Outch, après quelques semaines de fin et de début d’années plutôt costaudes en termes de repas, peut-être encore plus en confinement, on prendrait bien une petite salade César, non ? Légère, hein ! Bon, si c’est pour du Karibou et Josselin Duparcmeur, on peut faire une exception: c’est plutôt un plat de résistance que proposent les deux auteurs. S’il a mis un peu de laurier dans sa préparation, le duo a décidé d’aller voir ce qui se cachait en dessous. Il nous livre la recette de la meilleure salade César sur terre… Mais non, on déconne: Salade César, c’est le détricotage de l’Histoire, celle des vainqueurs. Oh, pas tant du côté des vaincus pour la cause ! De drames en gags, voilà un autre album impérial de la collection Pataquès. Ayé, avé!

Résumé de l’éditeur : Auto-proclamé dictateur, César s’avère être un crétin fini. Il règne sur Rome, il est en conflit avec Pompée. La routine. Mais c’est un César un peu bas du front, autocentré, autosatisfait et à l’imagination fertile. Il est ingérable. La seule solution est de l’éliminer physiquement. Mission que se donne Brutus, entouré d’une bande de comploteurs… ou plutôt de bras cassés.

« Jules César
On l’appelait Jules César
Il mettait pas d’falzar
Pour qu’on voie ses belles jambes
Ses jolies jambes
Ses jambes de superstar. »
Prenant le Grand Jojo de volée, Karibou au scénario et Josselin Duparcmeur ont prolongé la pensée du philosophe belge en s’aventurant aussi au-dessus de la ceinture du guerrier des Gaules. Parce que, faut pas croire, il était basé le Jules, avec des pecs démentiels… de débile mental. C’est simple, il ne résistait jamais à se découvrir pour montrer son anatomie musclée, gonflée… à mesure que son cerveau se dégonflait ? C’est possible. Ainsi passait la vie au sommet de l’empire, vaquant à des occupations bien futiles.

Bon, de temps en temps, le sérieux revient au galop, le temps de deux-trois cases sur six, quand Jules César tente d’organiser son armée, reçoit un espion porteur d’une nouvelle importante. Sans parler du sculpteur chargé de lui refaire le portrait. Mais tout repart très vite en vrille. Et, pendant ce temps-là, dans l’ombre (ou pas), Brutus lui avance les pions de son coup d’état, parricide oedipien? Mais là encore, d’aléas en alea jacta est, la fine équipe est plutôt à côté de ses caligae et dévie bien vite sur les buzz et sujets lifestyle du moment. Même quand il faut choisir une arme pour boucler l’affaire, ces foudres de guerres très intestines sont perdus.

Étoffant la théorie du complot (y compris sur la création des pyramides égyptiennes, évoquée dans quelques planches où Cléopâtre montre le bout de son nez), les deux auteurs livrent un excellent album d’humour, dans les pas de Fabcaro, dans le comique de répétition et cet art de ne rien respecter. Encore moins le fil de l’Histoire, tout tordu, comme nos zygomatiques face à cette succession irrésistible de gags tour à tout anachroniques, WTF et surréalistes mais formant un tout, jusqu’à une conclusion parfaite.

Rome ne s’est pas faite en un jour, mais en même pas une heure de lecture, Karibou et Duparcmeur font tout s’ébouler sous nos rires tonitruants. Et mine de rien il faut être vachement balèze (plus que Jules, lui, c’est de la gonflette!) pour rendre intelligent ce monde de brutes et de débilos. Rivalisant avec les textes bien troussés, Josselin Duparcmeur réussit des dessins qu’on pourrait placer en flipbook, en équilibre entre redondance et mouvement par petites touches, sans yeux mais avec des attitudes expressives et évocatrices.

Salade César, jolie jolie jolie, tu plais à mon père, tu plais à ma mère. À tout le monde en fait ! Un incontournable de la bande Pataquès, un Kaamelott antique.
Titre : Salade César
Récit complet
Scénario : Karibou
Dessin et couleurs : Josselin Duparcmeur
Genre : Anachronique, Humour, Parodie
Éditeur : Delcourt
Collection : Pataquès
Nbre de pages : 64
Prix : 13,50€
Date de sortie : le 30/09/2020
Extraits :
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