Le coup de la panne, c’est un bon plan. Mais quand on est tout seul, ça craint! Se servant de son expérience de résidence dans la commune de Chamiers, Pierre Maurel revisite très librement le film Passe-Montagne de Jean-François Stévenin et fait découvrir un petit endroit entre enfer et paradis dont la visite ne nous serait jamais venue à l’esprit sans un petit coup de pouce du destin.
Résumé de l’éditeur : Georges, commercial sillonnant la France, tombe en panne de voiture. Derrière des feuillages, apparaît le nom d’une petite commune de Dordogne, où il va échouer pendant trois longs jours, le temps que sa tire soit remise d’aplomb. L’occasion pour lui de découvrir Chamiers, petite bourgade à l’apparence morne, avec son pmu, ses barres d’immeubles où il va séjourner, ses jardins ouvriers nourris au jus pas très bio d’une usine de produits chimiques…

Aïe aïe aïe aïe. On ne le connaît trop bien que ce bruit mécanique et désagréable avant-coureur de la panne irrémédiable. Commercial loin de sa base, Georges revient d’une mission qui a porté plus de fruits que prévu, il a assuré et il n’a qu’une hâte: aller fêter ça au volant de sa Formule 1… euh, en fait non, Bertille ne dépassait pas les 105 km/h et voilà qu’elle a décidé de ne plus avancer du tout. Georges est au milieu de nulle part. Enfin à Chamounieix s’il en croit le panneau qu’il vient de dégager de la végétation invasive.


Bon, heureusement, dans ce bled, il y a tout de même un garagiste qui a vite fait de prononcer sa peine : trois jours. Sans bagage, sans hôtel, et avec de la friture sur la ligne avec sa femme. Chouette alors. Dans ce bled de la France profonde, Georges n’a aucun repère et la faune locale lui semble zarbie, pour ne pas dire hostile. L’homme de passage et ceux qui ont élu domicile aussi ne sont pas du même monde. Mais comme le garagiste a le coeur sur la main malgré l’huile sur ses doigts, Georges n’est pas si mal reçu, il hérite d’une chambre provisoire et d’un t-shirt Alf… et de contacts avec les Chamounieixois qui se révèlent (une fois zappé le rasta qui convoie ses bières sur un vélo d’enfant, le mouton déboussolé mais qui mange de la pizza et le pilier de comptoir qui a cru voir Raël) finalement très sympathiques.

Il faut dire qu’au vu du bâtiment infernal qui leur pourrit la vie et la vue, ils ont dû se serrer les coudes, ceux qui sont restés. Et se boucher le nez. Parce qu’elle pue cette entreprise Shokoblack…

Au-delà des apparences, de cet enfer imposé, Georges tire finalement trois jours de vacances, de retraite au contact de la nature qui tente de survivre et de l’originalité de ses hôtes. Rien ne se passe comme prévu et ces gens dont il a pris d’ores et déjà le pli de se méfier vont se révéler. Ils n’ont pas grand-chose mais tant à donner, à fêter. Convaincu qu’il aurait pu finir en Wicker Man, Georges se révèle, lui aussi, chanceux de s’être arrêté, un peu forcé, dans le trou du cul du monde. Concevant son album dans une fausse ambiance de polar, avec un mystère à éclaircir, Pierre Maurel a directement transféré la réalité de ses allers-retours en résidence d’artistes à Chamiers, grâce à la Compagnie Ouïe/Dire, dans une fiction généreuse et qui fait du bien.

Titre : Passe-Misère
Récit complet
Librement adapté de Passe-Montagne de Jean-François Stévenin
Scénario, dessin et couleurs : Pierre Maurel
Genre : Chronique Sociale
Éditeur : Ouïe/Dire, Les Requins Marteaux
Collection : Transhumance
Nbre de pages : 48
Prix : 13€
Date de sortie : le 22/10/2020