Impact d’Olivier Norek : le plaidoyer écologiste qui se cache sous une couverture policière

Disons-le tout de suite : Impact n’est pas un thriller et n’est pas tout à fait un policier. Même si une enquête de police a lieu, que des enlèvements et un ravisseur prennent la plupart de l’espace et qu’un meurtre est commis. C’est avant toute chose un cri d’alerte, de désespoir et d’espoir, un exposé presque clinique de l’état de notre monde, de notre Terre. Une critique de notre société, une prise d’opinion déclamée page après page, afin de convaincre le lecteur qu’il est grand temps de changer. La cause n’est pas discutable, elle est même juste, la manière me laisse perplexe. J’avais moyennement adhéré à Entre deux mondes et le même sentiment m’habite en cette fin de lecture. J’ai signé pour acheter un polar et je me retrouve avec un discours de près de 350 pages en faveur de l’écologie. Avec le sentiment d’avoir été piégée, d’avoir été prise en otage… Je n’apprécie guère le procédé.

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Olivier Norek nous offre une plongée en profondeur sous la Surface des événements.

« Face au mal qui se propage et qui a tué sa fille, pour les millions de victimes passées et les millions de victimes à venir, Virgil Solal entre en guerre. Seul contre des géants. »

C’est un roman qui commence comme un bon thriller. Un enlèvement, un enquêteur, une psy et un rendez-vous fixé par les voies du net entre le ravisseur et les policiers. Le mobile est rapidement éclairci. Une rançon est demandée contre la vie du PDG de Total. Enfin, pas tout à fait une rançon, une caution plutôt. Car l’argent sera restitué si Total acte des changements radicaux dans sa politique d’exploitation et de production.

Comme d’habitude, Norek écrit bien, ne laisse que peu d’espace pour souffler, il a une écriture immersive et c’est toujours très agréable de le lire. Ce début de roman n’y fait pas exception. Toutefois, les personnages auraient pu être mieux exploités. Diane Mayer, la psy avec des tocs et des angoisses à la chaîne; Nathan Modis, le flic père célibataire dont on sait peu de choses. C’est dommage car Norek nous a habitués à mieux, à plus. Et ces personnages sont prometteurs mais non aboutis.

Les discours du ravisseur pro-écologie prennent de plus en plus de place au fil des pages. Les exemples sont détaillés, chiffrés. Et au fil du temps, on a l’impression d’assister à une conférence des Nations Unies sur l’environnement, l’écologie, le réchauffement climatique…mélangé à des perspectives et prospectives de scientifiques. C’est argumenté mais lourd et peu audible dans ces circonstances.

Puis, la dernière partie du roman, relatant le procès de Virgil Solal et les plaidoiries de son avocat est clairement ennuyeuse et il m’a fallu toute la volonté dont je peux faire preuve pour terminer cette histoire.

Vous me taxerez peut être d’inculte, d’idiote, de peu concernée ou sans culture scientifique… Détrompez-vous. Et c’est sans doute parce que les informations et exemples distillés tout au long de ce roman, les exactions relatées envers l’environnement, les crimes écologiques cités ne me sont aucunement inconnus que je me suis ennuyée. Le sujet m’intéresse, la défense de l’environnement, le combat pour une société plus verte, plus respectueuse de notre planète est mon quotidien. Dans ma vie privée et professionnelle, auprès de mes élèves.

Mais pour qu’un message soit audible et reçu, il ne doit pas prendre par surprise. Il doit s’énoncer clairement. Et ce n’est pas ce que font Impact, Olivier Norek et Michel Lafon. Ils vendent un thriller et vous achetez un plaidoyer environnementaliste. Je ne trouve pas le procédé très honnête, l’intrigue est mise à mal par le message politique et sociétal que veut faire passer l’auteur.

Si je souhaite lire les opinions argumentées d’un individu sur le réchauffement climatique, je me tournerai vers les écrits ou une conférence de Jean-Pascal Van Ypersele, docteur en sciences physique et climatologue reconnu ou vers le GIEC… Leur légitimité sur le sujet n’est plus à démontrer. Et si je veux me divertir avec un bon thriller, un policier bien écrit, j’aurai tendance à me tourner vers les auteurs de talent au sein desquels j’inclus Norek. Cette confusion de genre me dérange. Ce roman « cul-entre-deux-chaises » me dérange. Ce sentiment de m’être faite piégée me dérange. Et honnêtement, je ne trouve pas que l’intrigue en sorte gagnante ni que le message écologiste soit audible.

Certains disent avoir reçu un coup de poing, un Impact à la lecture de ce roman… Tant mieux. C’est que le sujet leur était peut-être étranger, car rien n’est neuf. Ni les infos, ni les exemples, ni l’angle pour le traiter. L’analogie avec Rock (le film) est criante. Mais Ed Harris, Nicols Cage et surtout Sean Connery relèvent le casting de cette histoire où un ancien militaire utilise des moyens radicaux pour défendre une cause plus grande que lui. Là, la reconnaissance et des indemnités pour des soldats morts au combat. Ici la lutte pour une planète, une société et une économie plus verte.

Même si la plume de Norek reste intéressante; ce roman, à mes yeux, est décevant. Oublions et passons au suivant. Norek nous a déjà beaucoup séduits avec Surface, Code 93 ou Territoires. Espérons que le prochain soit dans la même veine.

Auteur : Olivier Norek

Titre : Impact

Editions : Michel Lafon

Sorti le 22 octobre 2020

Nbre de pages : 349

Prix :19,95 €

3 commentaires

  1. Bonjour,

    Je ne suis pas d’accord avec votre point de vue. Je trouve au contraire qu’utiliser un procédé comme le polar pour délivrer un message voire même un plaidoyer aussi virulent, c’est plus qu’intéressant. Que l’art soit ouvertement politique me fait du bien. Je savais de nombreuses choses énoncées, étant dans le domaine, mais d’une part j’en ai quand même appris certaines (le coup des crocodiles, je n’en avais pas entendu parler) et d’autre part j’ai trouvé passionnant le procès. Et surtout sa conclusion. Je pense que si les personnages sont peu creusés, c’est surtout parce que comme pour Virgile, la cause dépasse l’individu. Et que finalement, on n’a pas besoin d’en savoir tant que ça sur ces personnages, car ils ne sont pas le sujet du roman. Mais je comprends votre frustration sur ce point. Pour moi ce livre est quasiment un appel à l’insurrection, peut-être pas tout à fait assumé avec l’épilogue (introspection du personnage). Et c’est ce dont on a besoin. Et comment toucher les gens sans s’infiltrer dans leurs médias quotidiens (polar, série comique, etc.) ? Si on s’affiche clairement, on n’intéresse personne à part les gens déjà gagnés à la cause. Un film ouvertement féministe n’attirera que des féministes. Un film d’horreur au sous-texte féministe attirera un public large, dont certains capteront la portée politique, d’autres pas, mais ce n’est pas grave. Dans « impact » c’est clairement pas un sous-texte mais bien le sujet, pour le coup, mais le livre se serait appelé « traité de l’extinction de masse du 21e siecle », seuls les écolo l’auraient lu. Et quel dommage. Même si, hélas, je n’ai pas vu de pandas balafrés émerger à Bastille.
    Et j’ai trouvé Entre deux monde était tout simplement bouleversant. Encore plus prenant car pour le coup, plus orienté sur les personnages.
    Le mélange des genres, personnellement, j’aime beaucoup ça et je trouve ça même salvateur de sortir du thriller/polar habituel, à peine consommé, aussitôt oublié.

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