Quelques années après avoir fait de Rien à Déclarer et de Supercondriaque de Dany Boon des BD (ce qu’il confie ne pas avoir été la plus géniale des idées, tant les mastodontes comme ceux-là et leur merchandising peuvent vous écraser, d’ailleurs sur son blog, il se considère désormais comme un ex-auteur de BD pour supermarchés) et même fait de Sarkozix un antihéros, Rudo revient à ses planches. Non sans avoir traversé le désert et retrouvé du sens dans un métier pour lequel il ne pensait avoir aucune aptitude mais dans lequel il s’est révélé bien utile. Après avoir signé deux albums de la Wesh Wesh Crew et fréquenté les gamins d’un centre éducatif pour lequel il donnait des cours de graffiti avant de devenir éducateur, (Geoffroy) Rudo(wski) est passé de l’autre côté, celui des aînés, et est devenu agent de soins. Sans oublier que le crayon, ça soigne aussi.

Résumé de l’éditeur : Après vingt ans de carrière dans le dessin et l’illustration, Geoffroy doit changer de profession. Sans argent, au bord de la séparation, pour vivre, on lui conseille de trouver un « vrai » métier. Mais quoi faire quand on a 42 ans et qu’on a tenu un crayon toute sa vie ? De déconvenue en refus pur et simple, Geoffroy saisit la chance qui se présente quand on lui propose un remplacement dans un EHPAD. Lui qui passait ses journées seul à sa table à dessin, se retrouve à faire la toilette à des malades d’Alzheimer, à aider des employés débordés et à faire face à une direction qui n’a pour objectif que de réaliser des profits pour le bien-être des actionnaires aux dépens de celui des pensionnaires.

À bout de souffle, c’est comme ça que Rudo avait été terrassé. Par des perspectives professionnelles et économiques plombées qui ont vite fait de faire basculer son équilibre amoureux et familial, sa santé mentale aussi, du mauvais côté de la balance. Expulsé de son rêve, de son envie de vivre de sa plume et son crayon, avec plus que son petit bonhomme et les cigarettes pour se tenir chaud.

Mais l’homme n’est pas du genre à se laisser aller, prêt à tout pour rebondir loin de son bureau et de sa planche à dessin, prêt à faire le ménage, à être polyvalent pour gagner sa croûte. Par la force des choses, et un peu du hasard, c’est dans un EHPAD que le quadragénaire s’est retrouvé, surpris de pouvoir apprendre sur le tas ce métier d’accompagnement des aînés placés en institution et de pouvoir amener sa pierre à leur édifice, là où les pontes sont toujours en train de chercher à réduire les coûts au détriment des bénéficiaires. Il était hors de question pour Rudo de les considérer comme des chiffres, car ils sont toujours vifs et ont de l’esprit, même si parfois la maladie prend le dessus ou que le drame de ne plus voir personne de l’extérieur peut être pesant.

Et ce gars de l’extérieur, c’était Rudo, sans bagage technique et médical mais avec la fibre de l’humain pour soulager les résidents, les changer, les laver mais aussi les écouter et nourrir le dialogue. Rudo, pas formaté, fonctionnant à l’instinct, apprenant au contact de cette population, nouvelle pour lui, à faire sens et à trouver l’inspiration mutuelle pour rebondir et laisser son crayon reprendre sa danse de la vie, sur des faits bien réels puisqu’il les a vécus durant deux ans. Plus qu’une parenthèse, un métier pour lequel il n’était pas fait mais qui ne lui a pas fait perdre son temps pour la cause. Avec son trait quelque part entre Clarke et Stedo, Rudo retrace dans l’intime et l’universel son expérience, dans un rendu peut-être un peu trop sépia cela dit que pour laisser éclater les belles couleurs de ce qu’il a vécu.

Titre : Prends soin de toi
Récit complet
Scénario, dessin et couleurs : Rudo
Genre : Autobiographie, Chronique sociale, Documentaire, Psychologique
Éditeur : Bamboo
Nbre de pages : 72
Prix : 16,90 €
Date de sortie : le 05/05/2021
Extraits :