Site icon Branchés Culture

Congo Requiem… du très grand Jean-Christophe Grangé !

Publicités

Plonger dans un Jean-Chrisophe Grangé, c’est ouvrir une porte sur notre part d’ombre, c’est prendre le risque d’explorer les noirceurs humaines. Mais aussi, explorer notre propre part de ténèbres. Parfois je suis déçue (Kaiken), souvent plus que séduite… mais avec Congo Requiem, je suis conquise !

Il faut d’abord préciser que Congo Requiem est la suite de Lontano (sorti en juillet 2015 aux éditions Albin Michel). Pour une fois, JC Grangé nous propose la suite d’une histoire commencée quelques mois plus tôt et dont on sentait, par les dernières phrases de dialogue, que nous n’en avions pas fini avec ces horreurs-là, avec ces hommes-là, avec cette ville-là.

On poursuit donc avec la famille Morvan. Grégoire, le père, ancien barbouze, premier flic de France, magouilleur à ses heures perdues, trafiquant de minerais, de tous les secrets d’Etats et autoritaire. Un vrai « dos gris » dans mon langage. Le dos gris est le gorille dominant du clan, le plus agressif mais aussi le plus protecteur. Celui qu’il ne faut absolument pas fâcher. Grégoire, c’est le dos gris des Morvan, fort en gueule et en coups ! Puis il y a Maggie : ancienne hippie baba cool, femme battue (jusqu’à l’extrême par Grégoire) mais tranchante par moments. Ces deux-là fonctionnent depuis tant d’années sans qu’on ne puisse y comprendre grand-chose. La violence scelle leur couple, le secret aussi. Dans les trois enfants, Gaëlle est la fille à papa, anorexique, provocante et prostituée par vengeance du père. Loïc, le frère cadet, drogué, couard, ancien athlète et nouveau génie de la finance. Et Erwan, flic et fils de flic… la digne relève du paternel.

Une fois la famille présentée, Lontano chemine dans les méandres d’une enquête où Erwan tente de démasquer un tueur en série parisien s’inspirant de meurtres commis il y a 40 ans au Congo ; l’homme-clou. À vous de lire pour mieux savourer Congo Requiem. A vous de lire pour vous plonger, avec les Morvan, dans les meurtres empreints de magie noire, de sorcellerie africaine et de croyances infernales. Une plongée dans Lontano, ce n’est pas indispensable mais vivement recommandé.

Congo Requiem, c’est la même enquête qui se poursuit mais avec une intensité plus importante. Congo Requiem, c’est toute la violence de l’Afrique noire. L’intensité des odeurs, le contraste des couleurs, la violence du climat, des relations, … La chaleur qui étouffe, la pluie qui inonde, la latérite, poussière rouge et collante, qui recouvre tout. Chaque heure vaut une journée, chaque journée vaut un an. Lorsque les pluies du soir se déversent, le corps et l’esprit sont lessivés d’avoir lutté, pour tout, pour simplement exister. JC Grangé nous livre une Afrique telle que je l’ai ressentie, telle que je l’ai vécue. Loin des complexes hôteliers. Une Afrique partagée entre les souvenirs de certaines grandeurs passées et le rejet du blanc colonisateur. Une Afrique duale. JC Grangé réalise l’exploit de raconter l’Afrique au plus près de ce qu’on peut y vivre.

Mais Erwan, Grégoire et Jean-Christophe Grangé nous emmènent au cœur des conflits ethniques d’aujourd’hui et sur les traces familiales de la famille Morvan. Que s’est il passé à Lontano en 1969 ? Et pourquoi Grégoire essaie-t-il d’entraver l’enquête de son propre fils ? Les meurtres rituels reprennent en Europe alors que le père et le fils sont au cœur des conflits des forêts au nord Congo. Qui tue, pourquoi ? Qui s’attaquent au cercle des proches de la famille Morvan ? Le danger se rapproche, il va falloir faire vite.

J’ai adoré. Un très grand Grangé dont on savoure chacune des 727 pages. Avec un vrai sentiment de moiteur africaine. Les Morvan sont épais, complexes et tellement humains. Une enquête à tiroirs, quand on pense avoir fait le tour, un détail nous entraîne sur de nouvelles pistes. Un thriller à son meilleur niveau, un régal de lecture et un merveilleux moment dans l’univers si spécifique de Grangé.

Un petit mot sur l’auteur…. Même s’il me paraît difficile de ne pas être banale. Connu par l’adaptation cinématographique de son roman « Les rivières pourpres », JC Grangé a pourtant débuté comme journaliste. Il a beaucoup voyagé dans ce cadre. On peut imaginer qu’il y puise sa précision des descriptions et les ressentis des Européens en voyage.  Son premier roman est « Le vol des cigognes » (à lire absolument si ce n’est pas encore fait). Il a une imagination et un style d’écriture qui ne ressemble à rien que je connaisse. Ce n’est pas du Stephen King, ce n’est pas du Chattam. C’est du Grangé. Avec ce mélange si spécifique de torture, d’intensité de ses personnages, de précision des descriptions locales, une intrigue qui rebondit sans cesse et une légère obsession pour les tortures infligées par les régimes sud-américains. Les livres de Grangé sont incontournables !

Et pour les amateurs de détails… page 439 figure la ville de Namur… Alors moi, qui suis  je dis : « Merci monsieur Grangé pour ces heures de lectures passionnantes et ce détail qui fait que j’ai l’impression d’exister sur la carte de votre monde ! »

MS, encore plus fière d’être Namuroise !

Quitter la version mobile