« J’suis Popeye le brave marin,
On dit que j’suis surhumain,
À chaque coup d’épinards
J’m’éclate et je m’marre,
J’suis Popeye le brave marin ! »

Même sans en avoir ouvert une BD ou regardé un épisode, vous connaissez tous Popeye, ce marin insubmersible et dont vous jalousez les biceps. Ne le cachez pas. Personnage incontournable de la pop culture, même inconsciente, chacun s’est fait son idée de ce héros. Moi, je n’avais jamais percuté que si le personnage d’Elzie Crisler Segar fermait un oeil, c’était parce qu’il était… borgne. Ben oui. D’où son surnom: Pop-eye. On est bien bête parfois. Pas grave. Oubliez tout ce que vous savez, Antoine Ozanam et Lelis ont quitté la mine de leur dernière collaboration pour retrouver la lumière de la mer et une ligne d’horizon chaloupée. Une poésie (ne fût-ce que dans les deux significations du titre) incroyable et émouvante.

Résumé de l’éditeur : Tout le monde connaît Popeye, ce borgne fort en gueule qui exhibe ses biceps après avoir englouti des épinards en boîte. Il est drôle, Popeye. Sa façon de parler, de manger les mots… et ses expressions toutes faites. Et pis, c’est un type courageux, un mec bien. Un vrai héros. Un jour, une drôle de môme au langage fleuri vient lui taper dans son oeil valide. Il est trop vieux pour elle. Mais Olive, c’est sa môme, c’est sûr. Même qu’il accepte de partir à l’aventure avec le frère d’Olive…

Les temps ne sont pas bons pour Mathurin et ses amis (pas que), la pèche s’industrialise et le poisson manque désormais aux filets trop modestes. La crise et un climat idéal pour revisiter le mythe, bourrer sa pipe, la casser parfois, et semer des embûches dans le village revisité de celui qui est un des marins les plus célèbres du Neuvième Art, plus côté Haddock que Corto.

Fan de la première heure de ce héros bizarre, avec le coeur sur une main et l’autre sur la boîte d’épinard, Antoine Ozanam se fait plaisir, et nous avec. Il y met de la nostalgie mais aussi la quête des grands trésors, l’envie d’y croire et les drames de la vie qui font basculer les histoires de papier, froissé.

Ozanam et Lelis tout en délicatesse ne sont pas infidèles au musclor des mers, lui collent la larme (salée) à l’oeil et le réaffirment dans toute son humanité et sa complexité. Vieux avant l’âge ou jeune après l’âge, on ne sait situer ce héros à des miles de son apparence originelle, eastwoodien. Popeye, homme sans âge, a 1000 ans ou vingt ans.

Mué plus par l’énergie du désespoir et le courage que les épinards (dont on comprend le mystère de leur potion magique). Et par le dessin vibrant de Lelis, qui fait tanguer le trait et en finit de nous submerger avec cette histoire où tout s’éloigne pour mieux se rassembler et répondre aux questions qu’on s’est toujours (ou jamais) posé sur le sailorman. C’est brillant, comme nos yeux, à l’issue de ce récit intime et formidable.

Dans un autre genre, je ne résiste pas à partager avec vous la vidéo-test de ce qui devait être le film d’animation de Genndy Tartakovsky qui a depuis quitté le navire.
Bonus 2 : Lors de récentes vacances à Malte, j’ai appris que le seul et unique long-métrage live Popeye réalisé par Robert Altman avec Robin Williams dans le rôle-titre, sorti en 1980, a été tourné dans un décor créé de toutes pièces à Triq Tal-Prajjet. Ce village factice est resté debout et est l’une des curiosités à découvrir (au prix fort pour ce qui demeure un décor de tournage en décrépitude) sur l’île.

Titre : Popeye – Un homme à la mer
Récit complet
D’après le personnage et l’univers d’Elzie Crisler Segar
Scénario : Antoine Ozanam
Dessin et couleurs : Lelis
Genre : Aventure, Drame
Éditeur : Michel Lafon
Nbre de pages : 104
Prix : 20€
Date de sortie : le 28/02/2019
Extraits et illustrations: