David Chauvel, comme Eric Corbeyran, a fait partie très tôt de l’écurie Delcourt ; il est à l’origine de nombreuses séries BD et one shots dans tous les domaines de la BD (jeunesse, SF, thriller…), et ce, depuis les années 1990. Il est donc intéressant de rencontrer ce pur scénariste BD, de comprendre son fonctionnement de travail, lui qui publie près de 4 albums par an. Rencontre aussi avec un éditeur BD lié à Delcourt, qui a une très bonne compréhension du monde de l’édition, comme le montre son blog personnel.
Bonjour David, vous avez créé votre propre blog, indispensable pour faire connaître ces propres travaux?
Je l’ai principalement créé pour faire connaître mon travail d’éditeur, c’est à dire les livres que je publie. J’estimais que faire la promotion des livres dont j’avais la chance d’être l’éditeur faisait également partie de mon travail. Avec le temps, l’option blog a perdu de sa pertinence, je communique davantage sur ces livres sur Facebook ou Twitter. Bien entendu, je le fais également pour les livres dont je suis scénariste. Faut pas déconner non plus…
Vous participez au travail d’édition de la maison d’édition Delcourt, maison qui est maintenant présente dans tous les secteurs BD (BD franco-belge, comics, mangas…), que pensez-vous de cette politique éditoriale quantitative?
C’est la politique de la maison, depuis ses tous débuts. Si le manga est arrivé un peu tardivement, personne n’a oublié que dès ses tous débuts, Guy Delcourt a publié des oeuvres originales de jeunes auteurs, des collectifs dont certain ayant eu un grand succès ET des comics, car il était et est toujours très amateur de bande dessinée anglo-saxonnes. Beaucoup d’auteurs ont été marqués par l’édition française d »Elektra Assassin, par exemple.
Vous êtes à l’origine d’un nombre impressionnant de séries BD et de one shots depuis les années 1990, pourquoi cette boulimie de parution? Et pourquoi être présent dans à peu près tous les genres BD?
Vous avez participé à la publication de Come Prima d’Alfred, prix du meilleur album à Angoulême en 2014, une consécration pour vous?
La série Mafia Story est remarquable (avec de superbes couvertures de livres), série qui vous a demandé un gros travail de documentation et de recherche?

Y a-t-il des suites de prévues à cette série? Et ne pensez-vous pas que cette série BD montre, d’un point de vue historique et sociologique, l’ascension de ces mafieux américains (Lepke, Lucky Luciano, Dutch Schultz…) , mais aussi leurs chutes du fait de législation plus répressive et une volonté des Etats fédéraux et du FBI de ne plus être laxiste, à être plus interventionniste, bref, de devenir des Etats vraiment modernes?
Non, pas de suite prévue. Je ne sais pas si je reviendrai à ces personnages. Je les ai sans doute trop fréquentés pour pouvoir les aborder avec le recul nécessaire. Oui, bien sûr, l’idée était de montrer comment ce qu’on a appelé « Le Syndicat du Crime » était né, avait grandi, vécu et périclité, car incapable de survivre à son époque. L’histoire de la mafia italo-américaine est vraiment l’histoire d’un siècle, le vingtième, dont elle a été le reflet et le révélateur, à bien des égards…
Avez-vous l’impression d’avoir réalisé de gros progrès dans la trame scénaristique suite à toutes vos séries BD?
J’ai l’impression d’avoir piétiné pendant une dizaine d’années. Celles du milieu. Passé l’enthousiasme du début, j’ai marqué le pas, manqué d’inspiration, sans doute manqué, à mon insu la plus totale, de travail… Je parle de travail de fond. J’ai dû faire face à une certaine solitude, dans le cadre de mon écriture, ne recevant pas vraiment de conseil ou de regard extérieur, mais n’en demandant pas non plus, et ayant, circonstance aggravante, peu d’ambition en terme de reconnaissance…
Vous avez participé à l’album BD Summer of the 80’s, Serge Clerc un maître de la BD pour vous?

Vous êtes le scénariste des Enragés, série BD qui m’avait marqué par son nihilisme et son jusqu’auboutisme à l’époque, vous confirmez cet état de fait? Une suite prévue?


Y aura-t-il aussi une suite au one shot Fatman?

Peut-on dire, par vos BD, que vous êtes influencé par le découpage cinématographique? Avec des successions de plans dans vos BD?
Oui. C’est indéniable, même si je n’en ai jamais vraiment eu conscience. J’en reviens à ce que je disais plus haut : je suis « entré en bande dessinée » à l’âge de 18 ans. Ma culture narrative avait davantage été formée par le cinéma, la télévision… Et je crois que je ne pouvais plus rien y faire.
Longtemps, je n’ai pas compris qu’on me dise ça car je ne voyais pas d’autre moyen, pour moi, de raconter mes histoires, qu’avec ce type de narration là, puisque c’est celui qui me venait naturellement. Aujourd’hui, je crois que je comprends davantage et que j’ai pu aller un peu plus, tout de même, vers la bande dessinée proprement dite…
Même question qu’à Eric Corbeyran (cf lien ), vous êtes « catalogué » comme un scénariste très prolifique (voire trop commercial?), en ce sens, considérez-vous que vous ne serez jamais récompensé à des festivals BD (du style Angoulême ou Saint-Malo…)?
J’ai vu passer il y a peu de temps une étude sur « productivité » des scénaristes. Sur ces dix dernières années, Eric avait publié 222 livres… Et moi 52.
Vos derniers coups de coeur en séries BD, personnages et auteurs?
Suivez-vous les combats du SNAC-BD? Et les Etats Généraux de la BD, ça vous parle?
Que retenez-vous de vos 2 ans de BTS commerce international? Rien peut-être…
Directement, rien, si ce n’est la conviction absolue que je n’étais pas fait pour le genre de vie vers lequel mènent ces études… Ou les études, d’une manière générale, avec lesquelles je ne suis pas compatible.
