Finies les merveilles, les héritiers d’Alice sont au pays de la peur qui veille

Une forêt étouffante et mystérieuse, des rencontres tour à tour burlesques, effrayantes ou aidantes et une aventure plus ou moins onirique et initiatique, on connaît l’histoire. Et si par la grâce (ou pas d’ailleurs) du cinéma, Alice, l’héroïne de Lewis Carroll est revenue au goût de l’air du temps, elle ne cesse depuis de faire des émules. Avec plus ou moins d’adresse. L’épouvantable peur d’Épiphanie Frayeur et Dans la forêt sombre et mystérieuse font partie des bons feuillets sous influence mais avec une patte et une originalité qui prouvent qu’ils sont bien loin d’être des pâles copies.

L’épouvantable peur d’Épiphanie Frayeur

© Gauthier/Lefèvre chez Soleil
© Gauthier/Lefèvre chez Soleil

Les plus grands défis pour un enfant peuvent paraître comme les plus insignifiants aux yeux des grands. Grand comme la peur qui se tapit dans l’ombre d’Épiphanie Frayeur, petite fille de même pas neuf ans qui doit apprendre à vaincre son démon qui lui colle à la peau. Mais comment faire? Avec ses cheveux constamment électrisés et dressés par l’horreur, personne ne la prend au sérieux dans cette forêt aussi envoûtante que malsaine.

© Gauthier/Lefèvre chez Soleil
© Gauthier/Lefèvre chez Soleil

Résolument, pour se débarrasser ou du moins apprivoiser, telle une petite princesse sans renard mais avec une grosse frayeur, son indicible ennemi, Épiphanie doit faire appel à un ami. Mais qui du psychiatre à côté de ses pompes, du coiffeur zozotant, du directeur de cirque au lasso fulgurant et du Don Quichotte qui a changé de vie et de livre pourra l’aider?

© Gauthier/Lefèvre chez Soleil
© Gauthier/Lefèvre chez Soleil

Une ombre polymorphe et le tour est joué, Séverine Gauthier et Clément Lefèvre ont trouvé une excellente manière de donner corps à nos peurs d’enfants (et d’adultes, pourquoi pas). Poétique et étrange, c’est à un spectacle burtonien et néanmoins tout public que nous invitent les deux auteurs. L’endroit idéal pour compatir et se prendre de tendresse avec cette petite fille transie d’effroi mais fort téméraire pour la peine. Sans longueur mais en variant judicieusement les paysages, leurs couleurs, leurs beautés, les deux auteurs livrent une douce fable qui fait rêver et éloigne tous les cauchemars.

© Gauthier/Lefèvre chez Soleil
© Gauthier/Lefèvre chez Soleil

lepouvantable-peur-depiphanie-frayeur-gauthier-lefevre-couvertureTitre: L’épouvantable peur d’Épiphanie Frayeur

Récit complet

Scénario: Séverine Gauthier

Dessin et couleurs: Clément Lefèvre (Sur Facebook: Les cartons de Nenent ou Clément Lefèvre)

Genre: Conte, Fantastique

Éditeur: Soleil

Collection: Métamorphose

Nbre de pages: 92

Prix: 18,95€

Extraits (et quelques bonus que vous trouverez sur les pages Facebook Clément Lefèvre):

Dans la forêt sombre et mystérieuse

©Winshluss chez Gallimard
©Winshluss chez Gallimard

À peu de chose près, c’est dans une forêt identique que nous restons pour accompagner un petit garçon, un rien plus vieux qu’Épiphanie et, a priori, sans peur et sans reproche. Angelo, l’aventure ça le connaît. Passionné des animaux, il entend bien y consacrer sa vie. Qu’importe ce qu’en pense son bouffon de frère. Ce jour-là, d’ailleurs, ils sont encore en train de se disputer quand le coup de téléphone fatidique vient ébranler la chaumière: grand-maman ne va pas bien. Est-ce le temps ou les hommes, mais la géniale mamie est proche de rendre l’âme. Et, ni d’une ni deux, toute la petite famille s’engouffre dans la voiture familiale pour rallier au plus vite (c’est sans compter le GPS qui fait des siennes) la maison de grand-mère.

©Winshluss chez Gallimard
©Winshluss chez Gallimard

Sauf que dans la précipitation, Angelo, trop occupé à traquer un dinosaure miniature est oublié sur une aire d’autoroute. Après avoir tenté de faire de l’auto-stop, sans succès, l’Indiana Jones en herbe décide de couper par la forêt pas forcément recommandable. Commence alors une épopée à la rencontre de fourmis rouges féroces, de Fabrice l’écureuil qui voulait faire comme l’oiseau (nul ne sait si Fugain lui a donné l’idée), d’un gros nuage en colère et en tempête ou encore d’un crapaud obèse et chanteur qui fume le cigare en compagnie d’une chenille qui pourrait être la cousine de celle, « narguiléante », d’Alice. Et on en passe.

©Winshluss chez Gallimard
©Winshluss chez Gallimard

Moins initiatique mais tout aussi fun et plus délirant qu’Épiphanie Frayeur, Dans la forêt sombre et mystérieuse s’adresse sans doute plus aux adultes. Ainsi Winshluss (le Fauve d’or de 2009 et comparse de Marjane Satrapi pour ses adaptations cinéma) passe pour la première fois chez Gallimard et offre à son héros un vrai rendez-vous en terre inconnue, au-delà des certitudes et touchant du bout des doigts des craintes insoupçonnées.  Le petit prince de la BD indé à la française livre ainsi un album intense, tantôt ensoleillé, tantôt sombre, conjuguant les vapeurs de l’intangible et l’aventure fantastique dans une forêt qui aurait repris ses droits tout en reprenant certaines caractéristiques de ses bourreaux: les hommes.

©Winshluss chez Gallimard
©Winshluss chez Gallimard

De son récit et hommage aux contes fantastiques qui ont horrifié nos enfances, Winshluss réussit à tirer un graphisme au potentiel cinématographique divertissant et très enthousiasmant. Angelo risque bien de ne pas rester longtemps seul dans cette forêt, une horde de lecteurs devrait avoir le bon goût de l’épier.

Titre: Dans la forêt sombre et mystérieuse

Récit complet

Scénario, dessin et couleurs: Winshluss

Genre: Aventure, Fantastique

Éditeur: Gallimard

Nbre de pages: 160

Prix: 18€

Date de sortie: le 20/10/2016

Extraits:

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