
À un moment, il faut se rendre à l’évidence, un ours et une souris ne sont pas faits pour vivre ensemble! Il leur aura fallu du temps (et de nombreux albums enchanteurs) pour s’en rendre compte mais les fidèles amis, Ernest et Célestine, font cette fois maison à part. Sans espoir de retour? Célestine déménage, les deux héros font semblant de tenir le coup mais, en fait, ça les chamboule beaucoup. Au bonheur des souris est le 27e album de la série classique (un peu plus vertical que d’habitude) et le premier à paraître depuis la mort de l’autrice Gabrielle Vincent, en 2000, et ce qui était jusque-là l’ultime album de la série, Les questions de Célestine, en 2001. À la relève, Astrid Desbordes assure la continuité poétique et plein de bons sentiments de cette saga du quotidien adorable.

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Résumé d’Au Bonheur des Souris par les Éditions Casterman : Tout commença un dimanche de fête avec un ciel bleu vif, un vent d’automne et… une Célestine en colère. Après une dispute avec Ernest, Célestine décide de s’installer dans le monde des souris, chez ses amis Charlotte et Oscar. « Les souris avec les souris, les ours avec les ours ! ».Il paraît que tout marche mieux comme ça. Eh bien allons voir…


Sur la couverture de ce nouvel album, tout le monde est gai, l’ambiance est festive et la table bien garnie, à partager entre ours et souris. Une certaine idée d’un bonheur éphémère, car ça ne va pas durer. La colère va prendre le dessus. Une dispute qui va avoir pour conséquences une envie d’ailleurs pour Célestine. Oh pas trop loin, mais plus dans les mêmes murs, avec ses pairs. « Et bang, la porte claqua. » Direction chez Charlotte et Oscar qui vivent dans une maison de maître, avec professeur privé et des belles robes dans la penderie. La belle vie, de luxe!

Le lien lui, entretenu avec Ernest, resté à la maison, existe toujours mais se distend. Astrid Desbordes a eu la bonne idée d’utiliser la voie épistolaire pour continuer à faire correspondre les deux héros isolés. Le monde est beau et joli dans les lignes qu’ils couchent après chaque journée, mais en réalité, n’y aurait-il pas un manque et une idéalisation de leur nouveau monde. Car, outre les courriers, la nouvelle tutrice des deux animaux de Gabrielle Vincent rend évidemment visite aux protagonistes, chaque jour de la semaine. Et il y a comme un déséquilibre, tout n’est pas rose. Le suspense est là lui aussi, au moment de retrouvailles manquées.

Titre argenté et en relief, couverture qui a du grain et de la main. Avant d’ouvrir cette nouvelle histoire, quel plaisir pour les plus grands d’en toucher l’écrin. Ça invite déjà au voyage dans le pays, tellement anachronique par rapport à notre modernité et ses technologies, tellement plaisant, d’Ernest et Célestine. Naturellement, au-delà du texte, il y a les illustrations. Astrid Desbordes et Casterman ont eu la bonne idée de tisser cette aventure posthume en convoquant des dessins réalisés par Gabrielle Vincent elle-même à d’autres fins. Mais pas que. Sur les 42 images, une quinzaine a été réalisée, dans la pure tradition de la série, par Marie Flusin pour mieux habiter et personnaliser cette séparation, au-delà du matériel existant.

Après le magnifique film, Ernest et Célestine : le voyage en Charabie, sorti il y a quelques mois (accompagné d’ailleurs d’un album jeunesse du film très apprécié), la magie continue d’opérer du premier mot au dernier. Vivent Ernest et Célestine et leur tendresse.
Et pour continuer cette belle histoire, il y a une exposition à voir à la bibliothèque Sésame de Schaerbeek.
À lire chez Casterman.