La Nuit des Choeurs, entre ombre et lumière

Ce dernier week-end d’août était synonyme de renaissance à Villers-la-Ville qui accueillait au cœur-même des ruines de sa majestueuse abbaye séculaire, la Nuit des Choeurs, et ce pour la seizième édition. Un festival au concept inédit qui propose à ses participants une promenade, entrecoupée de six concerts. Avec une affiche prestigieuse cette année encore, le festival a convaincu dans son ensemble.

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18h30, les portes s’ouvrent sur la magnifique abbaye cistercienne de Villers-la-Ville, prête à accueillir les centaines de festivaliers, comme autant de passagers d’une nuit, qui vont fouler son sol, impatients d’assister à une série de concerts uniques dans des lieux magistraux! Et impatients, nous l’étions… Maurane, The Golden Gate Quartet ou encore les Marins d’Iroise, tant d’artiste prestigieux promettant un spectacle unique.

Une fois le plan du site étudié, nous nous dirigeons vers la première scène où la Brussels Choral Society pousse déjà la chansonnette sur la fabuleuse ouverture du Mariage de Figaro. Un frisson parcourt l’assemblée, le génie de Mozart est au rendez-vous… Mais passé ce premier morceau, les chants proposés s’avèrent finalement peu originaux. Cependant, il faut tout de même saluer l’impressionnante performance vocale de cet ensemble qui aurait pu envoyer du lourd!

Nous continuons alors notre chemin, découvrant des petites cryptes et autre tombeau au charme certain. À peine installés, à quelques pas de l’abbatiale, le Golden Gate Quartet, formation mythique de la culture afro-américaine, se prépare déjà à entrer en scène. Les quatre hommes au charisme incommensurable évoluent sur scène le plus naturellement possible. Leur bonne humeur est communicative, et un sourire d’émerveillement s’empare d’un public conquis. Un véritable échange d’une rare intensité s’opère alors; la musique coule dans leur sang et leur mission est de partager. Le temps passe vite, trop vite, et bientôt, le groupe annonce la dernière chanson, revenant au passage sur la genèse de la formation, vieille de 80 ans. Ils se laissent même aller à la plaisanterie; je vous rassure, nous ne sommes pas les membres originels! Il n’y a pas de discussions possible, ces quatre-là sont incroyables et vingt minutes de concert, ce n’est vraiment pas assez pour mettre en valeur l’étendue de leur talent… mais c’est le jeu, réussi et gagné haut la main. Puis, passons, la soirée ne fait que commencer!

Nous continuons notre petit bonhomme de chemin; nous émerveillant sans cesse à chaque recoin de l’abbaye que nous découvrons, illuminé de dizaines de bougies. Le cadre est réellement magique et se prête incroyablement bien à un tel événement. Nous migrons de nouveau vers la scène 6 où se prépare un concert inédit qui va véritablement nous bluffer. C’est de nouveau un quartet qui prend place sur la petite scène ; les Quartonal, ce groupe allemand qui fait sensation depuis un bout de temps grâce son répertoire courant de la Renaissance au XXIème siècle mais surtout grâce à l’originalité que le quartet distille dans ses interprétations toujours plus surprenantes. Cette formation est une bombe d’originalité bourrée de talent. Lorsqu’ils commencent impossible de savoir où il vont nous emmener et c’est ce qui fait la magie de ce projet inédit, véritable bouffée d’air frais dans le monde parfois trop puriste de la musique classique. Ils n’ont pas eu peur de prendre des risques et, passé l’étonnement, la magie opère. Leur répertoire est large, complexe, parfois inattendu même : c’est ce qui fait leur charme. Néanmoins, nous nous heurtons toujours au même problème, le concert est trop court, beaucoup trop court. Mais pas de panique, ces quatre chanteurs aux voix extraordinaires ont tout de même bien assez de temps devant eux pour convaincre. Et c’est tout en douceur qu’ils débutent leur concert, sur une sérénade. Et, après une magnifique revisite de Hard to say I’m Sorry mettant en lumière Christoph Behm, le ténor du groupe. On ne se lasse pas de leur style innovant, et on ne peut que les adorer lorsqu’ils entonnent What should we do with a drunken sailor, le légendaire chant irlandais, avec leur humour si naturel. La grande amatrice de musique classique que je suis est ébahie… Que faire devant une telle explosion de talent? Il n’y a rien à faire justement, juste apprécier ce moment inattendu en compagnie de ces quatre joyeux lurons à la bonne humeur communicative. Vous l’aurez compris, c’est donc conquis que nous repartons pour notre avant-dernière étape de la soirée.

Nous retrouvons la manécanterie la plus attendue de la soirée ; Les Petits Chanteurs à la Croix de Bois. La promesse était grande, pourtant c’est à une prestation très statique que nous assistons, doublée d’un choix de chanson peu original. Mais passé cela, l’exécution est parfaite, à la hauteur de la réputation de cette chorale d’enfants aux voix aussi cristallines qu’émouvantes. Nous nous dirigeons ensuite vers le cœur de l’abbaye, sans doute la partie la plus grandiose du site, la nef de l’abbatiale, sous laquelle Maurane et son chœur prennent place, au milieu de centaines de bougies. La vision est incroyable et la promesse est grande. La chanteuse à voix belge entame son tour de chant avec son dernier single en date, Trop forte. Dans ce décor digne des Pilliers de la Terre, elle a choisi de chanter ses plus grands succès : Le prélude de Bach et L’un pour l’autre. avant de terminer, il faut l’avouer sur une déception, avec Toutes les mamas. une chanson qui, premièrement, ne s’inscrit pas du tout dans la lignée de celles interprétées précédemment, et deuxièmement, n’est tout simplement pas adaptée à cet endroit fabuleux. Finalement, nous ne manquons pas de remarquer que la chanteuse est totalement hors contexte de cet événement inédit puisque nous attendons toujours son chœur, comme annoncé au départ. C’est un concert acoustique (instruments à l’appui, alors que l’événement fait généralement la part belle aux seulx instruments vocaux) assez commun qu’elle nous a livré ce soir-là, pourtant elle aurait pu réaliser une toute autre prestation!

C’est donc sur une note plus négative que ce concert, dont nous attendions beaucoup, prend fin. Il nous reste alors encore du temps avant le final qui verra tous les groupes chanter sur la scène principale, avant le feu d’artifice de clôture. Nous décidons d’occuper ce temps libre en allant applaudir pour la seconde fois de la soirée les Quartonal, mon coup de cœur de la soirée. J’apprécie encore mieux cette deuxième salve, prenant véritablement conscience du talent inné de ces quatre gaillards.

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23h45, chaque formation se prépare à entrer en scène pour chanter une dernière chanson lors du show final. C’est la Brussel Choral Society qui ouvre la bal, reprenant sans grande originalité le Alleluia d’Haendel. C’est ensuite au tour Quatronal qui nous surprennent de nouveau avec une reprise imprévisible de la CucarachaDe nouveau l’humour est au rendez-vous, le public n’en attendait pas moins d’eux! Changement de registre avec les Petits Chanteurs à la Croix de Bois qui excellent dans un Ave Maria de Schubert cristallin et particulièrement maîtrisé. Le temps se suspend pour un moment magique, encore un! La scène principale accueille alors les marins d’Iroise qui, avec leur entrain habituel, rendent hommage à la Belgique avec les filles du bord de mer. Encore une belle surprise avant une nouvelle déception de la part de… Maurane qui ne se foule pas pour ce final en apothéose en reprenant l’un pour l’autre, chanson déjà reprise plus tôt. Un choix surprenant venant de cette chanteuse au répertoire impressionnant, fruit de 25 années de carrière. On aurait pu espérer mieux… Dernier groupe et non des moindres, le Golden Gate Quartet prend place pour effectuer sa prestation tout en douceur, gâchée par les pétarades du feu d’artifice. Dommage pour eux, dommage pour nous. Si c’était une erreur de timing elle aurait pu être évitée, et si c’était prévu elle aurait du être évitée!

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L’abbaye de Villers-la-Ville aura donc vibré grâce aux énergies musicales positives qui émanaient des six scènes dressées au quatre coins de cet incroyable vestige d’un autre temps. Malgré quelques fausses notes, certainement là où on ne les attendait pas, la soirée était à la hauteur de nos attentes, empreinte de magie… Vivement l’année prochaine avec au programme Scala et Spandau Ballet.

Par Alizée Seny

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