Souvenirs, souvenirs: Springsteen ou la rencontre d’un rêve de gosse avec un Boss

On ne sait prévoir ce qu’il se passera quand nos idoles se seront tues. Trois ans après sa dernière en Belgique, aussi au Tw Classic, Bruce Springsteen reviendra le 9 juillet sur la plaine de Werchter avec son River Tour. J’ai ma place, et voilà que je ne peux m’empêcher de me souvenir de ma première rencontre avec celui qui, à 66 ans, reste et restera le Boss, l’égal d’un dieu du rock contemporain. Good memories.

Werchter, 13 juillet 2013.

Midi, on vient de garer notre char de fortune en lisière d’un bois histoire d’éviter le lourd tribut d’une place de parking (15€!!!). La musique des soundchecks résonne au loin, le Tw Classic s’annonce dans la plaine flamande, le programme est diablement alléchant et le soleil tape déjà dure quand les premiers des 60 000 festivaliers entrent sur le site. La journée s’annonce chaude et mémorable. Pas le temps de souffler, peut-être celui d’acheter les premiers tickets boissons (les bouteilles d’eau ont été confisquées, le ticket coûte 2€50… Business as usual même au prix de la morale) et la musique commence. Balthazar en premier, puissant, inspiré, le groupe belge accumule sur scène les hits de leur dernier album. Balthazar, ce groupe belge de rock alternatif, existant depuis une petite dizaine d’années et réelle révélation de cette année de festivals, livre une excellente prestation entre guitares et batteries classiques mais aussi le violon et le synthé moins en vogue dans les formations classiques de rock. « Raise your glass to the night », la nuit est encore loin, le soleil brûle, la crème est la bienvenue et c’est ambiance playa dans la prairie.

Tw Classic 2013 - live Werchter - Balthazar (2)

Blondie, fluo mais invisible

Tw Classic 2013 - live Werchter - Blondie (2)

Les Balthazar tels cinq mages droits dans la ligne de mire des quelques premiers milliers de spectateurs, quittent la scène et laissent une excellente impression. Ce ne sera pas du tout le cas de Blondie dont je préférerais ne dire mots en respect de sa force discographique et charismatique d’une splendeur passée mais la punkette même fluo n’est plus que l’ombre d’elle-même et c’est dans un show laborieux qu’elle récite son répertoire. C’est malheureux à dire mais la chanteuse Debbie Harry donne l’impression de s’embêter, de ne savoir que faire. La belle (les ravages du temps et les affres des excès ont marqué la quasi-septuagénaire) donne l’impression de ne plus avoir sa place sur scène, peut-être la retraite serait plus enviable à ce spectacle désolant, heureusement sauvé par d’excellents musiciens déménageurs dont la profession est sans doute de sauver les meubles. Seuls les nostalgiques sont séduits.

Ben Harper, force (trop?) tranquille

Après la new-wave rock du groupe américain, c’est l’ambiance bluesy feutrée qui envahit la scène avec l’arrivée de Ben Harper et surtout de l’harmoniciste de génie Charlie Musselwhite. Soudain on se prend à rêver que le Mississipi coule non loin dans ce désert flamand. La chaleur solaire est toujours là, mais Ben Harper n’est pas l’as de la chaleur humaine, il endort plus qu’autre chose malgré une musique très (trop?) professionnelle. La vraie star au final c’est Charlie, la légende aux airs de bluesman du bayou, bague au doigt et sourire sincère.

Tw Classic 2013 - live Werchter - Ben Harper (3)

18h sonne l’heure de la guitare et des percussions. Ambiance latino, la météo est de circonstance, et c’est le diable Santana tout de noir vêtu, des pieds au chapeau qui prend la tête des opérations pour 1h15 de spectacle enrichi de cuivres et de deux chanteurs bossa nova. Les tubes sont là, les hommages aussi à Morricone notamment, caliente à souhait. Le public massif danse, applaudit, chante, la soirée est lancée, la fiesta peut commencer. L’un des meilleurs guitaristes de tous les temps termine son set, laisse tomber le chapeau devant des spectateurs réjouis. Santana quitte la scène suivi de sa troupe pour reprendre sa route qui depuis des dizaines d’années l’emmène aux quatre coins du monde. Viva Carlos Santana.

Tw Classic 2013 - live Werchter - Santana (5)

Keane ambiance mais trop court

On avance dans la progra et place aux plus jeunes, Les anglais de Keane entrent en scène, la voix de Tom Chaplin est toujours aussi gracieuse, le chanteur est en forme, les années noires et surtout blanches (au vu de ses séjours en centre de désintox) sont passées, reste le bonheur et le plaisir de les retrouver sur scène. Leurs chansons oscillent entre le dernier né Strangeland (Sovereign light cafe et Silenced by the night au moment ou les premières ombres pèsent sur la foule condamnant le soleil qui a largement contribué à cette fête aux légendes) et les tubes, et croyez-moi, il y en a déjà une poignée, d’Everybody’s changing à Somewhere only we know à Crystal ball. Le groupe est heureux d’être là surtout avant la prise du pouvoir du Boss, la pop est souriante. Sébastien Mahia, fan absolu dessine une pancarte pour attirer l’attention des caméras (v. photos). Sans succès, mais Keane tente rien n’a rien ! Bon, il manque un petit peu d’originalité quand même dans le set qui reste classique, la part belle aux synthés reste sans surprise, mais en seulement une heure de temps, était-il possible de faire mieux ? Toujours est-il que l’assistance est comblée et les sourires émaillent les visages. Sur le line up,  si Keane en première partie de Springsteen pouvait faire mal aux yeux tant les deux univers sont radicalement éloignés, au final les britanniques ont bien lancé l’offensive musicale.

Sébastien Mahia artiste, a rendu hommage au groupe Britannique.Sébastien Mahia artiste, a rendu hommage au groupe Britannique.

(c) Tw Classic - Jokko Photography(c) Tw Classic – Jokko Photography

Springsteen, monstre de puissance, sacré, inébranlable et sincère

Car oui c’est une offensive, une guerre déclarée au silence qui attendait les 60 000 spectateurs. Un fan qui en est à un peu plus de quarante concerts du Boss prévient : « C’est un ravissement, il ne fait jamais deux fois le même concert, il improvise son répertoire sur scène. Il est 21h50, seize musiciens entrent en scène, des cuivres, des guitares, des choristes… Le légendaire E-Street Band est renforcé et lance les hostilités, Spirit in the night. La voix puissante et rocailleuse du Boss se fait entendre d’abord, ensuite il apparaît, musclé, intemporel. Quelques accords, quelques paroles, et Werchter est désormais transformée en banlieue américaine.

Tw Classic 2013 - live Werchter - Bruce Springsteen (14)

D’ailleurs, Springsteen comme un dieu, reconnait très vite les siens, après même pas une minute, le sautillant américain, celui qui est born to run, sprinte dans les travées laissées libres, et prend son premier bain de foule, serrant des mains, rigolant à la vue des cadeaux des fans et surtout humain. Oui l’idole est humaine et beaucoup d’autres bains de foule suivront. Le tour de chant proposé est varié, des morceaux du dernier album Wrecking Ball en passant par les classiques (Streets of Philadelphia, Born in the USA ou autre Dancing in the dark…) et surtout les cartons des fans. Car l’artiste respecte au plus au point ces cohortes de fans venus de partout et de toutes les origines. C’est sa raison d’être. Et depuis quelques années, il leur demande d’apporter des chansons qu’ils souhaitent entendre et lui de mettre au défi son band mythique dans une interprétation improvisée mais toujours réussie. Ce soir, c’est Jailhouse Rock qui fait de l’œil au chanteur. Le titre est attaché à un nounours, Springsteen s’en saisit et rejoint la scène. Du Boss au King, il n’y a qu’un pas.

Au top de sa forme, l’homme du New Jersey, le fils de l’Amérique profonde, propose un show varié avec des rocks massifs mais aussi des séquences d’émotions, The River bien sûr mais aussi 10th Avenue Freeze out en hommage à l’éternel saxophoniste de l’E-Street Clarence Clemons. Et après avoir fait monter Ben Harper (nettement plus souriant et à l’aise avec le public que cinq heures plus tôt) pour une reprise de haut vol d’Atlantic City, Bruce fait monter quelques fans au féminin pour un Dancing in the Dark de la nuit. Avant de faire chanter (faux mais de la fausseté de l’émotion) une jeune fille. La gamine est aux anges et Springsteen la prend dans ses deux bras puissants pour la ramener dans la foule. Comme un père.

Tw Classic 2013 - live Werchter - Bruce Springsteen (3)

Car toute la foule n’avait qu’un seul père, celui qui sur scène est intraitable, balance les guitares à trois mètres de hauteur vers le technicien qui a intérêt à les rattraper. Un père, un Boss mais aussi un gamin, facétieux, sincère, bouleversant d’humanité. Eh oui le rock à du cœur, et le jeune rock-cœur de 63 ans  prouve qu’il est bien plus apte à faire le show sur scène que beaucoup d’artistes beaucoup plus jeunes. Et ce pendant 2h50, ce qui est une durée minimaliste pour un type qui peut enchaîner quatre heures de concert non-stop. Une idole à figure humaine voilà ce qu’il est, donnant tout pour un public, pour la proximité avec son public, il dialogue sans cesse. C’est mon premier concert du rockeur américain, mais certainement pas le dernier, tant il m’a bouleversé. Bien sûr, tout apprenti journaliste que je suis, je ne suis pas objectif, pas neutre, je suis fan de l’artiste et de l’homme. Et quel homme, d’ailleurs depuis hier, j’en suis infinitésimalement encore plus fan, peut-être est-ce un signe. Merci Bruce tout-puissant.

Duo de légendeDuo de légende

Hommage émouvant au compagnon saxophoniste de Springsteen, décédé deux ans plus tôt. Clarence Clemons reste dans nos coeurs.Hommage émouvant au compagnon saxophoniste de Springsteen, décédé deux ans plus tôt. Clarence Clemons reste dans nos coeurs.

Quelques photos de ce jour béni:

Mais revenons au présent, autant dire que j’ai déjà hâte d’être en juillet 2016 puisque je suis appelé à revoir celui qui tient une place emblématique dans mon monde de musique!

Programme du TW Classic 2016:

Ouverture des portes à 12h

13h: CC Smugglers

14h15: The Van Jets

15h45: Simply Red

17h45: Lionel Richie

19h45: Lana Del Rey

22h: Bruce Springsteen and the E Street Band

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