Roubaix, une lumière: l’incandescence ténébreuse du genre humain.

Depuis une douzaine d’années, Arnaud Desplechin a pris l’habitude de retrouver les terres de son enfance pour y réaliser des films qui transpirent une ambiance très particulière. En 2018, l’académie des Césars salua Desplechin et sa signature caractéristique en lui décernant le prix du meilleur réalisateur pour le long métrage Les fantômes d’Ismael (ce film réunissaient Charlotte Gainsbourg, Marion Cotillard et Mathieu Amalric devant la caméra au cœur d’un décor roubaisien). En cette fin d’année 2019, Arnaud Desplechin est revenu dans les salles obscures avec une œuvre inspirée et tournée dans les méandres de sa ville natale. Séance de rattrapage en DVD.

Roubaix, une lumière retrace les faits d’une sombre affaire de meurtre face à laquelle le commissariat de Roubaix fut confronté lors de l’hiver 2002, au cours des fêtes de fin d’année.

Le fait divers qui inspira Roubaix, une lumière au cinéaste lui fut raconté par ses parents. L’histoire de la séquestration et du meurtre d’une vieille dame, la veille de Noël, devint l’un des événements marquants qui choqua pour longtemps l’ensemble des habitants de cette métropole du Nord de la France.

© Shanna Besson

Cette histoire fut le sujet du documentaire Roubaix, commissariat central, réalisé par Mosco Boucault, diffusé en 2008 par France Télévision, mais elle ne fut pas la seule source d’inspiration qui permit à Arnaud Desplechin de mettre en scène Roubaix, une lumière.

Dans ces mêmes années, la ville de Roubaix connut un commissaire d’origine algérienne très charismatique. Il n’était pas lié à l’enquête du meurtre mais Desplechin souhaitait absolument faire se croiser le récit de ce triste fait divers et la vie de cet enquêteur emblématique.

© Shanna Besson

En réalisant ce film, Desplechin a voulu donner un côté sacré à la réalité. Pour ce faire, il s’est concentré sur les faits et il a pris son temps. L’idée à la base de cette œuvre traîna longuement dans sa tête mais il a attendu que ce projet et lui-même aient atteint la maturité qu’il fallait pour créer un tel film.

Avec Roubaix, une lumière, Arnaud Desplechin fusionne sa griffe caractéristique très intimiste avec le cinéma de polar. Cette enquête policière dépeint la naissance d’une famille (l’inspecteur Daoud campé par Roschdy Zem) et la facticité d’une autre (la romance superficielle entre Marie – Sara Forestier – et Claude – Léa Seydoux). Pour le réalisateur lui-même, cette œuvre est construite par une addition de solitudes.

© Shanna Besson

Desplechin ne voulant pas écrire de rôle pour des acteurs précis. Par superstition. Il reconnaît néanmoins qu’à la fin de l’écriture du script, il savait que seul Roschdy Zem pouvait camper les traits du commissaire Daoud. Si ce dernier n’avait pas accepté le rôle, Desplechin aurait tout simplement abandonné le projet et il aurait très certainement pris la bonne décision car Roschdy Zem est l’une des forces de ce film. Lui qui campe souvent des personnages durs est placé ici dans la peau du commissaire Daoud, un homme qui a une vie austère mais qui garde son sourire.

Sara Forestier était aussi l’une des certitudes de Desplechin pour la mise en œuvre de ce projet. Il avait vu le film Aime que l’actrice avait réalisé. Cette œuvre fut malheureusement très mal reçue par la critique. Pourtant, Desplechin fut touché par cette réalisation alors il transmit un mot de soutien à Sara Forestier. Cette dernière répondit par une simple phrase; « Quand vous voulez et où vous voulez ».

© Shanna Besson

Le personnage de Claude fut plus compliqué à caster. Il ne comprenait pas vraiment les motivations et la psychologie de cet être. Léa Seydoux, qui a une passion pour les rôles populaires et la justesse, vint à sa rencontre car elle souhaitait absolument obtenir ce rôle. Desplechin ne répondit pas de suite par l’affirmative mais lui proposa de l’aider à construire et à découvrir Claude, cette reine qui résiste.

Récemment, cette douzième réalisation a permis à Desplechin de recevoir la plus haute distinction lors de la 34e édition Festival International du Film Francophone de Namur. Le cinéaste roubaisien se vit décerner le Bayard d’Or pour ce polar qui, tout en sortant des normes qui collent à son univers (une scène d’interrogatoire en temps réel et donc XXL), reste une œuvre qui porte l’essence du cinéma de Desplechin.

Roubaix, une lumière

De Arnaud Desplechin

Avec Roschdy Zem, Léa Seydoux, Sara Forestier, Antoine Reinartz

Drame, Polar

119 minutes

Sorti le 29 août en France et le 16 octobre 2019 en Belgique

Sorti le 3 janvier 2020 en DVD

Un commentaire

Répondre à Soiauq Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.