Paris brûle-t-il ?, on pouvait se poser la question. Quant à Moscou, c’est une certitude, elle se consume avant même que Napoléon puisse y fanfaronner. S’il savait. Car si elle brûle, vous devriez prier pour que la Troisième Rome soit réduite à l’état de cendres assez vite, sous peine de libérer un plus terrible fléau encore que les flammes. Un peu comme quand les fous d’Arkham sont libérés et sèment la panique dans le Gotham de Batman. Mais ici, il n’y a pas de super-héros, juste un ogre Brûlez Moscou ! c’est moins un ordre catégorique que désespéré : il n’y aura pas de cadeau. Les incandescents Kid Toussaint et Stéphane Perger, pour leur première collaboration, se sont bien mis d’accord là-dessus.
Résumé de l’éditeur : 1812. Les armées de Napoléon s’apprêtent à entrer dans Moscou. Le gouverneur Rostopchine fait détruire les bouches d’incendie et libérer tous les prisonniers de droit commun avec un seul mot d’ordre : ils seront amnistiés s’ils acceptent d’incendier la ville. Au coeur du brasier infernal qu’est devenue Moscou, un homme est totalement indifférent au danger. Anatoli est prêt à tout pour atteindre un but inatteignable : retrouver sa famille.
Y’a-t-il décor plus grandiose que celui d’une ville, une nouvelle Néropolis, qui vit ses dernières heures. Dans l’urgence, la folie, l’envie de survie et la loi de la mort, tout est possible. Et si c’est dans la brèche de l’Histoire, c’est encore mieux. Moscou, automne 1812, le cadre est idéal pour libérer le mal et ses apôtres. Le capitaine a quitté le navire mais pas les rats qui vont consolider leurs viles positions. Rostopchine vient de libérer les prisonniers, et ceux de la pire espèce avec, dans les rues d’une ville bientôt ardente. Mais, forcément, la prison ayant contenu trop longtemps leurs funestes aspirations, les bagnards vont faire bien plus, bien pire, que de jouer les pyromanes. Ils ne vont pas se priver de mettre la ville à sac, à feu… mais aussi à sang, dans des rivières, des coulées de laves écarlates. Comme la donne, les couleurs ont changé et c’est presque à l’aveugle que les deux auteurs nous guident dans cette ville qui n’a plus de repère. C’est malaisant.
D’autant plus que ce dingue de Stéphane Perger (il faut le voir en dédicaces, une fois, ça vaut le coup) n’a pas son pareil pour créer ce genre d’ambiance et de personnages sanguinaires. Le dessinateur impose ses images au lecteur de manière frontale, tonitruante. Le lecteur qui lui est bien obligé de se ranger du côté d’Anatoli, une sorte de David contre ce Goliath qu’est l’Ogre de Moscou, qui n’a plus qu’une seule raison de survivre: sa famille.
Les combats s’engagent à distance ou en face-à-face, tandis que Moscou prend des airs de Pompéi. La puissance graphique est ici remarquable mais on doit bien avouer qu’on est resté sur notre faim. Comme s’il avait manqué un rouage, que le final avait été trop expéditif et que l’urgence du feu de l’action nous avait laissé un goût de cendre plutôt que de braise. Pas de quoi gâcher le plaisir de cet album dantesque et monumental.
Titre : Brûlez Moscou
Récit complet
Scénario: Kid Toussaint
Dessin et couleurs : Stéphane Perger
Genre: Thriller, Historique
Éditeur: Le Lombard
Collection : Signé
Nbre de pages: 72
Prix: 14,99€
Date de sortie: le 09/02/2018
Extraits :
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