Que vais je bien encore pouvoir écrire sur un phénomène comme Didier Odieu ?
Après l’avoir encensé à juste titre dans un précédent papier lors de sa série de concerts donnés à la Samaritaine à Bruxelles, et l’avoir affublé de tous les compliments possibles et imaginables mais surtout sincères, je pensais avoir tout dit, tout écrit. C’était mal connaître cet artiste de génie qui se réinvente sans cesse, capable d’offrir à son public des shows sur le fil, mais incapable lui-même de prédire ce qui se passera l’instant d’après. Un artiste instinctif porté par sa folie talentueuse et son non-conformisme, qui ne cesse de vous surprendre. Ces deux soirées au Théâtre Jardin Passion de Namur (où il en a profité pour enregistrer son nouvel album en live) furent brillantes, de celles dont on se souvient longtemps un tendre sourire aux lèvres…

Odieu seul au piano, c’est tout un programme ! Le talent brut et près de l’os, l’anti-triche, et devant nous un homme seul qui se débrouille avec les multiples personnalités qui l’habitent. Dans son univers on croise des personnages colorés, désespérés, alcooliques, dépressifs , misanthropes , allumés , écorchés, hystériques ou tendres auquel il donne vie instantanément les portant à bout de voix et d’un jeu de piano exceptionnel et atypique capable de marquer la tempête infernale avant de redescendre vous charmer sur un tempo doux et apaisant.

Chez Odieu on passe sans transition d’Aldo que l’auteur désire trucider car il l’a poussé dans le dos à une reprise émouvante de « La CoCo » de Fréhel avant de se tordre de rire devant une relecture cynique et hilarante du « Paroles Paroles » immortalisé en son temps par Dalida et Delon. Odieu va là où on ne l’attend pas, parfois en en faisant trop, mais la plupart du temps à coup de génie.

Faux cynique désabusé, ancien punk et vrai traqueur, dès que la machine à broyer le conformisme est lancée on ne l’arrête plus et on jouit de l’artiste dans toute sa splendeur excessive et jubilatoire. Et lorsqu’on sait que ce spectacle » Retour de Flammes » fait l’objet d’un enregistrement audio et vidéo destiné à la sortie d’un futur cd-dvd en public, on ne peut qu’être impatient de redécouvrir la bête tranquillement chez soi dans son salon.

Les deux soirées du 14 et 15 octobre furent différentes, la première menée à cent à l’heure par un Odieu boulimique, la deuxième plus lente et décousue, mais toutes deux animées d’un dénominateur commun : le don total d’un artiste à son public.

Comme le déclarait Richard Ruben après le show de dimanche, Odieu mériterait mille fois de faire son Cirque Royal et d’être applaudi par un public bien plus nombreux, lui qui au fil des ans est devenu un artiste culte dont le talent immense n’est hélàs connu que de ses inconditionnels. Mais ça ce serait une autre histoire dans laquelle Odieu ne serait plus Odieu !
Texte et photos : Jean-Pierre Vanderlinden aka JPROCK THE DARK FEATHER.
Les concerts en image …