C’est un album-clé, une oeuvre-charnière que les Éditions Grand Angle rééditent dans leur giron. En 2014, après une première partie de carrière passée dans la Bande Dessinée au format standard et « série », Bruno Duhamel se voyait offrir une opportunité qui ne se refuse par Isabelle « Lisa Belvent » Sivan: entrer dans le monde des one-shot, à tendance roman graphique, et s’offrir un premier héros ordinaire marquant : Abel. Cet album avait été une épopée, un parcours du combattant puisque les deux auteurs s’étaient résolu à l’auto-éditer avec les moyens du bord et l’énergie de l’désespoir de faire vivre un destin peu commun. Pour sa réédition, alors qu’un éditeur croit enfin au projet, le petit paysan fort attachant s’est retrouvé masqué mais vivant. Voilà encore un album de Bruno Duhamel avec un irrésistible supplément d’âme.
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Résumé de l’éditeur : « La vie est un voyage, pas une destination. » À Reclesme, dans un petit village au cœur de la France, Abel vit seul avec son chien, ses deux vaches et ses chèvres. Il n’a jamais quitté son village. Pourtant, toute sa vie, il a rêvé de parcourir le monde, et imaginé de lointains voyages. En ce mois de septembre, et ce malgré son âge, Abel a décidé de partir en Éthiopie.

2014. Bruno Duhamel a déjà une longue et palpitante carrière dans la BD quand il change son fusil d’épaule. Avec Isabelle Sivan, il compose une petite mélodie campagnarde qui voit Abel, le vieux berger philatéliste et collectionneur de guides de voyage qui a passé l’âge de la retraite depuis longtemps, rêver d’ailleurs. Enfin, rêver, il l’a déjà tellement fait. Cette fois, il est temps de prendre ses rêves pour la réalité. Partir, pour faire mentir Julien Clerc.

« Partir partir. On a toujours un bateau dans le cœur. Un avion qui s’envole pour ailleurs. Mais on n’est pas à l’heure. » Pour Abel, l’heure a souvent été retardée, mais cette fois, sous les regards ébahis de ses comparses, et parce que qu’il faut désormais trop d’imagination pour imaginer la mer depuis la rase campagne, il prépare son bagage et conditionne son chien. Il part. Pas destination Bahia, Buenos Aires ou Cuba (Y’a pas de Peyrac mais du Bauer, du Dario Moreno et du Josephine Baker dans le jukebox). Mais pour l’Éthiopie ! « La vie est un voyage, pas une destination. », dit-on mais pourquoi, l’Éthiopie? Ça, on laissera votre petit doigt vous le dire en parcourant ce délicieux album qui était le prélude aux « one-shot » que Bruno Duhamel imaginerait par la suite. Comme si ce format, sa souplesse et sa liberté avaient été une révélation pour l’auteur des Brigades du temps.

Abel a précédé de quelques années Madeleine, cette déboussolante mémé qu’il a mis en scène dans Jamais (qui reviendra!), et qui pourrait être l’oncle de Doug dans le zarbi #NouveauContact. Bruno Duhamel n’a pas son pareil pour créer des personnages qui, au coeur d’histoires différentes, pourraient être issus de la même famille. La filiation est là, l’esprit aussi. Dans le voyage d’Abel, l’histoire proposée par Sivan est simple mais universelles, fait écho à tout le monde et ne laisse pas indemne. L’art de Bruno Duhamel se laisse, lui, aller, et n’a fait que prendre de la bouteille, et de la bonne, depuis cette oeuvre de renouveau. Qu’importe le flacon dans lequel on met le bateau, pourvu qu’il y ait l’ivresse.


Avant de livrer une suite aux aventures de Madeleine, Bruno Duhamel prépare un western qui, selon toute vraisemblance, sera plus que modernes. Cela s’intitulera Fausses Pistes et, régulièrement, l’auteur en donne un aperçu sur sa page Facebook, que je ne peux que vous encourager à suivre.
Titre : Le voyage d’Abel
Récit complet
Scénario: Isabelle Sivan
Dessin et couleurs : Bruno Duhamel (et page Facebook)
Genre : Drame, Humour
Éditeur : Grand Angle
Nbre de pages : 72
Prix : 16,90€
Date de sortie : le 04/03/2020
Extraits: