
Giovanni Rigano n’est pas un jeune premier, il a à son actif 20 ans de carrière, des licences comme Artemis Fowl ou W.I.T.C.H. mais aussi quelques chouettes héros du paysage franco-belge jeunesse. Mais on le découvre toujours plus comme un poisson dans l’eau, qui monte qui monte, quand il s’agit de tisser des liens (pacifiques ou hostiles) entre les humains et les animaux. Il y a le très divertissant Tête de pioche, puis les engagés Lettres des animaux à ceux qui les prennent pour des bêtes (avec Brrémaud, adaptant Allain Bougrain-Dubourg) et désormais Climat. Le deuxième acte d’une épopée réaliste, glaçante ou accablante, mais pas résignée, entamée avec Migrant, et menée avec les scénaristes Eoin Colfer et Andrew Donkin. D’un bout à l’autre du monde, les détresses se répondent. Avec les ressources qu’on peut trouver avec l’énergie du désespoir.

Résumé des éditions Robinson : Yuki vit dans un canton inuit de plus en plus déserté en Nouvelle-Écosse. Sami, lui, vit dans un village de pêcheurs sur la baie du Bengale. Deux jeunes de continents différents dont les vies vont complètement changer suite à l’arrivée d’un cyclone. A la fin, les deux fils de l’histoire se tissent avec un héros sauvant de manière inattendue la vie de l’autre.

D’un côté, l’Arctique, ses grolaires et sa glace qui fond; de l’autre, les îles où cyclones et mer gagnent toujours plus de terrain sur les humains, vulnérables. Sami en sait quelque chose, l’eau lui a pris sa famille, ne lui laissant qu’un grand-père philosophe malgré l’inquiétude d’un nouveau cataclysme ou, même, de ne plus trouver poisson pour se nourrir. Yuki, elle, voit son village de plus en plus être déserté. Mais être seul ne lui fait pas peur puisque soucieuse de préserver son milieu, du haut de ses trois pommes, elle cherche la piste des ours, emblématiques animaux qui pourraient changer la donne.

Courts chapitres et destins héroïques à leur petit niveau sont portés par l’envoûtant pouvoir de Giovanni Rigano, donc. Mais aussi une écriture très complémentaire, qui laisse sa place au dessin et l’enrichit, trouve la justesse et le rythme de l’histoire, y compris pour y amener supplément de suspense et d’émotion (quand l’image se brouille). Mais oui, Rigano propose une mise en images, en séquences, redoutable, variant les ambiances du tout au tout mais captant bien l’odeur d’une fin de monde. Celle de celui de ses héros qui ne sont pas vraiment les premiers contributeurs du réchauffement climatique. Non, eux, ils récupèrent, ils survivent, ils se débrouillent. Et dans ces deux décors, paradoxaux et pourtant deux facettes de la même pièce, puisque si la glace fond, c’est normal que l’eau monte, le trio d’auteurs trouve une longueur d’onde, intime et ténue, entre les deux protagonistes. Chacun vit son histoire, risque sa vie, avec des moments de stress et de contemplation, malgré l’effondrement qui guette, mais il y a une connexion et peut-être une voie pour un troisième opus.

Waow et brrrr, à la fois. En tout cas, ça m’a donné envie de découvrir le premier acte.

À lire chez Robinson.















