Ce mec est fou, mais ça tombe bien le monde l’est bien plus encore. Avec une régularité invraisemblable à pondre des délires et à les dessiner avec force et conviction, Mo/CDM (chieur de mondes, on vous rappelle le nom de code partagé avec Julien Solé et Ralph Meyer et remontant à leur fanzine du même nom) revient inlassablement avec des albums d’anthologie, regroupant des gags d’une planche n’ayant finalement en commun que le contexte dans lequel elles sont racontées, le fil conducteur et électrique.
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Résumé de Tirez sur mon doigt monsieur le président par les Éditions Fluide Glacial : L’Humanité est au bord de la dépression. Une seule solution : l’Humour ! À la Maison-Blanche, le constat est clair. Le monde est au bord de l’effondrement car la dépression guette la population mondiale. Il faut vite trouver une solution sinon la planète risque de sombrer dans la mélancolie et donc de courir à sa perte. Le professeur Von Drole a peut-être la solution, ses recherches convergent toutes vers cet ultime recours qu’est l’Humour. L’Humour pourra-t-il sauver la planète ?
Il y a match. La terre entière est dé… peuplée? Pas encore, mais ça ne saurait tarder! … est déprimée. Et comme dans tous les films américains, le seul homme a encore pouvoir sauver le monde est le Président Américain. Il s’attribuera sans nul doute la réussite de l’opération mais il ne faudra pas oublier les grands scientifiques (ou pas), les héros qui l’auront aidé (ou tenté de le faire) à rebooster le moral et les zygomatiques de l’humanité. Cette fois, Chuck Norris, Clint Eastwood, Dwayne Johnson ou encore Mickey ne seront d’aucun secours, il convient de trouver le plus grand gagman de tous les temps. S’opposent donc, en trois temps, le professeur Von Drole, le docteur Vannedemerd (enfin surtout le robot Ultra Gag 3000, droïde de bd d’humour de combat, passé entre les mailles des filets des anti-IA) et Mo/Cdm himself. Le combat s’annonce musclé.
Cernées de noires et mises en couleurs de manière grisâtre, les planches servant le contexte, dispersées tout au long de l’album, espèrent donc gagner des couleurs, avoir meilleure mine à la fin de ce 54-planches. Rien n’est moins sûr mais ce n’est pas faute d’avoir essayé de pousser les trois héros (qui ont quand même si pas des allures de méchants pathétiques celles des savants fous à qui on ne confierait pas le sort d’un monde) dans leurs retranchements pour livrer la quintessence de leur savoir-faire-rire.
Alors, pour le coup, force est de constater que s’il est habitué à ce genre d’exercice, Mo/Cdm ne s’est pas simplifié la tâche, s’offrant le défi de monter en puissance au fil des chapitres. Il faut faire rire mais pas trop avec les gags imaginés par Von Drole pour arriver à la quintessence de la blague avec sa petite personne. Rassurez-vous, l’auteur ne se prend pas au sérieux, tout est prétexte à la dérision et à l’autodérision. Et, effectivement, à un crescendo de la rigolade, qui détourne toutes les manies de l’humanité qui font qu’elle ne risque pas d’être sauvée.
Avec ce genre de recueil foutraque et pourtant légitimé par l’histoire de fond, Mo/Cdm ne se met aucune barrière et se permet de grappiller dans des univers toujours plus barges des situations toujours plus irrésistibles : les sous-marins (c’est tendance en plus) qui servent de pêche aux canards, les ophtalmos payés à l’oeil qui constatent une recrudescence des mauvaises vues, les chasseurs en mauvaise posture depuis que les canards ont des guns, les sirènes vieillissantes, le monde fascinant de la défense des droits des minorités dans les grandes entreprises et forcément quelques extraterrestres. Et on en passe.
La mission est réussie, je ne sais pas si l’humour peut encore sauver un monde qui ne tourne plus si rond, mais voilà un album qui peut s’inviter partout, aux toilettes le temps d’une pause, au comptoir d’un bistro entre deux journaux, sur la table d’une salle d’attente ou, simplement, tel un trésor, dans un coffre-fort chez soi. C’est inénarrable et drôlement bien trouvé, comme souvent avec cet auteur insaisissable.
À lire chez Fluide Glacial.