La compétition des Courts Métrages du Festival International du Film Policier de Liège s’est déroulée hier soir au Palace de Liège.
- Anton Solnitzki, Bénédicte Phillipon (présidente du jury) et Gary Guénaire, les gagnants du prix court métrage avec UNE TEMPÊTE. Photo de Douglas.bxl
La variété des thématiques proposées ainsi que les genres abordés n’ont pas facilité la tâche du jury composé d’Hector Lavigne et Suzy Couchot (13ème RUE/SYFY), du comédien liégeois Gilles Vanderweerd (Le Collier rouge, etc.) ainsi que de la comédienne, écrivaine et scénariste/dialoguiste bruxelloise Bénédicte Phillipon (Ennemi public, le Grand Cactus/RTBF, Magic Land Théâtre, etc).
Au programme de la soirée, six courts métrages en rapport avec le genre policier: La mangeuse d’hommes, Ordalie, Adn de grands fauves, L’affaire du siècle, Voyou et Une tempête.
Le policier ou polar doit être compris au sens large. Le festival ne ferme pas la porte aux thématiques associées comme la réinsertion, la justice, etc.
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UNE TEMPÊTE d’ANTON SOLNITZKI (1er Prix Court Métrage Policier 2019 )
Le premier prix du jury traite du sujet épineux du terrorisme avec beaucoup de justesse. Le spectateur observe le quotidien d’un taximan parisien d’origine algérienne, Ali. Ce dernier a quitté la police pour se consacrer à sa fille. Un jour, il prend un jeune Français converti et radicalisé à bord de son taxi en direction de l’aéroport Charles de Gaulle.

Une tempête d’Anton Solnitzki a pris le parti de ne pas concentrer la narration sur le terroriste mais bien sur le taximan qui embarque le terroriste. Anecdote amusante, le personnage d’Ali est interprété par Ali Lakhous. Le réalisateur du film a expliqué après la projection qu’il l’avait rencontré en prenant le taxi vers 9h du matin dans Paris. Il a eu un coup de cœur et lui a demandé s’il voulait interpréter un rôle. Il s’agit donc d’un vrai taximan qui est au volant du taxi dans ce court métrage qui respire l’authenticité.

Le rôle du radicalisé a quant à lui été dévolu à Gary Guénaire. Ce jeune comédien français possède déjà un beau parcours à l’aube de la vingtaine, comme l’atteste cet article d’Allociné. Mais c’est surtout dans la narration et les émotions suscitées que ce film touche et interpelle. Le pari de traiter ce sujet sous l’angle de la victime et non du terroriste fait mouche. La fiche technique complète de « Une tempête », c’est ICI.
La compétition fut indécise puisque les quatre membres du jury avaient retenu un court métrage différent à l’issue de la projection. Voilà ce que nous en avons pensé:
VOYOU d’Alexandre Jallali avec Geoffrey Carpiaux
Ce premier projet d’envergure d’Alexandre Jallali plonge le public dans les profondeurs de Charleroi. Et on se croirait presque à Gotham City, sauf qu’il n’y a pas de Batman dans la ville. Dès le départ, l’ambiance est lourde et pesante. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’on ne reprochera pas un Happy End à l’américaine à ce jeune réalisateur.

Si ce film n’a pas encore été beaucoup diffusé dans des festivals belges (malheureusement), il a reçu une belle réception du public présent à Liège. Il tourne d’ailleurs pour l’instant au Canada et aux Etats-Unis et les retours sont encourageants. L’histoire débute à la libération d’un gars incarcéré après avoir tué sa copine par accident. En sortant de prison, ses potes n’ont pas super bien tourné et les emmerdes l’attendent. Que ce soit le trafic de drogue, la prostitution, la violence sociétale ou encore la précarité sociale, plusieurs thématiques très réelles et troublantes sont abordées.

La prestation de Geoffrey Carpiaux, qui avait pris 10 kg et pas mals de muscles pour l’occasion, est vraiment convaincante. Ce comédien, fervent de l’Actor Studio, formé à l’INSAS, a l’ambition de se faire une place dans le paysage cinématographique belge.
La scène de l’escalier avec Lola Destercq m’a replongé instantanément dans mon enfance en me rappelant le film culte La Haine avec Vincent Cassel. L’approche brutale et sans concession d’une réalité trop souvent cachée n’y est pas pour rien. On espère encore entendre parler de ces jeunes gars de Charleroi à l’avenir car la tension était au rendez-vous du début à la fin.
LA MANGEUSE D’HOMMES de Baptiste Drapeau avec Christelle Cornil
Tourné dans des conditions plutôt rudes puisqu’il a neigé avant et au début du tournage mais qu’ensuite la neige a fondu en transformant par la même occasion le décor, La Mangeuse d’hommes est promis à un bel avenir en festival.
- Christelle Cornil et Xavier Lacaille en discussion avec le présentateur du FIFPL. Photo de Douglas.bxl
Ce court métrage traite le sujet sensible de la corruption policière de manière humoristique. Le décor vosgien est magnifique. Les dialogues sont percutants. L’histoire est crédible et plusieurs ficelles du polar sont utilisées.
Lionel Abelanski fait également partie du casting et il est, comme toujours, très bon dans le rôle de flic corrompu.
Anecdote de tournage: un problème d’eau potable a affecté sévèrement 27 membres des 30 personnes composant l’équipe sur place. Et quand on boit de l’eau qui n’est pas potable dans les montagnes, on vous laisse imaginer le calvaire enduré par l’équipe. Et pour en savoir plus sur le réalisateur qui a su gérer tous ces problèmes, voici son blog !
L’AFFAIRE DU SIÈCLE de Victoria Musiedlak avec Esteban
Ce court métrage humoristique consiste en l’audition d’une dame soupçonnée coupable d’un homicide sur son mari. Celle-ci est accompagnée par son avocat commis d’office, Maître Nageux (Esteban). Avec de nombreux jeux de mots et des dialogues qui s’enchaînent avec brio et humour, ce film aborde plusieurs thématiques comme l’amour et le couple, les arnaques, etc. Une vraie belle surprise à découvrir. Plus d’infos sur Victoria Museidlak sur Unifrance.
ORDALIE de Sacha Barbin
Ce huis-clos relate l’histoire d’un tueur qui rend visite à un homme pour l’assassiner. Très vite, les dialogues plein d’humour et de justesse apportent un côté surréaliste à la scène qui se déroule devant nos yeux.
À l’heure du thé, quelqu’un sonne à la porte de M. Kaplan. Le cinquantenaire se trouve nez à nez avec un jeune homme qu’il ne connaît pas, une visite qu’il n’attendait plus. Le jeune homme lui annonce la raison de sa visite : il a été payé pour le tuer. Karl va accepter son sort, résigné.
ADN DE GRANDS FAUVES de Delphine Montaigne
Ce court métrage de la comédienne expérimentée et jeune réalisatrice Delphine Montaigne a été programmé dans pas moins de 100 festivals depuis son lancement.

Cette dernière a expliqué lors de la présentation qu’elle avait d’autres projets en cours mais qu’elle ne souhaitait plus jouer dans un projet qu’elle réalise. Cette Française est pourtant très crédible dans son rôle de flic du 36 quai des Orfèvres. C’est d’ailleurs dans ce lieu mythique que son film a été tourné. Belle performance de Tanya Mattouk en folle de service.

L’histoire met en scène deux femmes lors d’un interrogatoire plutôt déstabilisant. L’idée qui sous-tend le projet est de rendre hommage au travail de la police, mais surtout de s’intéresser aux émotions des femmes et des hommes en uniformes une fois leur service terminé.

Au sein de son équipe, Léa est officier d’élite, commandant de police judiciaire au célèbre 36 quai des Orfèvres à Paris. Protégée et connectée par un lien invisible avec son équipe, elle côtoie chaque jour les esprits les plus obscurs. Parfois la frontière entre le bien et le mal est invisible et laisse des traces indélébiles …

Le Festival se clôture ce dimanche 5 mai, dépêchez-vous d’y aller si vous n’avez pas encore pu vous y rendre!
En bonus, le clip Wounds du groupe Ulysse avec Gilles Vandeweerd!