
La reine est morte, vive la reine. Mais qui pourra dire de quoi l’avenir sera fait. Dans un monde futuriste qui a brexité – Michael Moorcock l’avait déjà pressenti dans les années 70 – et est entré dans le tragique millénaire, une nouvelle guerre mondiale, sans partage, a explosé quand la perfide Albion, ou plutôt l’Empire Ténébreux s’est ouvert l’appétit en voulant conquérir le monde, et d’abord l’Europe. En la mettant à feu et à sang pour la soumettre. Avec maestria, Jérôme Le Gris, Benoît Dellac et Didier Poli adaptent le best-seller de fantasy de Michael Moorcock. Plus que jamais d’actualité ?

Résumé de l’éditeur du tome 1 d’Hawkmoon : Les Granbretons… ce nom résonne depuis des décennies dans tous les territoires d’une Europe dévastée. Après la chute des derniers grands Etats, le Roi-Empereur dégénéré et ses armées exercent une domination sans partage sur le Vieux Continent. Si le Ténébreux Empire continue d’étendre son pouvoir dans ce monde post-apocalyptique, bientôt nul ne pourra guider les nations de l’Europe vers la liberté. Même la puissante cité de Köln, dernier bastion de la résistance, vient de céder sous les coups de l’ennemi. Son seigneur, le duc Dorian Hawkmoon, victime d’une infâme manipulation technologique dans les noires prisons de Londra pourra-t-il continuer le combat dans l’ombre ? L’unique espoir réside désormais dans le royaume isolé de Kamarg, dirigé par le légendaire comte Airain…

Tout d’abord, une confession, je n’ai jamais lu Michael Moorcock autrement que par les adaptations qui en ont été faites, par la BD notamment. Je pensais, il y a quelques années, que les aventures de fantasy guerrières n’étaient pas mon truc, force est de constater que la BD me prouve souvent le contraire. Avec, peut-être, comme sommet de ces dernières années ce Hawkmoon dégainé par une team d’enfer: Jérôme Le Gris, Benoît Dellac, Didier Poli et Bruno Tatti (assisté de Angélina Rodrigues pour les couleurs).


C’est ainsi que nous nous retrouvons dans un futur assez éloigné que pour que le nom de pas mal de villes et régions du vieux continent ait orthographiquement muté. Parye, Londra, Kamarg… c’est assez amusant et didactique que ces données aient été prises en compte. Parce que c’est vrai, au fil des siècles, notre langage, même gravé dans le marbre, se modifie, évolue ou régresse (je laisse ça à votre libre appréciation). Les frontières, elles, semblaient ne pas avoir sensiblement bougé, jusqu’à ce que le baron Meriardus, aux ordres d’un empereur phoetus machiavélique, et ses sbires ne passent à l’offensive. Le flegme devant flamme. Et la conquête avançant à vitesse grand V. Jusqu’à Köln, détruite, et où le baron Hawkmoon, notre héros, est fait prisonnier par une ruse prouvant la perfidie de l’ennemi. La tendance et les rapports de forces du début des deux dernières guerres mondiales semblent bien s’être inversés. La peur et la tyrannie ont changé de camp.

Dans ce tome 1 d’Hawkmoon, le lecteur se retrouve directement pris dans le vif du sujet. La guerre a commencé depuis belle lurette, pour des intérêts que nous n’avons pas forcément besoin de savoir maintenant, et c’est dans l’enfer des combats, mêlant poudres et techniques moyen-âgeuses, que nous nous engageons. Avec quelques héros à suivre, comme le comte Airain et Dorian Hawkmoon, vite fait prisonnier donc mais bientôt relâché car serti d’une pierre noire maléfique qui ne va pas contrôler sa pensée, le lobotomiser, mais va le mettre en sursis. Surveillé en permanence, le duc recevra une décharge, pouvant être mortelle, s’il n’exécute pas les ordres de l’envahisseur. La pire des punitions puisqu’il garde sa liberté de penser, d’être révolté, tout en étant jusqu’ici dans l’impossibilité de les mettre en oeuvre.

Science-fiction et fantasy, passé et futur (sans être steampunk!), horreur réelle et cauchemars irréels, dans ce Joyau Noir, première partie d’une quadriptyque, les auteurs sont en forme, le rythme est soutenu et explosif, dans le décor en ruine ou dans les relations (in)humaines. Avec en plus une accroche psychologique redoutable. Avec Benoit Dellac et Didier Poli à la mise en images, c’est la classe cinglante et sans échappatoire. On se retrouve absorbé, passionné. Impressionné.


À lire chez Glénat.