En attendant un hypothétique cinquième film avec Harrison Ford, la bande dessinée ne laissera pas Indiana Jones se faire de vieux os et continue d’entretenir le mythe, la parodie aussi, de l’aventurier à toute épreuve et, ce, au-delà des décors explorés originellement par l’archéologue téméraire. Cela donne des albums comme Inanna Djoun au pays des Français de B-Gnet, Le piège de la Mer Rouge ou, pourquoi pas, Malcolm Max dans le rayon plus horreur. Alors, tatata tatata, tata tata ta ta, l’esprit Jones a encore de beaux jours devant lui.

Le piège de la mer rouge

Résumé de l’éditeur : Renée et John, la copie de la tablette du roi lettré Assurbanipal en poche, fuient l’Éthiopie pour rentrer en Angleterre. Mais Gray et Frick s’interposent et les retiennent à Obock. Aidés en douce par Gisèle, la fille de Frick, ils reprennent la mer. Après maintes aventures périlleuses, ils seront sauvés par le gouvernement britannique. Au fin fond du Proche-Orient, dans un palais fantastique, ils tenteront de traduire la tablette qui les mènera à Ninive…

Clément Oubrerie, entre mille autres choses, est taillé pour ce genre d’univers, fait de mystère et d’action, de tension mais aussi de poésie littéraire. Dans la trilogie Une aventure de Renée Stone, dont Le piège de la Mer Rouge est le deuxième tome, acoquiné une nouvelle fois à Julie Birmant, Clément Oubrerie a cette fois la possibilité de fantasmer les lignes floues de la biographie d’Agatha Christie. Également évoqué le plus fidèlement possible par Chantal Van den Heuvel et Nina Jacqmin dans La mystérieuse affaire Agatha Christie, la fuite d’Agatha Christie vers l’Orient inspire le meilleur au duo Birmant-Oubrerie qui se retrouve à évoquer un destin réel qu’un rien suffit à verser dans la fiction la plus excitante.

Presse à scandale, espionnage, trésor absolument fou et grandes saillies littéraires font rebondir ce deuxième tome dans tous les sens, avec du flegme, de l’humour et des décors incroyables en souvenirs d’un temps où tout n’était pas industrialisé et touristique. Il y avait encore de la place pour le drame et les surprises, l’aventure au sens le plus noble du terme et au féminin. Avec cette Renée Stone, personnage d’un roman qu’Agatha n’a pas écrit mais vécu, à peu près, ce sont de fabuleuses pages de haute volée, toutes voiles dehors sur l’océan de l’audace et du suspense qui arrivent entre nos mains.


Inanna Djoun, la fille perse de Tintin et Indiana Jones
Résumé de l’éditeur : France. Terre de fantasmes et de légendes. Où les traditions côtoient le mystique et le fantastique. Inanna Djoun, professeure d’archéologie et conservatrice pour le Musée Départemental de Babylone part en exploration dans ce pays exotique pour trouver de nouveaux trésors archéologiques. Dans ce pays où le danger guette à chaque coin de rue, elle fera la connaissance de Demi-Pêche qui la guidera vers des trésors à la valeur inestimable.

En revisitant d’emblée l’esthétique onirique et mystérieuse des affiches des Indiana Jones, B-Gnet n’y va pas par quatre chemins parodiques pour planter le décor de cette grande aventure entre la Babylone d’hier et la France d’aujourd’hui. Sur son char digne de Ben Hur, l’adjoint au maire à la culture pénètre avec fracas dans le musée départemental d’archéologie que tient Ivanna. Le lieu perd de l’argent, les antiquités ne fascinent plus les foules, il faut aux Babyloniens de l’exotisme ! Sous la menace d’une crucifixion, Ivanna se voit missionnée pour aller faire un tour de l’Hexagone, au pays de la baguette (pas magique) et du camembert.

Un avion et un train plus loin, l’archéologue aventurière quitte son pagne pour des vêtements… de chasse-et-pêche. Elle a le look, la cocotte. Mais pas forcément le décodeur pour comprendre cet étrange peuple que forment les Français. Et comme le temps lui est compté, s’il faut couper une main ou affronter les gilets jaunes, elle ne fait pas dans la dentelle. C’est ainsi que commence une course contre-la-montre en voiture ou en chaise à porteur pour trouver le trésor qui permettra de faire de son musée un hotspot. Un radar par ci, un mineur par là, un peu de champignons et même le trésor des Templiers, la collection prend forme.

Dans ses planches ébouriffantes, B-Gnet réussit son entrée, fracassante chez Fluide Glacial, et s’amuse comme un petit fou en livrant une comédie d’aventure qui multiplie les surprises et les références à Indiana Jones mais aussi à Tintin, revisitant ainsi un beau lot de couverture hergéenne. Iconoclaste et anachronique, dépaysant la douce France, cher pays de son enfance, pays des châteaux-forts dont l’entrée s’offre désormais aux audacieux qui s’acquitteront d’un droit d’entrée, B-Gnet se sert des décors pittoresques et de la diversité des personnages qu’on peut croiser sous le ciel français pour réussir une quête jubilatoire. Et réellement inventive. L’auteur ne s’est pas reposé sur ses lauriers, comme on peut parfois en faire l’expérience dans une parodie. L’éclate totale !

Malcolm Max

Résumé de l’éditeur : En 1889, à Londres, rien ne va plus. Une série de meurtres terrifiants a déferlé sur la city. Malheureusement, même l’exécution du meurtrier supposé, surnommé « Le Poète » ne parvient pas à endiguer la vague de violence et de sang. La société secrète Custodes Lucis (Les Gardiens de la Lumière) confie l’enquête à Malcolm Max, expert en affaires paranormales et chasseur de démons.
C’est un peu le hors-sujet de cette sélection… encore que. Avec une couverture comme celle-là, brunâtre et éclairée à la lanterne, mortelle et pourtant captivant, les deux auteurs Peter Mennigen et Ingo Römling (déjà vu sans Star Wars Rebels et Star Wars – La cavale du Contrebandier) nous entraînent dans une ambiance à la Indiana Jones, paranormale et aventurière. Sentiment renforcé par la typographie du titre de cette série de quatre tomes.

Malcolm Max est une histoire qui nous vient d’Allemagne mais dont les héros particuliers ont traversé la Manche pour s’implanter dans le Londres à la fois de Victoria et de Jack l’Éventreur. Et des cimetières où il fait bon… mortel vivre. Et cette nuit-là, tandis que Malcolm est embusqué collé-serré avec son assistante Charisma, des charmes de laquelle il essaie de se tenir éloigner sous peine qu’une malédiction s’abatte sur lui, les pilleurs de tombes sont peut-être un moindre mal. Une ombre règne entre les tombes et doit étancher sa soif de sang. Le carnage est proche. Et de jolies créatures que ce dragueur invétéré qu’est Malcolm n’aura pas eu le temps de séduire, d’être retrouvées dans un piteux état. Dont une reporter sans peur et sans reproche, en recherche d’un grand scoop pour se faire accepter par ses pairs masculins. En guise de grand scoop, c’est un grand coup de couteau qu’elle a reçu de plein fouet sans pouvoir en tirer profit.

De son côté, Malcolm va très vite sembler être le coupable idéal, proche des scènes de meurtres et pas très net aux yeux d’un inspecteur qui ne nourrit pas de bons sentiments à cet égard. De quoi sans doute motiver encore plus l’aventurier londonien à trouver la clé de l’énigme. Qui se trouve peut-être dans le parcours d’un revenant… sans tête.

Beaucoup vintage, un peu steampunk, très volubile et bénéficiant d’une esthétique envoûtante,Mennigen et Römling nous soignent aux petits oignons avec cette histoire parallèle à celle de Jacques l’éventreur. Plutôt que de piocher parmi des éléments éculés, les deux auteurs créent leur univers et leur mythologie, nous entraînant dans une sorte de cour des miracles londonienne, instillant une atmosphère sulfureuse. Et créant le mystère à mesure que l’étau se referme sur leur héros. Et si Charisma est mi-vampire mi-humaine, il ne faut pas compter sur elle pour se sortir d’affaire en un claquement de doigts. Non, rien n’est facile, tout se complique.

Cette bande dessinée succède en fait à une pièce radiophonique qui connut de nombreux épisodes. Cela peut-être déconcertant car dès les premières planches, malgré résumé et présentations des personnages, on a l’impression de prendre l’histoire qui lie les deux personnages de cours. Ce n’est pas pour autant un handicap mais on rêve d’une origin-story racontant cette pièce que le public francophone n’a jamais vue. Ou d’un doublage des épisodes radio-diffusés.
Série : Une aventure de Renée Stone
Tome : 2 – Le piège de la mer rouge
Scénario: Julie Birmant
Dessin et couleurs : Clément Oubrerie (Page Fb)
Genre : Aventure
Éditeur : Dargaud
Nbre de pages : 64
Prix : 15€
Date de sortie : le 26/06/2020
Extraits :
Titre : Inanna Djoun au pays des Français
Récit complet
Scénario, dessin et couleurs : B-Gnet
Genre : Aventure, Humour, Parodie
Éditeur : Fluide Glacial
Nbre de pages : 48
Prix : 12,90€
Date de sortie : le 24/06/2020
Extraits :
Série : Malcolm Max
Tome : 1 – Les pilleurs de sépultures
Scénario: Peter Mennigen
Dessin et couleurs : Ingo Römling
Traduction : Camille Gardeil
Genre : Fantastique, Horreur, Thriller
Éditeur : Delcourt
Éditeur VO : Splitter Verlag
Nbre de pages : 72
Prix : 16,50€
Date de sortie : le 03/06/2020
Extraits :
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