Qui ne connait pas Arsène Lupin le gentleman cambrioleur, personnage énigmatique créé par Maurice Leblanc, connu pour son talent à user de déguisements, à se grimer, et à prendre des identités multiples pour commettre ses délits et résoudre des énigmes criminelles?
Le Théâtre Royal du Parc nous propose jusqu’au 3 juin « son » Arsène Lupin, quelque peu déroutant, mais néanmoins fort distrayant.
Après avoir incarné Passepartout, Chaplin, Scapin, Fantômas, le dieu Hermès, Othmane Moumen se glisse dans la peau d’Arsène Lupin, le fameux gentleman cambrioleur et grand séducteur. Bien décidé à prendre sa retraite, Lupin va se retrouver malgré lui entraîné dans une course poursuite et une chasse au trésor, en pleines années folles.
Pour tous ceux qui ont lu les romans de Maurice Leblanc, qui ont marché sur la plage d’Etretat au pied de sa célèbre aiguille non loin de la maison de l’auteur, ou qui ont vu l’inoubliable série TV des 70’s avec Georges Descrières dont la chanson générique chantée par Jacques Dutronc est devenu un classique, Arsène Lupin est loin d’être un inconnu.
Mieux même, il est rentré dans l’imaginaire collectif d’un nombreux public qui voit en lui un héros insaisissable dont on salue le panache et la flamboyance. Sa silhouette élégante ornée d’une cape et d’un haut de forme, et son célèbre monocle en ont fait rêver plus d’un.
Alors quand on se dit qu’on va voir au théâtre les aventures de ce héros étincelant on s’attend à retrouver les codes incontournables qui ont alimenté nos rêves.
Et c’est le cas lorsque le rideau se lève, et qu’apparait devant nos yeux un Lupin aérien tel qu’on se l’imagine.
On s’en réjouit, et on se dit alors qu’on va vibrer tout au long des deux parties que dure la pièce ( 1h20 et 40 min) au rythme d’une intrigue se déroulant au coeur des années 20, entre la Normandie et Paris.
Mais subitement la pièce change de ton, fini la flamboyance, et on se retrouve d’un coup face à un Lupin fatigué de son personnage, se faisant appeler Raoul D’Andrésy, et aspirant juste au bonheur d’un foyer tranquille et ennuyeux, à mille lieues de la vie trépidante de son personnage. Alors, finalement Lupin finira par reprendre du service, mais cette partie de la pièce où notre héros balance entre ses choix personnels à la limite de l’ennui et l’attrait de l’aventure, propose pas mal de longueurs et nous fait voir une facette du personnage bien moins palpitante.
C’est aussi le choix des auteurs ( Thibaut Nève et Othmane Moumen ) de nous situer l’action dans un contexte où les mouvements féministes éclosent, et où Lupin rencontre aussi Joséphine Baker et fréquente les artistes cabarettistes. Ce qui nous vaut d’ailleurs un très beau numéro musical collectif qui relance la dynamique de la pièce avec une Manon Hanseeuw très en voix. Au sortir de la grippe espagnole et de la grande guerre, le temps est à la recherche des plaisirs et à la liberté retrouvée.
Finalement c’est dans la deuxième partie du spectacle que les auteurs repositionnent notre héros dans son rôle de gentleman cambrioleur que l’on aime. Sa recherche du chandelier à sept branches ( inspiré de la première énigme écrite par Leblanc), son affrontement avec la comtesse de Cagliostro et leur recherche du trésor des abbayes de France nous replongent dans une enquête comédie digne du personnage qu’on aime. Ca courre, ça venge, ça trahit, et les scènes s’enchaînent alors sans temps mort jusqu’au final.
Evoluant dans un jeu de décors impressionnants et astucieux (la marque de fabrique du Théâtre du Parc), le casting est excellent avec Julie Dacquin, Christian Dalimier, Damien De Dobbeleer, Anton Drutskoy Sokolinsky, Manon Hanseeuw, Olivia Harkay, Sarah Lefèvre, Thibault Packeu, Bernard Sens, Laurence Warin, et bien sûr le virevoltant Othmane Moumen, irrésistible en Lupin. La mise en scène est de Thibaut Nève.
Même si on est ici face à un choix d’auteur qui pourra peut être surprendre les afficionados du personnage, cet Arsène Lupin constitue un excellent divertissement non dénué d’humour qui enchantera toute la famille.
Un spectacle total et de qualité comme on peut désormais en voir régulièrement au Théâtre Royal du Parc.
Alors, n’hésitez pas à aller partager ses aventures !
Jean-Pierre Vanderlinden
ARSÈNE LUPIN
de Thibaut Nève et Othmane Moumen, d’après les personnages de Maurice Leblanc
Mise en scène Thibaut Nève Scénographie Vincent Bresmal et Matthieu Delcourt Costumes Anne Guilleray Lumières Xavier Lauwers Chorégraphies Natasha Henry et Maïté Gheur Chorégraphie des combats Emilie Guillaume Création sonore Ségolène Neyroud et Agathe Regnier Maquillages et coiffures Valérie Locatelli