Cette année, décidément, les départs en voyages auront décidément été houleux, angoissés. Mais imaginons que tout se soit bien passé, que 2020 nous offre une dernière chance de nous évader le coeur léger, sans penser à autre chose qu’au but ou justement au plaisir de rouler, de partir en cavale sur les routes des vacances. Charlotte Bellière et Ian De Haes profitent de chaque instant dans la nuit suspendue, et nous emmènent. Rhéa Dufresne et Marion Arbona ne sont pas en reste.
Résumé de l’éditeur : Cette nuit, toute la famille part en vacances dans un pays étranger. Il faut charger la voiture, dormir un peu avant, et puis c’est parti. Mais la route, c’est long, surtout la nuit. Alors, on dort, on lit un livre, on écoute de la musique, on traverse des frontières… Partir en voyage de nuit, c’est une grande aventure !
D’habitude, quand on part en vacances, l’importance c’est le but. Alors, le trajet, sauf dans le Poudlard Express d’Harry Potter, pardonnez qu’on l’évince. De toute façon, sur les autoroutes, avec les paupières qui tombent, luttant contre le sommeil, la route n’a rien de fascinant. Et si c’était tout l’inverse. En quarante pages, le couple à la vie comme au papier réédite le précepte de Jack London : « ce n’est pas la destination qui compte c’est le voyage. »
Dans les yeux du petit chéri de papa et maman, dont on ne dit pas le prénom pour mieux que les minots s’y identifient, on ne verra ainsi qu’en coup de vent le lieu de villégiature choisi par la petite famille. Dans son regard, c’est la nuit qui défile, chaque heure et ses merveilles. La route et ses lueurs puis le lever du soleil, les myriades d’étoiles et les nuages qui n’obscurcissent pas le ciel mais l’entraînent à l’aventure.
Alors que le petit frérot dort à poings fermés, notre héros va vivre chaque instant de cette chevauchée fantastique. Et les couleurs, l’esprit que Ian De Haes met pour immortaliser ce road movie étincelant. Quel exercice de style que d’éclairer la nuit, d’allumer ses réverbères et les phares des véhicules et de le faire dans la bonne alchimie, le bon ton, le dosage idéal pour faire rêver dans les chaumières! La beauté qu’on touche du doigt en tournant les pages est absolument étourdissante. Il y a de la puissance et du relief, à tel point qu’on a l’impression que tout s’anime, au fur et à mesure que l’image prend le pouvoir, de petits polaroïds au grand-angle qui prend toute la place, on voyage vraiment à bord de ce livre incroyable et dont le texte est à la hauteur, vivant et exaltant.
Tout le monde à bord
Résumé de l’éditeur : Dans ce petit train qui fait le tour du monde, des voyageurs s’entassent. Tous sont prêts pour des vacances de rêve. Mais qui dit voyage dit bagages ! Devinerez-vous quel animal se cache derrière les silhouettes qui défilent sur les quais des gares ? Attention ! les apparences sont parfois trompeuses…
De la belle Gaspésie de Rhéa Dufresne au Paris de Marion Arbona, le train ne s’arrête pas à l’océan qui les sépare, pourvu que l’imaginaire lui pose des rails. Et sur le quai de la gare, il y a du monde. Des animaux ou des jouets, on soupçonne un petit dieu blondinet, pas plus haut que trois pommes, d’avoir créé ce monde ou des éléphants montent à vélo des buildings que des théières chapeautent. La signalisation est burlesque et des échelles montent jusqu’au ciel.
Mais sur le plancher des vaches – ou plutôt des renards, des lions, des caméléons et autres koalas -, tout le monde piaffe d’impatience à l’idée de partir en vacances. Mais dans le train, il n’y aura pas de place pour tout le monde. À moins qu’en se serrant ? Mais à l’heure où le train démarre et que l’écharpe du renard flotte dans le vent, voilà qu’un invité surprise s’invite, en retard, de taille: un hippopotame qui finit de semer la margaille. Malgré tout, le convoi se met en branle et parcourt les sept continents et les autres. De quoi voir du paysage comme on tourne les pages… d’un calendrier. Car oui, c’est dans un sens particulier que se lit ce récit globe-trotter.
Mais comme dans le premier récit jeunesse que je vous proposais, le trépidant se passe aussi dans le véhicule où des contacts se lient ou pas et dont les voyageurs sont parfois tout retournés par les virages que prend le cheval de fer. Quitte même à prendre des apparences monstrueuses. Pas autant, cela dit, que ce qu’on voit de l’autre côté des vitres, derrière le rideau qui se joue des aspects et des ombres chinoises.
Voilà un album aux couleurs pétantes et à l’aventure sonnante et trébuchante qu’on peut lire dix fois en ayant toujours le regard attiré par de nouvelles choses. Véritable mosaïque en mode Toy Story, tout le monde à bord est le récit parfait pour joindre l’agréable à l’utile et pédagogique : pour s’amuser à reconnaître des dizaines d’animaux, chacun ayant ses particularités, son caractère et sa destination. Rhéa Dufresne ne canalise pas les mots et allie les récitatifs à de véritables phylactères qui font péter la vie à tous les coins. Avec sa géométrie de façade, Marion Arbona, elle, n’est pas carrée pour autant et offre de jolies pistes graphiques pour amuser les enfants et les évader. Pour les attirer dans ce monde bizarroïde tout en se raccrochant à une vraie animalerie bien réelle. Même si certains spécimens sont en voie d’extinction: le but du voyage n’est pas là, mais on compte aussi sur les parents pour prolonger cette lecture hilarante et prenante.
Titre : Cette nuit on part en vacances
Livre jeunesse
Texte: Charlotte Bellière
Illustrations : Ian De Haes
Genre : Aventure, Initiatique, Rêverie
Éditeur : Alice Jeunesse
Nbre de pages : 40
Prix : 13,50€
Date de sortie : le 28/05/2020
Titre : Tout le monde à bord
Livre jeunesse
Texte: Rhéa Dufresne
Illustrations : Marion Arbona
Genre : Aventure, Cache-Cache, Humour, Initiatique
Éditeur : Alice Jeunesse
Nbre de pages : 32
Prix : 13,50€
Date de sortie : le 28/05/2020