Après le succès de Niki de Saint Phalle, Sandrine Martin s’est emparée de l’histoire de Pierre Péju pour la sublimer… ou du moins la matérialiser sous forme de bande-dessinée. Le rire de l’ogre est une belle réussite tant au niveau de la narration que de l’émotion transmise par les personnages. Le scénario solide n’est pas étranger à son succès.
L’histoire de la bande dessinée
Au début des années soixante, Paul séjourne chez son correspondant allemand dans la ville de Kehlstein, en Bavière. Il y rencontrera son premier amour en la personne de la très mystérieuse Clara, qu’il n’aura de cesse de fuir et de retrouver. Il sera aussi confronté au terrible secret que renferme la forêt voisine qui, même si la guerre est terminée depuis vingt ans, porte encore en elle les stigmates de cette folie meurtrière. Tout au long de sa vie, des personnages troubleront la vie de Paul et sa relation à autrui. De quoi nourrir sa réflexion sur l’ambigüité de l’homme et le recommencement du mal qui, inlassablement, resurgit…
Une retranscription fidèle du roman de Pierre Péju?
Le roman de Pierre Péju, dont s’inspire la bande dessinée, se divise en deux récits principaux. Un prologue sous forme de conte noir et fantastique où les thèmes du mal, de la guerre, de la métamorphose des hommes sont introduits. Une deuxième partie qui s’intéresse plus aux relations entre humains. Il s’agit d’un récit plutôt anxiogène et dont l’ambiance est sombre. Alors que la période couverte s’étale de 1941 à 1963 et ensuite de 1964 à 2037 dans le roman, la bande dessinée ne débute qu’en 1963 et elle s’arrête avant la mort de Paul.
Sandrine Martin a fait le choix de s’intéresser principalement à la période où Paul, le personnage principal de l’intrigue, décide de partir quelques mois en Bavière. C’est là bas qu’il fait la rencontre de la mystérieuse et passionnante Clara. Cette fille pas comme les autres le pousse à s’interroger sur la vie, sa vie, le monde, les rapports entre les hommes et plus encore.
Oscillant entre le drame et la romance, la réussite du pari de Sandrine Martin tient dans le fait que l’immersion est totale, et ce dès le début. On se transpose aisément dans la peau de Paul et l’on ressent véritablement les émotions qu’il vit à travers ses diverses expériences de vie. Le choix de narration à la première personne n’est pas anodin et il renforce encore un peu cette sensation.
Qu’est-ce que le bien et le mal? Jusqu’où peut aller le mal? Comment l’amour entre deux personnes se manifeste-t-il? Quelle forme peut-il prendre? Quelle est l’effet du temps sur les sentiments? Comment le passé a-t-il une incidence dans le présent? Autant d’introspections qui me furent proposées durant la lecture des 124 pages de ce volume unique cartonné et en couleur. Le style crayonné et les couleurs pastels utilisées m’ont vraiment plu et elles ajoutent encore un peu de mystère à la trame générale.
Au final, si l’histoire n’est finalement pas si originale qu’on peut l’imaginer, c’est une belle épopée que nous offre Casterman par l’intermédiaire de Sandrine Martin. Cette auteure de bande dessinée et illustratrice n’est plus une novice et on ressent toute son expérience dans les traits.
En bonus, la vidéo d’un Masterclass organisé avec la participation de Sandrine Martin
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Récit complet
D’après le roman de Pierre Péju
Scénario, dessin et couleurs : Sandrine Martin et Pierre Péju (les dessins de Paul)
Genre: Histoire, Récit de vie, Romance
Éditeur: Casterman
Conception graphique: Studio Casterman BD
Nbre de pages: 124
Prix: 20 €
Date de sortie: le 26/09/2018
Extraits :