
Des couleurs pour adoucir la vie, la guérir aussi. Avec L’enfant au pinceau, l’auteur français installé en Chine, Jonathan Sauvé, réussit une oeuvre jeunesse illustrée folle et somme. Avec des bâtons dans les roues mais aussi des pinceaux pour faire tomber les verrous.
Résumé de l’éditeur : Dans un village, un petit garçon nait avec un pinceau à la place de la main gauche. De cette différence il fera un instrument de libération et transformera la vie des habitants. L’enfant au pinceau, c’est d’abord l’histoire d’une naissance, qui se fait longtemps désirer et qui a besoin d’amour pour se réaliser pleinement. C’est ensuite l’histoire d’un petit garçon né avec un pinceau à la place de la main gauche qui changera la vie des habitants de son village. Ce livre est une histoire sur la différence.

C’est étrange comme les opposés s’attirent parfois ? Ainsi, c’est dans un monde de végétaux tout en couleurs que vivent d’étranges petits hommes et femmes, vêtus de la tête aux pieds en blanc. Et avec un long tarin qui dépasse. Pas besoin d’équipements superficiels, ici, c’est en accord avec l’univers que la vie s’écoule paisiblement et poétiquement, à grands bonds heureux et avec ses traditions. Comme cette plantation d’une petite graine par l’aspirant papa dans la forêt des arbres à enfants. Ce qui n’est pas toujours garantie de succès et oblige parfois à suivre ses propres aspirations, à vivre son amour différemment pour exaucer son vœu le plus cher, la chair de sa chair.

De manière très touchante, Jonathan Sauvé réinvente la légende des bébés qui peut s’avouer être un parcours du combattant. Avant et après le premier cri. Car quand l’enfant vient, forcément, il est différent de tous les autres. Mais, parfois, cette différence est plus marquée et a vite fait de devenir pour les autres un motif, facile et bête, de rejet. Et le pinceau qui remplace la main de notre enfant, formidable super-pouvoir, devient une malédiction qui conduit son propriétaire à se mettre à l’ombre de son monde, à faire ses explorations et expériences. À découvrir un monde où la couleur a cédé sa place au noir et blanc et où vivent des personnages en rouge.
Au rythme de deux cases, parfois une, par page, et de quelques lignes de textes, Jonathan Sauvé profite de l’espace conféré par ces 56 pages pour engager tout son art et sa symbolique, sa poésie et sa force de conviction, dans un voyage sensoriel et émotionnel. C’est beau et c’est fort, ça traverse quelques épisodes de la vie en donnant espoir, confiance et l’envie de se dépasser, au-delà des préjugés et des hostilités. Il y a un monde commun à construire. C’est ainsi que l’auteur traverse avec douceur et sourire, insouciance, des thématiques comme la difficulté pour certains à concevoir un enfant, le harcèlement du « bien paraître » et d’être dans les normes mais aussi la nécessité de donner de l’espoir et de l’utilité derrière mais aussi devant les barreaux. Dans un monde qui peut faire penser tantôt à Ponti ou à Peyo, tout en faisant exploser tout le talent et le dosage de Jonathan Sauvé, il y a là, surtout, la nécessité de laisser parler et porter les arts, les images, les couleurs qui rendent le monde bienveillant et bâtissent des ponts entre les peuples. Parce que la multiculturalité, malgré ce qu’on entend aux informations, ne peut être qu’enrichissante. On en pince pour l’enfant au pinceau. Sacrément!

Porté par des fabuleux personnages, dont l’artiste a fait des mascottes bien au-delà de ce livre (allez jeter un oeil à sa page Facebook, par exemple), notamment dans des hommages à quelques grands peintres.
Titre : L’enfant au pinceau
Livre illustré
Auteur : Jonathan Sauvé
Genre : Initiatique, Jeunesse
Éditeur : Éditions Carnets de sel
Nbre de pages : 56
Prix : 16,90€
Date de sortie : le 02/03/2022