qui parfois coïncident. Entre faits d’armes et faits d’âmes, Virgile Dureuil amène un peu plus de sens, dans ses cadrages, sa rythmique. Il épure le texte de Sylvain pour, sans doute, en dire plus et autrement. Parce que le pouvoir de l’image, dans la fiction ou le documentaire, est formidable et que le dessinateur lui rend tous les honneurs pour faire passer une multitude d’informations sans besoin de mots. Ces deux auteurs transmédias ont vraiment trouvé une connivence, une évidence, une cause commune.
Titre: Bérézina
Récit complet
D’après le récit de Sylvain Tesson
Scénario, dessin et couleurs: Virgile Dureuil
Genre: Aventure, Documentaire, Réflexion, Roman Graphique, Société
Éditeur: Casterman
Nbre de pages: 136
Prix: 20 €
Date de sortie: le 17/11/2021
Extraits: