En balade à vélo, Monsieur Iou fait le Tour de Belgique hors des sentiers battus (Interview)

Chaque jour de plus nous prouve à quel point le net et notre beau plat pays fourmillent d’initiatives originales et de talents à encourager. Preuve encore avec Monsieur Iou. Auteur de BD, le Belgo-Vietnamien a sauté le pas pour un véritable crossover entre vélo et bande dessinée. À la force de la pédale, Monsieur Iou s’en est ainsi allé par les chemins à la découverte de la Belgique, de sa diversité et de son folklore. Un périple sur la petite reine aux couleurs très « noir-jaune-rouge » qui verra bientôt le jour dans un livre dont l’auteur vient de boucler le crowdfunding.

Bonjour Monsieur Iou, tout d’abord, qui êtes-vous ? Un as de la petite reine ? D’où est née cette passion ?

Assez drôlement le vélo n’était pas vraiment une passion à la base, mais d’abord un hobby et un moyen de transport. Au fur et à mesure de son utilisation je me suis rendu compte qu’il est le symbole d’un mode de vie alternatif.(que ce soit en rapport à l’écologie, à l’urbanisme, etc.)
Cette idée d’alternative me plaît beaucoup. Plus que sur la Belgique ou sur le vélo, cette BD, est une BD sur l’alternative.

Maintenant, j’ai le virus du vélo et je me rends compte qu’il s’applique à plein de domaines différents que je n’ai pas fini de découvrir.

Tour de Belgique a velo - Monsieur Iou - hallage
© Monsieur Iou

Vous suivez les courses tout au long de la saison ?

Non pas exactement, je suis le sport mais surtout les événements populaires, j’aime surtout le folklore qui l’entoure, et les figures légendaires.

Ce qui me plaît, c’est l’engouement populaire qu’il y a autour, ça me fascine, le rêve que peut provoquer le sport chez les gens. Les gens qui pratiquent et qui suivent le sport m’intéressent plus que le sport même.

Êtes-vous sportif dans l’âme ?

J’aime le jeu, l’esprit d’équipe; je m’amuse à pratiquer beaucoup de sports différents, mais je n’ai pas connu une enfance sportive entre les clubs, les compétions du dimanche et la douce ambiance des vestiaires!

Tour de Belgique a velo - Monsieur Iou - pause
© Monsieur Iou

Vous êtes aussi auteur de BD. Quel a été votre parcours ? À partir de quel moment vous êtes vous dit : je vais faire de la BD ? Quels sont vos maîtres ?

Ça fait longtemps que j’ai la passion du dessin, c’est assez peu explicable et ayant beaucoup lu de BDs étant jeune, je m’y suis dirigé assez naturellement. Les auteurs qui m’ont convaincu sont ceux de la génération de l’Association du début des années 90. Les Trondheim, Menu ou David B. (que j’ai découvert au début des années 2000) représentaient l’idée que l’on pouvait parler de choses différentes et s’adresser à tout le monde en B.D. (Je n’en étais sûrement pas conscient à l’époque mais ces auteurs représentaient une espèce d’ouverture).

Comment est née l’idée de ce tour de Belgique en vélo et en… BD ?

L’idée du Tour de Belgique en BD est venue assez naturellement, en me baladant dans le pays ou j’ai grandi, et je me suis rendu compte que je le connaissais assez peu finalement. J’ai eu envie de partager ce que je découvrais. La BD étant ma passion depuis toujours, j’ai donc monté ce projet de cette manière-là.

Quel est votre rapport à la Belgique ? Qu’en connaissiez-vous avant de mettre le pied à la pédale ?

Mon rapport à la Belgique est particulier dans le sens ou mes parents, mes frères et sœurs sont arrivés ici en 1981 suite à la guerre du Vietnam. Mon patrimoine culturel est divisé entre 2 pays. Je n’ai pas grandi avec les références du pays vu que mes parents le découvraient aussi. J’imagine qu’inconsciemment j’ai cherché à rattraper mon retard en me lançant dans ce projet .

Tour de Belgique a velo - Monsieur Iou - Jupiler
© Monsieur Iou

Et maintenant ? Quelles sont les villes que vous avez visitées et qu’y avez-vous trouvé ? Cela a aussi été une incursion dans le folklore wallon (Doudou, fêtes de Wallonie…), c’était bien ?

Maintenant, je me construis une impression du pays et de ses alentours, je me suis pas mal baladé dans la région du Centre, en Gaume, dans le Limbourg, et je me suis retrouvé dans des coins très beaux notamment du côté Florenville. Après ça me plaît aussi de tomber sur des endroits où je ne trouve rien. C’est chouette aussi de s’ennuyer un peu, de constater que rien c’est quand même quelque chose. Peut-être aussi, ne suis-je juste pas arrivé au bon moment.

Pour le folklore, ce que j’ai appris c’est que ça demande une réelle incursion, tu ne peux pas assister à un événement de loin en ne connaissant personne pour t’introduire. Il faut forcer la rencontre avec les gens. Les surprises sont bien plus souvent positives que négatives.

Lorsque je suis passé au Carnaval de Binche j’ai eu l’impression que tout se passait à côté de moi sans que je n’aie accès au folklore, alors qu’au Doudou de Mons en y allant avec des Montois , j’y ai eu accès, avec les explications, les beuveries et les rencontres qui s’ensuivent.

Tour de Belgique a velo - Monsieur Iou - dragon Doudou Mons
© Monsieur Iou

Comment procédez-vous pour les comptes-rendus sur votre blog ? Dessinez-vous sur place ou prenez-vous des photos que vous utilisez par après ?

C’est un petit moment agréable dans le train, en général, sur le trajet du retour. Je fais ça par écrit, je regarde les photos que j’ai prises à la sauvette (généralement de piètre qualité) pendant la journée pour raviver des souvenirs. Je les utiliserai plus tard lorsque je dessinerai cette partie le voyage

Ce tour se fait-il à l’impro ou est-il vraiment étudié?

Il faut préparer son voyage, mais il faut garder des occasions de créer des rencontres, encore une fois. Je ne peux pas envisager que tout soit tellement prévu à l’avance pour qu’il n’y ait plus aucune marge de liberté ou d’improvisation. Il me faut au moins une ou deux galères pour que ça soit intéressant!

Tour de Belgique a velo - Monsieur Iou - pays
© Monsieur Iou

Vous visez plus le folklore et les rencontres que la performance en elle-même, non ?

Oui le folklore, l’humain m’intéresse plus que la performance, mais ça ne veut pas dire que le côté sportif ne m’intéresse pas. Il se passe beaucoup de chose dans la tête de quelqu’un qui roule en vélo (surtout lorsqu’il est seul). Et le fait de se donner un challenge sportif, c’est livrer une bataille contre soi-même, complètement introspective. Je parlerai sûrement de cet aspect du vélo dans mon album.

Tour de Belgique a velo - Monsieur Iou - fete carnaval Binche
© Monsieur Iou

Vous nous parlez de votre bécane ? Et des copains vous suivent-ils lors de votre raid ?

Ma bécane est un petit Vitus Duralinox de course en aluminium qui date du siècle passé que j’ai retapé et décapé avec plein d’amour. La mécanique y est assez simple et pratique à réparer en cas de galère.

Tour de Belgique a velo - Monsieur Iou - vitus 979
© Monsieur Iou

Pour le reste, qui veut m’accompagne ! Copain ou pas.

 

Depuis quelques années/décennies, la bande dessinée a réellement pris possession du réel dans des reportages, documentaires, biopic, récit de vie… Comment l’expliquez-vous ?

Je ne considère pas vraiment que la B.D a pris possession du réel. C’est un médium qui se diversifie et qui évolue comme tous les autres. C’est le lectorat qui rend ça possible en étant plus ouvert à la BD qu’auparavant. La BD a quelque peu changé de statut depuis un moment maintenant grâce des auteurs comme Spiegelman, Crumb, Larcenet, ect…

Que contiendra votre album ?

L’album contiendra une quinzaine d’étapes pour 128 pages avec des pages bonus plus anecdotiques.

Tour de Belgique a velo - Monsieur Iou - defile carnaval binche
© Monsieur Iou

Encore faut-il se faire éditer. Difficile d’être (jeune) auteur de BD à cette époque ?

Oui pour un jeune auteur c’est assez compliqué, moi je débute, j’apprends encore les ficelles du métier , mais ce que je sais c’est qu’il faut se créer de la visibilité avec les outils que l’on a. Pour l’instant on a internet et il faut apprendre à l’utiliser à bon escient.

Comment en êtes-vous arrivé à faire le choix du crowdfunding ? Risqué ou faisable ?

Le crowdfunding s’est bien déroulé parce que c’est un projet sur lequel j’avais pas mal communiqué en amont. C’est quelque chose qu’il faut un minimum préparer (même si, en fait, ce n’était pas l’intention à la base). C’est de cette manière que mon éditeur, Grand Braquet, est tombé sur mon site et m’a contacté pour une édition.

Tour de Belgique a velo - Monsieur Iou - retour
© Monsieur Iou

Quels sont vos projets ? Le tour de Belgique est fini ou continuera-t-il (notamment en Flandre) ?

Il me reste une bonne partie du pays à parcourir et à dessiner je pense que j’aurai fini d’ici 3-4 mois. Je parlerai autant de la Flandres que de la Wallonie, il n’y a pas de raisons hein! (Rires)

Sinon dans mes plans, j’aimerais lancer le Tour du Vietnam (mais sûrement en moto). Après avoir travaillé sur le pays ou j’ai grandi, j’aimerais découvrir mon pays d’origine, ce serait une continuité parfaite. La thématique sera un peu différente, dans le sens ou j’aurai plus envie de parler des immigrés de 1ère et de 2ème génération et des conflits identitaires culturels auxquels ils sont confrontés. Mais toujours sur le même ton. Le but n’étant pas de faire un reportage journalistique mais plutôt de nouveau de partager des impressions.

Tour de Belgique a velo - Monsieur Iou - Genk C-Mine
© Monsieur Iou

Un tout grand merci, Monsieur Iou, et bonne continuation!

Monsieur Iou est à retrouver sur sa page Facebook et son site.

Le Tour de Belgique possède aussi son site et sa page Facebook.

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