Entre la cour de récré et la cour des « grands », il n’y a qu’un pas. Pourtant, il semblerait que, ces derniers mois, pas mal de politiciens belges, français et même internationaux (n’est-ce pas « perruque de fenec »?) se soient complus dans la première, d’un scandale à un autre en passant par des décisions très controversées sans oublier les rumeurs alimentées par certains médias voulant qu’untel soit en couple avec un tel improbable autre. Mais, cessons de refaire ce bas (très bas) monde, et prenons une bonne leçon de politique. Et de traitement médiatique, par la même occasion.
De l’importance d’être médiatiques avant d’être politiques
Continuant son tour des thèmes probables et improbables, c’est à la communication politique que s’attaque désormais la Petite Bédéthèque des Savoirs. Une science pas toujours exacte qui, pas très vieille, n’a eu de cesse d’évoluer avec son temps et les nouvelles technologies. En bien, en mal, peu importe tant que ça rapporte des voix. Et Christian Delporte, spécialiste d’histoire politique, et l’excellent Terreur Graphique s’y sont collés.
Résumé de l’éditeur : Établie dans ses grandes règles il y a plus d’un demi-siècle aux États-Unis, la communication politique ne concerne pas seulement les candidats à une élection ou leurs conseillers : il s’agit en réalité d’un jeu à trois parfaitement consenti entre les hommes politiques, les médias et l’opinion publique. Car au fond, la communication politique est avant tout un espace d’échanges.
Passionnant, c’est le mot. Offrant une plongée dingue dans l’univers de l’image politicienne qui devrait faire fureur, Christian Delporte est précis et fascinant tandis que Terreur Graphique apporte toute son expérience de la caricature et de l’humour bien plus efficace que bien des discours trop sérieux. Le duo n’oublie pas non plus et surtout de questionner le rôle des médias qui, bien malgré eux (et bien qu’ils aient, et c’est nettement moins compréhensible, remisé certains idéaux au placard) contribuent à entrer dans la danse, à tomber dans le piège tendu par les hommes et femmes politiques pour mieux faire le jeu de ceux-ci. L’information a fait place à l’événement (on parle de Tony Blair et des comptes Facebook des puissants mais, si ce volume était paru un poil plus tard, on aurait aussi pu parler de l’hologramme de Mélenchon), à une certaine relation de proximité moins professionnelle qu' »ami-ami » et les médias, le nez dans le guidon, arrivent désormais trois guerres en retard avec leur fact-checking pour remettre en perspective les mensonges que put débiter un Trump. Ça fait quand même un peu (beaucoup ?) peur.
Titre : La communication Politique
Scénario : Christian Delporte
Dessin et couleurs : Terreur Graphique
Genre : Vulgarisation, Histoire, Politique
Éditeur : Le Lombard
Collection : La petite bédéthèque des savoirs (Page Facebook)
Sous-collection : Société
Volume : 14
Nbre de pages : 72
Prix : 10€
Extraits :
La banlieue du 20 heures… ou celle à laquelle on veut nous faire croire
Histoire d’approfondir le sujet du côté des médias, on ne saurait trop vous conseiller l’enquête de Jérôme Berthaut mise en cases et en bulles par Helkarava dans la collection Sociorama de Casterman. De quoi rajouter une couche et une dimension supplémentaire à la critique des pratiques édifiantes de certains médias.
Résumé de l’éditeur : Jeune journaliste, Jimmy fait ses débuts au service des faits divers du journal télévisé. On l’envoie couvrir la banlieue : il découvre alors comment on fabrique l’information sur ces quartiers populaires.
On parle de la banlieue, mais on pourrait parler de Molenbeek ou d’autres sujets délicats (ou pas d’ailleurs). Alors que le traitement de ces événements demande sans doute un surplus de rigueur et de conscience professionnelle, c’est tout l’inverse qui semble être à l’action dans la rédaction de France 2 (oui, oui France 2, on ne parle pas de BFM ou d’autres médias qu’on aime à conspuer, mais de la chaîne qui semble se prétendre plus blanc que blanc depuis qu’Élise Lucet fait Cash Investigation). Dans une énergie rappelant celle du Quai d’Orsay d’Abel et Lanzac, Helkavara et Berthaut nous emmènent en plein dans les turpitudes d’un monde médiatique en proie à la vitesse (toujours elle) vu des yeux d’un stagiaire, Jimmy, dont la naïveté sera soumise à rude épreuve.
À commencer par le brouhaha de cette rédaction où à force de vouloir parler au peuple, on ne s’entend plus. Ici, tout est soumis à une logique plus marketing qu’informationnelle et à une concurrence pas forcément géniale pour l’épanouissement personnel. Pourtant, ce n’est qu’un début. Projeté dans la réalité, notre jeune journaliste en herbe va faire la connaissance de « manipulation » et comprendre l’appellation « fabrique d’informations »… et d’illusions. Car pour parer au plus urgent, comme les policiers possèdent leurs indics, les journalistes ont des filons : quitte à payer des jeunes vauriens pour rentrer dans le rôle qu’on voudrait bien voir à l’écran. Et si ça inspire la terreur, c’est encore mieux.
Pour remettre de l’huile sur le feu, on va aussi abuser de l’effet de cadrage pour donner à un coin empli de quiétude des allures effrayantes. Pour ça tout est bon, une voiture cramée, des policiers en vadrouille. Bref, on en passe et des bonnes, la figure du journalisme n’en sort pas grandie et la légende de Jimmy, qui se voulait grand reporter dans l’intérêt du vrai, est en fait toute pourrie. Alors imaginez la collusion avec les redoutables politiciens dont on parlait plus haut… Tout ça n’est guère rassurant ! Même si l’espoir fait vivre et qu’il convient, sans doute, de ne pas mettre tout le monde dans le même panier et de toujours vérifier ses sources.
Titre : La banlieue du 20 heures
D’après une enquête de Jérôme Berthaut
Scénario et dessin : Helkarava (Page Facebook)
Noir et blanc
Genre : Sociologie, Enquête
Éditeur : Casterman
Collection : Sociorama (Page Facebook)
Nbre de pages : 168
Prix : 12€
Date de sortie : le 31/08/2017
Extraits :
A reblogué ceci sur Mon livre de bord.