En partant d’un illustre inconnu à la beauté dingue qui nous fixe sur la couverture, les deux espagnols Raule et Juan Luis Landa revisitent la fin de vie de Nostradamus entre fiction et réalité avec virtuosité. Ici, pas de prédiction (ou pas trop), mais place à l’action, au mystère et à l’action dans un XVIème siècle sombre et en proie à bien des démons. Les anges de Nostradamus inaugure une série renaissante qui risque de faire fine lame dans le paysage franco-belge.
Salon-de-Craux, 1965. C’est un Nostradamus affaibli et en déclin que nous retrouvons. Et s’il rêve à un bourreau de l’Europe qui la mettra en guerre totale, les grands faits du devin son derrière lui, cela fait déjà dix ans qu’il a publié « Les prophéties », écrit qui fera date. Voilà donc l’ancien apothicaire reclus, entouré de l’amour de sa femme et de ses nombreux enfants. Nostradamus n’a plus que peu de temps à vivre, un an tout au plus, peut-être le sait-il? Mais en tout cas, il prépare sa relève, trois jeunes gens qui lui font office d’anges et d’enquêteurs de terrain: Arthus Trivium, Angulus Dante et la charmante Angélique Obscura. Trois disciples de choc prêts à tout pour rétablir le bien et chasser le mal.
Seulement, si Nostradamus est doué pour l’avenir, voilà que le passé revient le tourmenter par le biais des fantômes (ou peut-être sont-ce des démons) de sa première femme et de ses deux enfants morts dans les tenailles de la peste noire. Rancuniers, ceux-là semblent bien décidés à ne pas laisser Nostradamus tranquille et comptent bien s’en prendre aux trois disciples de l’ancien conseiller du roi. Nostradamus arrivera-t-il à déjouer les sinistres plans avec le peu de force qu’il lui reste et à distance?
Du vrai et du faux, Raule et Landa s’encombrent peu, laissant au lecteur le luxe de faire la part des choses. Toujours est-il que dans ce mélange de personnages véridiques et vérifiés et de personnages créés de toute pièce, les deux auteurs hispaniques se laissent aller à un récit qui saisit la grande Histoire par la petite. Dans une société en proie aux maux du temps (ici, ils s’appellent peste, pendaison sans nulle autre forme de procès ou escroqueries à la petite semaine), le récit duel et fictif prend le pouvoir. Nostradamus devient ainsi un prétexte pour sonder socialement une époque monstrueuse. Raule (Jazz Maynard) écrit un scénario qui tient toutes ses promesses et ménagent ses surprises tandis que Juan Luis Landa (inconnu ou oublié de par chez nous) effectue une entrée (ou un retour?) fracassante dans le monde de la BD franco-belge.
Son trait hispanique au possible, expressif, tour à tour torturé, expéditif et incroyablement vivace réussit à donner élan à une série qui ne risque pas de retomber de si tôt. À ranger en haut de la bibliothèque, juste à côté du Scorpion de Marini. Marini qu’on comprend d’ailleurs, quand, dans la préface, il dit: « Vive la concurrence quand elle est si excellente ». On ne peut mieux dire!
Série: Arthus Trivium
Tome: 1 – Les anges de Nostradamus
Scénario: Raule
Dessin et couleurs: Juan Luis Landa
Genre: Aventure, Mystère, Fantastique, Historique
Éditeur: Dargaud
Nbre de pages: 56
Prix: 13,99€
Date de sortie: le 29/01/2016
Extraits:
3 commentaires