Interview fleuve d’Amazing Améziane #3 : « Le devoir de mémoire, pouvoir faire des livres de vulgarisation historique, c’est l’une des choses que j’aime le plus dans la BD moderne »

Héhé, il est un auteur francophone (mais pas que franco-belge) que nous adorons mais dont le rythme de mitraillette nous a empêché de chroniquer une salve de ces derniers albums (Quentin par Tarantino, Martin Scorsese, sa version de 1984, Nazi Killers, D’onyx et de bronze, exclusivement aux Éditions du Rocher, ces dernières années). Cet auteur, c’est Amazing Améziane. Et comme on sait qu’il n’a pas sa langue en poche, qu’il est franc, qu’il possède un talent monstrueux, divers styles confondus, et qu’en plus il fête ses 20 ans (et un peu plus) de BD dans une méga-exposition (600m2 d’expo sur 5 salles) au Château de Ladoucette, à Drancy (93), qui était accessible jusqu’au 2 avril; je me suis laissé aller à lui envoyer une série de questions marquant le coup et tous les pavés qu’il a publiés ces derniers mois. L’occasion pour cet Action Man brut de décoffrage mais ne manquant ni de culture ni de profondeur de se livrer sur ses premières années, ses premiers métiers, et d’ouvrir son coffre à trésor. Dans une interview en plusieurs parties. Action ! Cette fois, place à D’onyx et de bronze: histoire des zoos humains et 1984, deux romans graphiques engagés réalisés avec Sibylle Titeux de la Croix.

Précédemment | Interview fleuve d’Amazing Améziane #1 : « Je me suis fait passer pour un agent d’illustrateurs avec 3 clients, quand ils voulaient 2 illustrateurs, je faisais le double du taf »

Précédemment | Interview fleuve d’Amazing Améziane #2 : « L’art ce n’est pas la concurrence, pas un bilan comptable ou la Star Ac, c’est être unique, créer des émotions »

Évoquons maintenant votre album, recueil d’histoires plus ou moins courtes, D’onyx et de bronze. Vous n’oeuvrez pas en solo, ici, mais avec Sybille Titeux De La Croix. Qu’est-ce qui fait que vous vous retrouvez sur un projet ? Qui fait/amène quoi ?

Je bosse avec Sybille sur des sujets ou dans un style d’écriture différent du mien. Sybille écrit son texte et je n’ai pas le droit d’y toucher. Elle sait que je vais tout faire rentrer dans le livre, même si je dois rajouter des dizaines de pages. J’adapte son texte en narration visuelle et je l’illustre. Elle n’a pas le droit de changer quoique ce soit.

Même si quand elle me demande de bouger un truc, je le fais quand même. J’ai découvert qu’elle a tout le temps raison. Elle a fait les Arts Déco donc elle sait parfaitement dessiner.

© Amazing Améziane aux Éditions du Rocher

Avec D’onyx et de Bronze, ce n’est pas dans un musée ou un zoo que nous sommes mais à l’air libre, sans grille, aux origines. Quand l’homme auquel le rapport de force est favorable peut choisir de faire le bien ou le pire. Vous avez jeté votre dévolu sur quatre histoires courtes. Qui sont autant d’exercices de style ?

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

Ces 5 histoires courtes sont liées d’une façon ou d’une autre.

Je voulais 5 styles pour qu’on se rende bien compte de leur différentes ambiances.

1- L’histoire de l’explorateur devait être colorée car la lumière d’Afrique est fabuleuse.

2- L’histoire de SCYLLA sur l’esclavage et le cirque de Freaks est sur 2 périodes 1857 et 1920, donc 2 couleurs.

3- L’histoire de Céline et de KALINAS avait une particularité spécifique (pas de spoiler) et je n’avais qu’une seule façon de dessiner cela.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

4- Le chapitre des Jumelles devait montrer la cruauté et l’hypersexualisation des danseuses issues de l’immigration en 1900, et cela sans tomber dans le voyeurisme,, donc beaucoup de silhouettes pour garder la férocité du texte sans se retrouver à avoir un livre de Manara. Je ne dessine pas aussi bien que lui de tout façon.

Le dernier chapitre sur les nazis, en noir & blanc.

Exercice de style mais rien n’est gratuit, votre graphisme doit se conjuguer au mieux et avec force à ce que vous voulez raconter, revendiquer et dénoncer ?

Le livre parle aussi de l’image de la femme et donc il faut montrer pour dénoncer. Dans SCYLLA, Sybille a voulu qu’on y ajoute ce masque horrible qu’on mettait aux femmes trop turbulentes.

Un masque qui cachait le visage et il y avait une langue de fer qui allait dans la bouche, pour qu’elles la ferment. Et si ce n’était pas déjà le top de l’horreur, les gars avaient rajouté des oreilles de chiens ou d’ânes et un nez de cochon. j’étais assez choqué quand elle me l’a dit, et encore plus quand j’ai dû trouver des photos de cette saleté pour la dessiner.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher 

Vous commencez par le commencement. Un voyage en bateau, au temps des pré-colonies, des découvreurs qui se muent en trafiquants d’êtres humains. Tout est noir, jusqu’au bord des cases. C’est impactant ? Pourquoi ce choix ?

Je cherchais un moyen de différencier les chapitres et cela me donnait un meilleur contraste vu que ce sont les seules pages avec beaucoup de couleurs.

Autre subtilité, (quasiment) pas de phylactères, juste une voix off, celle du héros qui part naïf et revient en ne valant pas mieux que les autres. Certains essayent de gommer les récitatifs, vous vous en faites toute une histoire. Avec finalement des illustrations commentées mises en séquence ?

L’histoire est en fait une longue lettre où Kyle raconte son voyage à sa dulcinée. Chaque histoire a un style d’écriture différent donc un style visuel qui lui est propre.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

Et tout commence par une légende, la recherche d’hommes-singes, avec une queue. Forcément, ça n’existe pas. Est-ce que la fascination déçue engendre encore plus de cruauté ?

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

Les Niams-Niams n’ont pas existé, bien sûr, mais leur recherche a bel et bien eu lieu. Ne les trouvant pas, l’explorateur a ramené des esclaves… histoire de ne pas rentrer les mains vides. Ah, l’homme blanc en 1857… en Afrique. Pas de souci cela sera encore pire après.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

 Ensuite, c’est le cirque. À l’heure où des associations se battent pour le bien-être animal, on n’imagine pas qu’il y a un peu plus de cent ans, dans les cages, il y avait des humains, qu’on disait freaks… Avec encore des discours et des publicités complètement innommables !

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

Dans SCYLLA, c’est un cirque à la Barnum, avec des Freaks. Ce qui est fascinant, c’est que beaucoup de ces monstres de foires, sont devenus très riches et ont assez bien vécus finalement leur exclusion de la société, en recréant une autre plus ouverte. SCYLLA, par contre, se voit refuser l’humanité qui est pourtant largement offerte aux autres freaks du cirque. Cela nous ramène à la question: qu’est-ce qui fait de nous des hommes ou des femmes ?

Si les freaks sont des anomalies, les esclaves traités encore plus mal qu’eux, que sont-ils ?

Le propriétaire du cirque agit comme un seigneur, décidant qui est libre et qui ne l’est pas, qui vit ou qui meurt.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

Au fond, ce sont des histoires vraies que vous nous racontez là ? Ah non, la suivante est fantastique ! Et elle se découpe uniquement en ombres. On ne voit pas les yeux, les détails du visage, juste les bouches. Là encore, il y a un défi en termes de lisibilité ?

Oui, cela a été assez dur à faire. Pour moi, le visage est primordial. Et ici, je n’en ai pas un seul à dessiner. Pire que cela, tous les personnages sont en silhouettes noires et les Kalinas sont bruns. Tous les volumes sont aplatis. Mais je me suis amusé à faire ça.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher
© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

Avec cette expérience, j’ai pu résoudre mon problème pour le chapitre 4 sur les jumelles africaines qui dansent à Paris. j’étais devenu assez balèze en silhouette. J’ai utilisé d’immenses silhouettes blanches qui créaient des mise en pages assez intéressantes.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

 Et plus que jamais je pense au cinéma de Michel Ocelot. Il y a de ça ?

Pas vraiment, l’idée d’aplatir les volumes et d’avoir des silhouettes provient plutôt des théâtres de marionnettes de papier, tout cela est vieux de plusieurs siècles. Ocelot a modernisé cela, moi, je suis resté sur la version old school des films expressionnistes muets des années 1910/1920.

Finalement, tout le monde en ombres, ça ne permet pas vraiment de faire la distinction entre blancs, noirs, jaunes… C’est entré dans le processus ?

Si, si, j’ai fait la différence entre les Français en noir (j’ai inversé le cliché de la pureté de l’occidental) et les KALINAS avaient une couleur plus proche de leur couleur de peau. Cela m’a permis de faciliter la lecture des images.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

 Et là s’illustre le rapport entre les Noirs qui se sont occidentalisés et ceux qui sont toujours considérés comme des animaux sauvages ? Notre monde corrompt, au point de diviser les minorités, les individus qui devraient faire cause commune ?

Le chapitre 3 sur les KALINAS, est le seul sur les zoos humains présentés comme tel. Il y en avait un juste sous la Tour Eiffel et un autre au Jardin d’Acclimatation. Le visuel de l’expo des KALINAS n’est pas une invention, cette expo a bien eu lieu au Jardin D’Acclimatation.

D’ailleurs, dans votre épilogue, c’est une affaire entre blancs qui se joue avec la volksgemeinschaft. C’est une manière de nous faire réfléchir aux échelles de valeurs et de proximité sur lesquelles se classent, même inconsciemment certains combats, certaines horreurs ? Sur la manière dont nous continuons de commémorer les deux guerres mondiales, sans penser à tout le mal que nos ancêtres ont fait à ce qu’ils appelaient d’autres races ?

Qui de mieux que les nazis pour finir un livre sur le racisme ? Sybille a fait de grosses recherches juste pour écrire ces 10 pages. Le devoir de mémoire, le fait que nous puissions faire des livres de vulgarisation historique est l’une des choses que j’aime le plus à notre époque moderne de production de BD.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

1984, sous le visage de Staline!

Parlons maintenant, si vous le voulez bien de 1984, autre album paru aux Éditions du Rocher. Toujours avec Sybille Titeux-De La Croix, vous avez signé l’un des cinq albums adaptés du roman majeur d’Orwell et parus entre novembre 2020 et mai 2021. Un sacré tir groupé, à l’époque, qui s’explique par le fait que ce livre soit tombé dans le domaine public, c’est ça ?

Yep.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

 Au moment où vous planchiez là-dessus, vous saviez que d’auteurs auteurs de leur côté, chez d’autres éditeurs, y travaillaient aussi ?

On se doutait en effet.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

 Vous avez lu les adaptations de vos collègues ?

Non.

« Il faut de tout pour faire un monde. » Arnold & Willy.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

 Comment avez-vous abordé cette montagne ?

Je voulais faire un livre rétrofuturiste. Si dans cette uchronie, nous étions en 1984, alors une sorte de seconde guerre mondiale avait éclaté et elle avait duré pendant 40 ans. Imaginez une BLITZKRIEG de 40 ans. Londres bombardée pendant 40 ans. La ville est à moitié en ruines. L’État tout puissant, tout est pensé pour l’effort de guerre mais plus rien ne fonctionne.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

La créativité a été tuée.

Plus personne n’invente rien.

Tout vient à manquer.

Voilà ce que je voulais montrer.

Pour nous, 1984 n’est pas une histoire d’amour. C’est un livre politique avec une histoire d’amour à l’intérieur. Mais finalement sur les 3 parties, juste la seconde est axée sur la relation entre Winston et Julia.

Dès la couverture, le parti pris iconographique claque : c’est Staline le Big Brother. Pourquoi ?

Je voulais avoir un vrai poster de BIG BROTHER. J’ai une formation d’affichiste, donc je savais que je pouvais produire cette image forte que l’on verrait durant tout le livre. J’ai regardé TOUTES les couvertures de livres de 1984. Tous les pays. Et j’ai pris une semaine complète pour produire mon image.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

Orwell avait fait partie des brigades internationales en 1936 en Espagne. Le POUM avait été trahi par Staline. (Voir LAND AND FREEDOM de KEN LOACH). Il avait travaillé au ministère de la Guerre, donc il avait des infos sur Hitler et Staline que le grand public ignorait pendant les années de conflit. ET il détestait Staline.

En page 001 du roman, il y a une description de BIG BROTHER. 45 ans, moustache, un regard pénétrant. Pour moi, ça ne ressemblait pas au poster qu’on connaît du film de 1984 (produit en 1955) car il n’y a pas de moustache. ET après il fallait choisir sa moustache de dictateur.

C’est un peu comme jouer à « QUI-EST-CE? »

J’ai choisi un mélange de plusieurs éléments, mais tout le monde ne voit que Staline.

Pour moi, cela n’est pas hors sujet, donc je ne dis rien.

© Améziane
© Améziane
© Améziane
© Améziane
© Améziane
© Améziane
© Améziane

Il y a eu différentes propositions de couverture ?

 Il n’y a à chaque fois que 2 propositions et les 2 finissent généralement sur la couverture ou sur la 4e de couverture, le but est de savoir laquelle sera devant, laquelle derrière.  Et si aucune n’est retenue, je la garde pour le ARTBOOK. Donc rien ne se perd.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

Et les héros, Winston et Julia, comment leur avez-vous donné un corps et un visage ? Fidèles à ce que vous en aviez imaginé la première fois que vous avez lu 1984 ?

Winston et Julia sont décrits dans le livre, donc je suis cela. Winston est maigre et blond. Julia brune au cheveux courts. J’ai récupéré les combinaisons des Anglais et des Anglaises durant la seconde guerre… le bleu de travail, j’ai juste rajouté le tissu rouge autour de la taille de Julia. O’Brien et la classe supérieure sont en noir. Les policiers ont des casques censé faire peur. Mais rien n’est propre, tout est cassé, rongé, sale, les mecs sont mal rasés, les femmes ont presque toutes la même coupe de cheveux.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

Big Brother, les gens s’en saisissent toujours plus par les temps qui courent, parfois à tort et à travers ? Qu’en retirez-vous ?

Orwell aurait adoré notre époque. Cela lui aurait donné de nombreuses idées pour ses romans.

La technologie est partie en sucette. Les caméras intelligentes reliées à des banques de données. En Chine, les citoyens ont un capital de points et vous pouvez en perdre si nous ne traversez pas comme il faut ou si vous critiquez le gouvernement. Mais ça sent la fin de l’empire, ça… Ces caméras avec AI seront d’ailleurs présentes sur les lieux des JO de Paris 2024, c’est pas beau la vie… Tout le monde se marrait quand Christophe Castaner (ancien ministre de l’Intérieur français désormais Président du groupe LREM à l’Assemblée nationale) allait faire le Tintin en Chine, maintenant on sait ce qu’il a ramené dans ses valoches. Donc souriez, vous êtes surveillés.

1984 est un livre revendiqué par la gauche et la droite. Manque de bol, Orwell était un communiste, il était volontaire pour lutter contre le fascisme en Espagne en 1936, il détestait Franco, Mussolini, Staline et Hitler.

Désolé, c’est un livre de gauche. C’est même un gros livre d’anarchiste qui critique le pouvoir sous toutes ses formes. Le peuple verra 1984 comme une satire, le pouvoir en place verra cela comme un mode d’emploi…

Ce genre de livre est dur, âpre, comment s’y prend-on alors pour attirer le lecteur, lui donner envie de se lancer dans la lecture ? D’ailleurs, finalement, la violence psychologique n’est-elle pas plus forte que la violence physique ? Comment avez-vous envisagé les scènes de torture ?

Le roman est assez connu pour donner envie aux lecteurs de tenter l’aventure d’une adaptation visuelle. Je ne me fais pas de soucis là-dessus. Nous avons fait une adaptation solide, fidèle au livre.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

La violence du livre est très peu physique. La scène de torture fait quasiment tout le chapitre 3. J’ai bien préparé tous mes éléments pour ce long chapitre et je l’ai fait assez rapidement pour garder une sorte d’immédiateté. De brutalité. Cela ne devait pas être trop joli. J’ai d’ailleurs retiré la couleur de ces pages. Pour bien marquer une rupture.

Chez moi, la mise en couleur est émotionnelle, pas du coloriage. J’y ai même inséré ma seule et unique création, un visage géant de O’BRIEN à la façon de BIG BROTHER avec, écrit en dessous, O’BRIEN IS WATCHING YOU. Au moment où Winston se pose la question si O’Brien pourrait bien être Big Brother, finalement… 

Les deux minutes de la haine, ça pourrait être quoi à notre époque ?

Je ne sais pas, ça dure combien l’émission de cet âne d’Hanouna ?

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

Je me fais l’avocat du diable. En travaillant dans la publicité, vous avez fait quelque part de la propagande, non ? Elle est où la propagande, aujourd’hui ?

Partout.

Je me souviens d’une époque où on avait Libé pour la gauche. Le Figaro à droite et si on voulait avoir des infos fiables, on lisait Le Monde. Après le jeu des chaises musicales et des rachats de médias par les milliardaires, on n’a plus que des propagandistes de tous les côtés.

Et Mediapart qui fait des scoops, et donne des infos fiables (zéro procès perdu). Mediapart qui, comme par hasard, est l’équipe qui s’est barrée du journal Le Monde, de la bonne période. Rien ne se perd, tout se transforme.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

Tu as aussi  des influenceurs bidons qui veulent te vendre des merdes sponsorisées. Tu ne peux plus mater une vidéos sur youtube sans avoir une pub à la con, même avec un adblocker. Sans compter les connards qui font de la pub pour des sites fakes qui sont des arnaques. P’tain, fais chier, il avait l’air super cool ce blouson AKIRA à 50 balles. ET c’est une arnaque. Je suis vert.

Ou toutes ces meufs à grosse poitrine en mini bikini qui sont grave fans de comics, avec des comptes avec 7 photos sur la plage et 0 follower. Elle veulent toutes me suivre sur Tumblr ou Twitter C’est dingue le nombre de bonasses qui kiffent la bayday.

Franchement j’aurais jamais cru, je devrais peut-être aller dédicacer plus souvent à la plage. Ou en Russie…

Il y a un vrai travail sur les affiches, les slogans, présents dans cet album, d’ailleurs ?

C’est parce que j’en suis capable et que je fais ça depuis toujours dans mes livres. Il était normal de jouer avec ce concept de poster de propagande des années 30/40 si tu adaptes 1984. C’est presque la partie la plus fun à faire.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

 Les couleurs sont très légères, la majeure partie de l’album se passe en noir et blanc. Comment avez-vous géré les couleurs ?

Je travaille tout le livre en Noir& Blanc & Gris. Toutes les images sont donc calibrées et contrastées.

Ensuite je rajoute une ou plusieurs couleurs en fonction des effets désirés. Je cherche à créer une réaction, un sentiment. Je préfère les couleurs chaudes mais je me suis forcé à utiliser du bleu ici, car il n’y a aucune chaleur dans 1984.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

En noir et blanc, à tel point, que vous mettez des séquences, quasiment surréalistes, dans lesquelles les personnages deviennent des ombres, quelque chose de marionnettes même ?

Je ne voulais pas censurer les scènes d’amour, mais je ne voulais pas non plus avoir de pages entières de nus. Je ne voulais pas jouer à l’hypocrite et faire des ombres « Marvel ».

Je voulais que le livre reste accessible aux plus jeunes et donc ne pas créer un élément qui oblige à une censure. Du coup, j’ai géré cela graphiquement. Tout est là si on sait regarder. Leur passion est évidente, pas besoin de voir la teub de Winston ou les nichons de Julia. On reste sur une idée de leur amour et nous les laissons vivre cela ensemble, ce qui nous importe est en premier le récit politique.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

Cet album, c’est férocement de la BD, mais on sent le livre derrière. Il y a, souvent, placés aux extrémités des pages, des pavés reprenant des descriptions, des actions même. Vous ne laissez pas le dessin tout représenter, vous laisser de la liberté au texte, qui cogne. Comment se font ces choix ?

C’est Sybille qui a adapté le texte. Elle a créé le menu d’après les recette du chef étoilé, j’ai juste dressé les assiettes et servi les plats.

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

En fait, j’ai limite l’impression que toutes ces histoires pourraient faire des dessins animés ?

Je suis à l’écoute de toutes les propositions.

VALSE AVEC BACHIR a prouvé que même les histoires sérieuses peuvent faire de bons films d’animation moderne. Si l’un de mes livres devait être un jour adapté en film, je préférais qu’il le soit en animation. Mais comme je ne pourrais pas le réaliser, je perds pas trop de temps avec ça. J’ai des livres à faire. Dans les livres, je peux faire ce que je veux à 100%.

Les techniques d’animation ont beaucoup inspiré ma façon d’organiser mon travail, La séparation des persos et des décors, le montage, les couleurs et les cadrages. Jusqu’à la structure des histoires.

Franchement un film d’animation de BIG BLACK – STAND AT ATTICA, ça serait de la tuerie. Le public serait retourné par l’histoire et il y aurait encore mes visuels pour accentuer le choc. Ahhh… c’est beau de rêver. Mais c’est marrant, c’est pas la première fois qu’on m’en parle.

À bien vite pour la suite, Amé! 

© Titeux de la Croix/Améziane aux Éditions du Rocher

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