Après avoir exploré les années 20 à travers quelques bobines inavouables dans La parole du muet, l’ancien projectionniste Laurent Galandon utilise le même média pour découvrir le Paris occupé selon un angle décalé. De quoi offrir à Alicia Grande de premières grandes émotions de papier dans un premier album qui manie le feu, des clopes aux grands incendies qui sont des actes de résistance.
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Résumé de l’éditeur : Paris, sous l’Occupation, septembre 1941. Un incendie dans le cinéma Le Concordia détruit la pellicule d’un film de propagande nazi. Chargé de résoudre l’affaire, le commissaire français Engelbert Lange découvre sur les lieux qu’il est surveillé par la Gestapo. Car c’est la deuxième fois qu’un acte similaire est perpétré dans la capitale, les autorités allemandes prennent donc la chose très au sérieux : la piste terroriste est privilégiée. Son enquête va conduire Lange dans le monde du 7e Art. Il va découvrir l’intensité créatrice et le vent de liberté qui subsistent dans un Paris sous tension. Mais entre la pression de ses supérieurs et celle de l’occupant, il va surtout devoir rendre des comptes… et voir resurgir de vieux démons.

Pour ce nouveau projet maniant histoire et cinéma, Laurent Galandon s’inscrit dans une veine de polar qui lui a déjà bien réussi par le passé. Encore une fois, le scénariste, s’il ne néglige pas ce décor, incrustant dans la grande histoire cette petite histoire authentifiée pour que la fiction s’y fasse plus réelle, la fait exister avant tout par une foule de personnages. Fernandel et autres Danielle Darieux sont les figurants de luxe, Alfred Greven et Henri Georges Clouzot les seconds-rôles, mais ce sont les anonymes qui ont le beau rôle et leur volent la vedette. Il y a chez Galandon un amour des personnages soignés et habités, torturés parfois. Quitte à ne pas se faciliter la fascination.

Comme héros, dans ce Paris lugubre dans lequel les cinémas répandent leurs lumières, encore plus quand ils brûlent, Galandon a choisi un enquêteur jusqu’au-boutiste mais complètement hermétique à la beauté du Neuvième Art. Là où son omniprésente femme, quitte à le rendre fou, ne jure que par le dieu caméra.

Pas de chance, pas au bout de ses peines, Engelbert Lange va être confronté à une double enquête qui semble étroitement lié à des destins de pellicule. D’un côté, un pyromane semble s’en prendre aux cinémas diffusant des films allemands. De l’autre, le cadavre d’une jeune femme est retrouvé aux côtés du scénario du film L’assassin habite au 21, film controversé dans sa capacité à parler au peuple allemand et, surtout, à lui servir la soupe de la propagande.

Dans cette première moitié d’histoire en 64 planches, aidé par la très expressive et souple Alicia Grande, ce premier rendez-vous nous emmène entre la réalité et la fiction, entre la résistance et la collaboration. Avec des sales trognes des deux côtés mais aussi de la légèreté dans ce monde de brutes, notamment au coeur des tripots clandestins. Dans ce microcosme frappé par la guerre en devenir, les deux auteurs manient l’obscurité et se font excellents éclairagistes, aux côtés d’Elvire De Cock et Jean-Baptiste Merle qui signent des couleurs vivantes. Alicia Grande ne se le fait pas dire deux fois quand il s’agit de dessiner des planches « carte blanche » où le texte se tait pour laisser parler le trait, ses ambiances et ses tensions.

Tome : 1 – Premier rendez-vous
Scénario : Laurent Galandon
Dessin : Alicia Grande
Couleurs : Elvire de Cock et Jean-Baptiste Merle
Genre : Histoire, Polar
Éditeur : Glénat
Nbre de pages : 64
Prix : 14,95€
Date de sortie : le 05/02/2020
Extraits :