Depuis Alice au pays des Merveilles ou Little Nemo (pour rester dans la BD), les envies d’autres mondes n’ont cessé de donner corps et âme, imagination aussi, à des histoires et des albums de bande dessinée. Comme dans Narnia, on tire une porte dérobée. Comme dans Peter Pan, une Fée Clochette vient nous tirer de nos rêves pour en amener d’autres. Ou alors comme FRNCK, on tombe dans un trou; comme Louise, on pénètre une forêt mystérieuse et comme Gertrude, on se fait aspirer par la moquette de sa chambre. Vaciller vers un monde inconnu, étrange ou inquiétant, ça se joue parfois à rien.
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FRNCK : même en retrouvant des voyelles, l’homme moderne ne retrouve pas ses jeunes en pays préhisto !
Résumé de l’éditeur : Après avoir réussi à se faire accepter par une tribu d’Homo sapiens, Franck décide d’apporter un peu de modernité dans la vie de sa famille d’adoption. Puisqu’il en a marre de manger de la viande crue, il tente de persuader Grrr (prononcez « Gérard »), le chef de la bande, de domestiquer le feu. Mais ses tentatives à base de bois secs et de silex frottés l’un contre l’autre font long feu et ne suscitent que moqueries et mépris de la part des hommes préhistoriques, assez rétifs aux progrès technologiques. Quand Franck arrive enfin à ses fins, c’est pour asphyxier la moitié de la tribu. Pour Gérard, c’en est trop ! Franck est chassé de la tribu, vu ses inventions loufoques et foireuses (le savon, la roue, le football…) et sa totale inutilité au sein du groupe. Il ne pourra revenir qu’à une condition : en prouvant ses qualités de chasseur !
Après une entrée en matière excitante, Olivier Bocquet, Brice Cossu et Yoann Guillo ont retrouvé des voyelles pour continuer à explorer le monde hirsute et sauvage dans lequel Franck est tombé, créatures plus gigantesques les unes que les autres à l’appui. Et force est de constater que, cabotin gamin qu’il est, notre jeune héros n’est pas forcément adapté à la vie dans cette société archaïque. C’est difficile d’être un précurseur et un homme du XXIème siècle dans un milieu primitif. S’ils sont comiques au premier regard, les Homo Sapiens se montrent vite hermétiques aux innovations que Franck peut leur amener.
Et force est de constater que notre ado carrément perdu fait pire que mieux. Le voilà donc chassé pour mieux faire ses preuves. En mode « Tu seras un homme mon (arrière-arrière-arrière-arrière-(…)-arrière-)petit-fils, les trois auteurs mettent leur héros à l’épreuve dans un véritable rite de passage. L’heure est grave, « il va faire tout noir » (comme dirait un autre), et Franck se dit qu’un peu de feu, ce ne serait pas du luxe. Pour l’homme moderne qu’il est, rien ne semble plus simple, mais c’est sans compter des lapins plus malins que crétins mais très kawaii, des bêtes indomptables et des mammouths colossaux.
L’enjeu de ce deuxième album est plutôt maigre mais offre une vraie bulle de détente pour mieux appréhender les limites (infinies ?) de cet univers. Les auteurs, sans nous resservir la soupe du premier tome, sont d’ailleurs les premiers aventuriers et explorateurs de ce monde plein de promesses, en toute décontraction mais aussi en grandes frénésie et expressivité. Toujours sans aucun temps mort, FRNCK fait sa loi et prouve que la préhistoire, vue comme ça, ce n’est pas si nul que ce que la quatrième de couverture annonce.
Série : FRNCK
Tome : 2 – Le Baptême du feu
Scénario : Olivier Bocquet
Dessin : Brice Cossu
Couleurs : Yoann Guillo
Genre : Fantastique, Aventure, Humour
Éditeur : Dupuis
Nbre de pages : 56
Prix : 10,95 €
Date de sortie : le 25/08/2017
Extraits :
I hate Fairyland : cons de contes…
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Résumé de l’éditeur : Trente longues années de captivité et de bain de sang durant lesquelles sa seule motivation a été de rentrer chez elle. Bienvenue au royaume de la reine Claudia, des hommes-champignon, des faunes zombies et des haches géantes. Bienvenue à Fairyland.
Les lapins kawaii de FRNCK vous ont mis en appétit ? Vous n’avez pas peur de l’overdose de « glauquebi »-boulga ? Si un niveau de Candy Crush vous donne du fil à retordre depuis des mois, que vous avez envie de casser du Télétubbies et de sortir le bâton du cul de Jiminy Cricket décidément bien trop gentil, on a ce qu’il vous faut ! I hate Fairyland est une série déjà bien implantée au pays de l’Oncle Sam et des comics et voilà que le deuxième volume des aventures de Gertrude la terrible gentille petite fille débarque chez nous. Une chose est sûre, l’histoire que déroule Skottie Young n’est pas piquée des vers !
Cela dit, après un premier tome dans lequel on ne savait où donner de la tête, Skottie Young fait comme les auteurs de FRNCK et freine un peu (mais pas trop) la cadence pour mieux explorer ce monde laissé en cendre et en sang par sa nouvelle reine. De longues années de despotisme y auraient-elles contribué ? Pas du tout, il n’a fallu que vingt pages à Gertrude pour faire de ce havre de paix, un calvaire, un coupe-gorges (aussi jolies soient-elles).
Voilà que le monde sans ombre au tableau devient sans vergogne. Et au milieu de tout ça, Gertrude cherche toujours la porte de sortie. Et peut-être (on dit bien peut-être) que Duncan, le gentil enfant-dragon, arrivé à Fairyland par la force de la… ch(i)asse, sera d’une grande aide dans cette quête. Encore plus dans l’arène constituée pour gagner sa liberté par le vieux Nick Neuf (pour le coup, Skottie crée la surprise et invite, en 3D, Jeffrey « Chamba » Cruz).
Vous l’aurez compris, Skottie ne s’interdit et encore moins le pire, le cynisme, la noirceur des contes de fée puis défaits. Un régal jusqu’à l’overdose rose bonbon.
Série : I hate Fairyland
Tome : 2 – Sur le trône
Scénario et dessin : Skottie Young (Facebook)
Dessin additionnel : Jeffrey « Chamba » Cruz
Couleurs : Jean-François Beaulieu
Traducteur : Julien Di Giacomo
Genre : Fantastique, Aventure, Humour, Trash
Éditeur : Urban Comics
Collection : Urban Indies
Éditeur VO : Image Comics
Nbre de pages : 152
Prix : 15 €
Date de sortie : le 08/09/2017
Extraits :
La Grande Ourse : une balade au clair de la Lune et de la Grande Ourse salvatrice
Résumé de l’éditeur : Louise, une jeune femme d’une vingtaine d’années, peine à oublier ses proches disparus. Elle vit depuis en leur compagnie, au point même de se couper des vivants de peur de les perdre à leur tour… Sourire, profiter de la vie sont des choses qu’elle semble ne plus savoir faire. Soudain, l’étrange Phekda – une étoile, l’une de la Grande Ourse – fait irruption… et l’entraîne dans une immersion au plus profond d’elle-même. Une immersion qui passe par une virée sur la plage de son enfance, par une nuit dans une petite maison biscornue, par une forêt labyrinthique qui oscille entre réel et fantastique jusqu’à la montée de cet incroyable escalier sorti des nuages… Mais où la mènera-t-elle ? Et quelles en seront les conséquences ?
Voilà sans doute l’album le plus proche d’Alice au pays des Merveilles de par ses thèmes et le déroulé de son histoire. Le plus lointain aussi, car Elsa Bordier et Sanoe (dont c’est le premier album et elle ne loupe pas le coche : ses ambiances sont telles qu’elles ont vite fait, une fois la page tournée, d’imbiber l’espace-temps du lecteur) donnent à cette incursion en terres inconnues, entre hier et aujourd’hui, entre le deuil et la renaissance, une tournure très personnelle. Après FRNCK et I hate Fairyland, dans lesquels le fun est avant tout de rigueur, on entre ici dans la profondeur dramatique… mais aussi légère.
À la faveur du ciel et de ses étoiles, dans ce monde où la lumière façonne l’ombre et vice-versa, la Grande Ourse est une sorte de catharsis, pas trop rude, pas un chemin de croix mais pas non plus une balade insouciante. Tout est question de déséquilibres pour arriver à l’équilibre, pas à pas, sans vouloir aller trop vite. Dans ce monde féérique autant que monstrueux, Louise va être guidée par Phekda (sa fée Clochette, son Jiminy Criquet, son étoile !) à la rencontre d’un immense poulpe, d’un gigantesque renard (d’influence Hausmanienne ?) mais aussi d’un palais surréaliste… à la rencontre d’elle-même (de manière un peu passive, tout de même) et face à ses peurs, surtout.
Et puis il y a cette grande case noire, oserez-vous vous y projeter ou resterez-vous sur le palier ? Tout en nuances, les deux autrices prouvent à quel point une balade au clair de la Lune et de la Grande Ourse peut être salvatrice.
Titre : La Grande Ourse
Récit complet
Scénario : Elsa Bordier
Dessin et couleurs : Sanoe (Page Facebook)
Genre : Fantastique, Aventure, Initiatique
Éditeur : Soleil
Collection : Métamorphose
Nbre de pages : 86
Prix : 17,95 €
Date de sortie : le 13/09/2017
Extraits :
Benjamin Blackstone, méta-littéraire et méta-physique entre Cthulhu et Pénélope
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Résumé de l’éditeur : Un grand danger rôde ! Oh oui ! Mais que Rouletabille, Pénélope et Cthuthu se rassurent : Benjamin Blackstone et Lord Schenbock n’ont peur de rien… pas même de l’assassin des parents de Benjamin !
Je m’en voudrais de clôturer cette salve en pays imaginaires sans vous parler de cette pépite qu’est Benjamin Blackstone, le petit héros en culottes pas si courtes qui traverse les univers littéraires devenus graphiques. Grâce à l’intervention du fantôme (qu’est-il vraiment) Lord Schenbock, Benjamin peut pister l’assassin de ses parents, d’oeuvre en oeuvre, de genre en genre et dans des styles très différents. Cette fois, c’est dans les pages d’Homère, Leroux mais surtout d’HP Lovecraft que Blackstone doit se glisser pour venir à bout du mystère.
Ce n’est pas du plagiat, c’est de l’emprunt, de la récréation. De la re-création aussi. Et si l’exercice pourrait sembler facile, il n’en est rien tant les auteurs parviennent à faire le lien entre les univers radicalement différents sans les dénaturer. S’il manque un rien de fluidité dans les dialogues et cartouches, François Rivière, Nicolas Pergé et Javier Casado font oeuvre de cohésion et livrent une grande et enthousiasmante aventure qui donne aussi envie de lire les auteurs explorés, redonne le goût de lire des textes au-delà des images… sans pour autant se priver du travail mûri et réfléchi de l’impérial Javier Casado.
Loin de laisser Cthulhu, Rouletabille ou Pénélope venir à lui, le dessinateur a été vers ces personnages cultes, les a appréhendés sans les dépayser mais en les invitant dans une aventure bien loin de leurs textes originels. Un des concepts les plus ravissants de ces derniers mois.
Série : Les aventures ahurissante de Benjamin Blackstone
Tome : 2 – La mystérieuse Odyssée de la clé perdue
Scénario : François Rivière et Nicolas Pergé
Dessin et couleurs : Javier Sanchez Casado
Genre : Fantastique, Métalittéraire, Aventure
Éditeur : Casterman
Nbre de pages : 48
Prix : 13,95 €
Date de sortie : le 13/09/2017
Extraits :
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