Jérôme Derache et Cédric Ghorbani: « Avec les Astromômes, nous espérons que les jeunes regarderont le ciel différemment »

Jérôme Derache et Cédric Ghorbani, retenez ces deux noms car si les étoiles brillent désormais de mille éclats… de rire, c’est peut-être un peu grâce à eux. Unis pour l’humour et pour la science, le scénariste et le dessinateur collaborent pour la première fois en levant les yeux au ciel (et en nous donnant l’envie de faire de même). Ainsi avec un trio d’astronomes en culottes courtes et avides de découvertes, Derache et Ghorbani percent quelques petits et grands mystères de notre voie lactée. Nous avons rencontré les deux auteurs pour une interview, non sans humour. Direction les étoiles.

Bonjour Jérôme, bonjour Cédric, vous souvenez-vous de la première fois où vous avez regardé les étoiles ?

Jérôme Derache : C’était dans un magazine télé je crois, pour voir le nombre d’étoiles qui était attribué au film que je voulais voir.

Cédric Ghorbani : Ben moi je devais être tout petit et je ne m’en souviens pas vraiment…

Et la dernière ?

Jérôme Derache : Avant d’entrer dans un hôtel, je me refuse d’y entrer s’il y en a moins que quatre.

Cédric Ghorbani: Par une belle soirée d’été avec un télescope (ouh, le fayot !)

Y’avait-il des prédispositions pour qu’un jour vous fassiez une BD sur l’astronomie ? Était-ce quelque chose qui vous passionnait ?

Jérôme Derache : J’ai surtout une prédisposition à vouloir plaire à ma femme qui, elle, au contraire de moi a toujours été attirée par l’astronomie.

Cédric Ghrobani : Oui, pour ma part, c’est un sujet qui m’a toujours intéressé, et j’avais très envie de faire une bande dessinée sur ce thème là…

Comment est née cette idée et cette série ? Et quand Cédric est-il intervenu ? Vous vous connaissiez ?

Jérôme Derache :Aimant les dessins de Cédric, j’ai un jour vu sur un réseau social bien connu, que nous habitions la même ville, je l’ai contacté, nous avons sympathisé, il m’a parlé de son envie de faire une série de gags autour de l’astronomie et paf, voila le résultat!

Cédric Ghorbani: C’est ça, j’avais cette idée-là dans mes cartons, mais sans arriver à la mettre au point et surtout, sans l’excellent titre de la série (que l’on doit à Jérôme).

Était-ce évident d’imposer ce concept à la maison d’édition ?

Jérôme Derache : Nous avons eu la chance que Vents d’Ouest nous réponde favorablement le jour même de l’envoi du dossier.

Cédric Ghorbani: Pour ma part, je suis quand même assez surpris de la frilosité de certains éditeurs…ils ne veulent souvent plus prendre de risque pour signer de nouvelles séries.

D’autant plus, Jérôme, que vous me disiez, enfin, on y est ! Arriver à être scénariste de BD, pas un long fleuve tranquille ? Quel a été le déclencheur, ce qui vous a donné envie de faire de la BD ?

Jérôme Derache : Une BD, c’est rapide à lire mais beaucoup plus long à faire… Mon avantage sur cette série est que je n’y connaissais absolument rien, je me suis énormément documenté, j’ai un fil conducteur avec des infos à faire passer que j’essaye de faire tenir dans une trame globale sur les rapports entre les différents personnages, et ce, à travers des gags.

Concernant l’élément déclencheur de l’envie de faire de la BD, personnellement c’est la découverte d’Achille Talon à 7 ans qui a vraiment été déterminante, je m’en souviens comme si c’était hier…

Et vous, Cédric, qui êtes auteur de BD depuis un bon moment, vous avez senti le métier changer ? Comment avez-vous décidé de devenir auteur de BD?

Cédric Ghorbani: Oui, le métier change, mais pas forcément dans le bon sens…je ne m’étalerai pas ici sur les conditions difficiles pour certains d’entre nous et la précarité grandissante que l’on peut connaitre dans ce job, parce que c’est la contrepartie d’un métier formidable sous bien des aspects quand même.

Ce début de série ne se place-t-il pas dans une ère de la bd qui jouant toujours la carte du plaisir de lecture, essaye aussi de (faire) comprendre le monde qui l’entoure ? Et la science ne s’immisce-t-elle pas d’autant plus ces derniers mois ?

Jérôme Derache : C’est vrai que la BD « éducative » est pas mal présente ces derniers temps…Je crois que tous les sujets peuvent être traités en BD, pourvu qu’on ait le bon axe. À travers les Astromômes, j’espère vraiment que les lecteurs retiendront des choses et regarderont le ciel peut-être un peu différemment, voire même que notre série fera naître des vocations, mais le but premier est de se marrer ! On a travaillé les dialogues et les gags pour que le lecteur apprenne sans s’en rendre compte…

En quoi, la bande dessinée peut-elle être un excellent média pour faire passer des informations, apprendre ou faire état du monde qui nous entoure ? Quelles sont les forces du support ?

Jérôme Derache : La BD c’est du cinéma de papier, on peut faire tous les effets spéciaux qu’on veut avec un budget limité…Et en plus, le lecteur peut faire le film à son rythme et revenir sur telle ou telle scène autant de fois qu’il le veut, c’est génial comme support !!

Comment expliquez-vous qu’une vraie BD du réel ait émergé ces quinze dernières années ?

Jérôme Derache : Heuuu je laisse la parole à Cédric qui, je n’en doute pas, à une hypothèse la dessus et je ne manquerai pas de réagir à son propos…vas-y Cédric !

Cédric Ghorbani: Non, non, sans façon Jérôme, à toi l’honneur !

Jérôme, comment avez-vous, du coup, réalisé l’exercice de la vulgarisation ?

Jérôme Derache : Comme je n’y connaissais rien, j’ai du me documenter en passant de loooongues heures à la médiathèque et sur internet, en prenant soin de recouper toutes les infos pour ne pas raconter de bêtises…

Y’avait-il un contrôle scientifique ?

Jérôme Derache : Oui !! Nous avons la chance d’avoir Alain Cirou qui est, entre autre, le directeur de l’Association Française d’Astronomie qui a procédé à une relecture complète ! Gloire ici lui soit rendue !!

Et pour vous, Cédric, y’avait-il des enjeux, des challenges au niveau du dessin et de la représentation de cet univers ? Des difficultés ?

Cédric Ghorbani: Alors, non, pas de difficulté particulière, et pas de monotonie car Jérôme alterne bien les sujets et les ambiances …une lunette astronomique, ce n’est pas forcément le plus facile à dessiner…et puis, au départ, je pensais qu’une bd sur l’astronomie, ça me ferait gagner du temps dans le dessin des cases puisqu’il suffisait de dessiner des aplats de noirs la plupart du temps (l’espace).

En réalité, ça s’avère plus long que je ne le pensais parce que je passe un temps fou à remplir de grandes surfaces à l’encre de chine, précisément et à faire certains dégradés à la plume autour des planètes au des vaisseaux (quand il y en a…)

Naturellement, Les Astronomes reste avant tout une série d’humour pour la jeunesse, et forcément tout par d’une histoire de premier amour. Comment est arrivé ce pitch ? Et ces trois héros ?

Jérôme Derache : L’histoire d’amour est venue tout de suite. Au tout départ il n’y avait même que Lisa et Quentin mais je n’étais pas satisfait du résultat…Il y avait un côté trop scolaire…J’ai eu l’idée d’intégrer un meilleur pote à Quentin et qui s’est imposé comme étant aussi le frère de Lisa, à partir de là le ton a changé et le rythme a été trouvé.

Cédric, comment les avez-vous designés ?

Cédric Ghorbani: Et bien, il fallait trouver un dessin de personnages « sympas », jeunes et dynamiques…et puis l’oncle Gabriel (un peu plus « ringard » dans son apparence.)

Là encore, les séries mettant en action des jeunes héros ont explosé ces derniers temps, comment l’expliquez-vous ?

Jérôme Derache : Le public jeunesse s’identifie plus facilement à des héros jeunes plutôt qu’à des adultes tout simplement…

Quelles sont les séries avec des enfants qui vous ont bercé, tous les deux ?

Jérôme Derache : Bercés ?? Heu là je ne vois pas…Nous sommes d’une génération où curieusement, les héros enfants n’existaient pas beaucoup (à part la Ribambelle de Robas et les As de Greg).Ceux qui m’ont bercés moi sont outre Achille Talon : Spirou, Ric Hochet, Gil Jourdan, Jérôme K Jérôme Bloche…Attention Cédric lui va vous parler de Franquin je parie!

Cédric Ghorbani: Oui, moi c’est plutôt Franquin qui m’a bercé…

Comment envisagez-vous la suite de la série ? Y’a-t-il matière à faire de nombreux albums ?

Jérôme Derache : L’univers est infini et l’exploration spatiale n’en est qu’à ses débuts, plein de choses nous attendent dans ce domaine dans les années à venir…J’espère que l’album plaira suffisamment aux lecteurs pour que nous puissions aller au delà du tome 2 qui lui paraîtra de toute façon et qui est déjà pas mal avancé…

Cédric Ghorbani: Oh, oui, si la série marche suffisamment, je me verrai bien réaliser une « infinité » d’album sur cet « univers »….

Quels sont vos projets en-dehors des Astromomes ?

Jérôme Derache : J’ai fini il y a quelques semaines l’écriture du tome 2 d’Éternellement vôtre pour Gao au dessin, c’est une série de gags publiée chez Bandes à part sur le riant secteur des pompes funèbres. Puis, j’ai un autre projet signé pour lequel je ne peux pas encore dire grand chose et plein d’autres dossiers qui sont en train de se monter et qui, je l’espère, sauront convaincre des éditeurs, je croise tout ce qui est possible de croiser pour que ça marche…même les ligaments si il le faut !

Cédric Ghorbani: Pour ma part, je dessine toujours la série « Le Collège Invisible » depuis le tome 9…je travaille actuellement sur le tome 14…et j’ai d’autres projets qui je l’espère se signeront bientôt, mais c’est vrai que c’est toujours un peu délicat d’en parler tant que rien n’est sûr.

Merci beaucoup à tous les deux, ne vous perdez pas entre deux étoiles, on a hâte de lire (et de rire) la suite!

Découvrez les quatre étapes de la création d’une planche: