La nouvelle était complètement inattendue et a ébranlé la planète comics (et peut-être aussi télé), à l’issue de son numéro 193 publié par Image Comics, les Walking Dead sont renvoyés définitivement en outre-tombe. La série est finie dans cet ultime épisode qui trouvera sa place, en France, dans le recueil d’octobre prochain. Et un communiqué envoyé par Delcourt a scellé le destin des Marcheurs. Mais pas la belle et trépidante histoire entre ces auteurs et leurs lecteurs français, puisque les auteurs ont déjà mis en route de nouvelles séries. Sur lesquelles nous nous sommes penchés avec le tome 2 d’Oblivion Song et le premier tome de Vampire State Building.

« Sorti cette semaine, le #193 de la série de comics Walking Dead est annoncé comme étant l’ultime numéro de cette saga de survivalisme, devenue un véritable phénomène éditorial et de pop-culture. La série Walking Dead est apparue il y a plus de quinze ans, créée par le scénariste Robert Kirkman et dessinée initialement par Tony Moore, puis reprise après sept numéros par Charlie Adlard. Le 32e et dernier tome est attendu pour octobre 2019 en langue française. L’arrêt de cette série est un choix délibéré des auteurs, effectué en toute indépendance, alors que la série s’est toujours maintenue depuis plus d’une décennie dans le top 10 des ventes aux États-Unis et caracole en tête des ventes de comics en France depuis 2007, avec – à ce jour – près de 5 millions d’exemplaires vendus. »
Oblivion Song : aux frais du frère

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Résumé de l’éditeur : Il y a dix ans, 300 000 habitants de Philadelphie ont soudainement disparu, happés vers une autre dimension. Ils tentent d’y survivre face à des monstres gigantesques. Le gouvernement a abandonné les recherches. Nathan Cole, lui, poursuit pourtant les missions de sauvetages de survivants, qui ne veulent pas revenir. Le monde s’effondre autour de Nathan, ce sont deux univers parallèles qu’il doit sauver…

« Oh Brother are you gonna leave me wasting away on the streets of Philadelphia », même si on est loin du drame de Jonathan Demme, sans doute y’a-t-il quelque chose de vrai dans la chanson de Bruce Springsteen qui puisse décrire ce deuxième opus d’Oblivion Song. Après une mise en place rendue époustouflante par le dessin de Lorenzo De Felici mêlé aux couleurs d’Annalisa Leoni, Robert Kirkman rentre dans l’intime et la psychologie de cet univers polarisé par ses deux personnages principaux: Nathan et Ed Cole. Deux frères que tout oppose.
Ça fait bateau, dit comme ça, non ? Pourtant, c’est on ne peut plus vrai. Nathan, c’est le scientifique par qui l’enfer est arrivé, qui a fait entrer en collision les réalités parallèles et amener des monstres préhistoriques dans le Philadelphia de nos jours. Et qui essaie de colmater tant bien que mal la fuite alors que d’autres veulent faire de son invention… une arme. Ed, c’est ce bon-à-rien de frérot qui est parti pendant dix ans dans le monde des effrayantes créatures, s’y est fait et s’y est plu. À tel point que le monde, dans lequel il est revenu de force par le courage de son frère, lui fait dire que l’homme est un monstre pour l’homme. Ed veut retourner là d’où il vient et il ne remerciera jamais assez son frère de lui avoir permis de découvrir un autre monde. Il ne le maudira jamais assez de l’avoir fait revenir.

L’ensemble de cette deuxième salve de six épisodes est donc axé sur ces retrouvailles semées de conflits entre les deux frères et sur ce que l’un peut infliger comme revers à l’autre en voulant l’aider. Question de longueurs d’ondes. Les autres personnages présents dans le premier tome évoluent aussi, chacun dans sa crise existentielle, à la dérive des mondes. Il faudra être fort pour survivre à cette épreuve qui sépare les gens en prétendant les rapprocher. C’est ainsi que les auteurs passent d’un univers à l’autre avec malice et ruse. En effet, grâce à une ceinture qui ne jurerait pas avec l’équipement d’un super-héros, Nathan et Ed peuvent, comme dans un jeu vidéo, franchir les épreuves qui les attendent dans le Philadelphia de nos jours en faisant une petite progression dans les étendues sauvages d’Oblivion.
Le concept est là, riche et coquin pour créer quelques surprises au-delà de la page qu’on va tourner. C’est démesuré. Parce que dans ce thriller de fantasy autant que catastrophe, le dessin de Lorenzo De Felici fait encore des merveilles et des monstruosités, encore plus quand on lui offre des doubles-planches. Les couleurs d’Annalisa Leoni aussi, cela dit, pas toujours conventionnelle pour mieux donner à ce récit son originalité. Ce volet graphique récupère la sauce, y compris quand Kirkman revient à la charge et appuie un peu trop son propos, là où le lecteur a pourtant bien compris les enjeux. Et quand on pense que l’aventure va se terminer en deux tomes, douze épisodes, deux planches relancent le suspense et les potentialités de cet univers double et XXL. Qui, en plus, devrait connaître une adaptation en film.

Vampire State Building : la tour de contrôle aux dents longues
Résumé de l’éditeur : Jeune Soldat sur le point d’être envoyé en opération, Terry Fisher retrouve ses amis au sommet de l’Empire State Building, pour une soirée d’adieu. Mais soudain une légion de vampires attaque le gratte-ciel et massacre ses occupants. Traqués dans les 102 étages devenus un piège mortel, Terry le pressent : avant que l’armée d’abominations ne se répande en ville, ils devront affronter U’tluntla, le terrible Dieu Vampire, emmuré dans le building depuis sa construction.

« … il y a des morts partout. Aidez-nous ! » Toutes dents sorties, cette fois, c’est Charlie Adlard qui continue d’ausculter les monstres incontournables. Cette fois, avec des vampires et au coeur d’un projet français dont Ange et Patrick Renault signent le scénario et Sébastien Gérard les couleurs pour mieux prendre d’assaut le mythique Empire State Building. Une tour de contrôle qui redevient sauvage lorsque des ouvriers en bâtiments libèrent, bien malgré eux, la bête immonde. U’tluntla, le Dieu-Vampire surpuissant et capable de rallier, à des kilomètres à la ronde, ses sbires. Pour faire un massacre ! Alors que police et forces armées se retrouvent au chevet de ce symbole américain en décomposition (et en direct) bien vulnérables et incapables d’affronter la menace qui les dépasse jusqu’ici.

Dans un premier tome terrifiant mais qui plante bien le décor, sans trouver leur John McClane, l’histoire se révèle sans surprise, unidirectionnelle. On reste sur notre faim. Contrairement à Oblivion Song qui paraît en francophonie par lots de six épisodes, Vampire State Building est une parution française, en albums donc, qui ne se donne à voir qu’en 52 planches. Sans doute, une parution en comics aurait-elle donné plus de biscuit aux lecteurs, avec plus du double de pages rassemblées en un tome.


Tant pis, on attendra le second tome, fin de cette année, pour se faire une meilleure idée de ce qui se trame. En attendant, la faiblesse du format est compensée par une autre, de taille : c’est au format franco-belge que Charlie Adlard s’exprime et il y prend ses aises, le bougre. Habitant complètement d’ambiance et de puissance, de frénésie meurtrière ou salvatrice (en fonction de si on a les dents longues ou pas). C’est du lourd.

Où est Charlie ? Partout, dans chaque pore, maîtrisé, du papier. Ange et Renault ne sont pas en reste dans leur manière d’habiter eux aussi cette histoire de manière décalée. Le jeu de mots qui sert de titre (facile, déjà vu mais efficace) n’est pas qu’une façade, et les auteurs font des blagues à leurs lecteurs. De quoi passer d’un début décontracté à un final d’horreur pure. Le ton est atypique pour une histoire qui impose sa loi fantastique au commun des mortels (pas de héros chasseur de vampires, ici, on l’a dit), et ça, c’est plaisant.

Série : Oblivion Song
Tome : 2
Scénario : Robert Kirkman
Dessin : Lorenzo De Felici
Couleurs : Annalisa Leoni
Genre: Science-fiction
Éditeur VO : Image Comics
Label : Skybound
Éditeur: Delcourt
Nbre de pages: 160
Prix: 16,50€
Date de sortie: le 22/05/2019
Extraits :
Série : Vampire State Building
Tome : 1
Scénario : Ange et Patrick Regnault
Dessin : Charlie Adlard
Couleurs : Sébastien Gérard
Genre : Horreur, Survival
Éditeur : Soleil
Nbre de pages : 56
Prix : 13,95€ (version noir et blanc à 22,95€)
Date de sortie : le 17/01/2018
Extraits :