
Alors que tous les fans de près ou de loin du petit pantin de bois au nez extensible à l’infini (créé par Carlo Collodi) ont les yeux braqués sur la nouvelle adaptation en animation du Mexicain Guillermo del Toro, qui est prévue pour Noël sur Netflix, l’Argentin Lucas Varela donne une seconde vie à son Pinocchio. Paolo de son vrai prénom, dont il avait déjà conté les aventures dans un album éponyme paru il y a tout juste 10 ans. Finie l’innocence et le moule Disney, le petit bonhomme a grandi et évolue désormais entre les vivants et les ombres, humains et créatures, tout en sachant que ses démons sont souvent les plus forts.

Résumé de l’éditeur : Comme dans un comic de super-héros, Paolo Pinocchio virevolte d’aventure en aventure, alternant facéties et tragédies, chassant là un diamant (évidemment magique) dans la Venise de la Renaissance, croisant ici une révolte de poissons désireux de se venger de leur créateur. Au cœur de ce maelstrom, se trouve un talisman, objet de toutes les convoitises… le nez de Paolo ! Le récit n’en finit pas d’ouvrir ses tiroirs, d’aligner les mondes parallèles et de nous entraîner dans une chute vertigineuse… aux sources du mensonge primordial, celui qui est à l’origine de toute création.



Rien que le résumé fait halluciner comme la couverture d’ailleurs qui se fait la parfaite synthèse du monde idéalisé et pourtant démoniaque de Venise. Lucas Varela, je l’adore depuis que je l’ai découvert il y a quelques années, convoque ici les forces surnaturelles les plus légendaires. Celles qu’on trouve dans l’Ancien Testament, la mythologie, la Divine comédie, le tarot. Sans oublier quelques super-pouvoirs. Univers partagés, vous ne croyez pas si bien dire puisqu’entre cette Italie hantée et d’autres mondes machiavélique, celui qu’on nous présente comme un Don Juan bientôt rattrapé par d’autres vices, arrive aussi dans notre monde, à un moment de sa chute dantesque.


Dans cette spirale infernale, Pinocchio ne devra bientôt compter que sur lui-même, quand ses pauvres alliés auront rendu les armes, leur âme, sacrifié pour un héros en bois, peut-être même en carton, car pas sûr que Paolo en ait valu la peine. De jeu de dames en jeu de dupes, ce Pinocchio-là, vérolé par Varela, explore des enfers bien à lui, multiples, cherchant à échapper à un démon auquel on n’échappe pas. Qu’il faut affronter. Conjuguant l’horreur des temps anciens et celle moderne, Lucas Varela signe là une plongée démente et intense dans une autre histoire de Pinocchio, avec du nez et une vraie raison qui fait fi des références attendues pour donner voix à d’autres, absolues.


Le plus grand défi? Faire aimer un personnage qui a bien changé, qui n’a pas évolué pour un mieux mais a finalement quelque chose de plus humains que les autres, dans son incapacité à être bon ou mauvais, dans cette facilité à être lui-même sans compromis malgré les hordes diaboliques à ses trousses. De quoi donner un spectacle en ligne claire ébouriffant et terriblement inspiré. Dantesque et vertigineux.
À découvrir chez Tanibis.